Samedi 7 janvier dernier, Emmanuel Macron sera en meeting à la Grande-Halle-d’Auvergne de Clermont-Ferrand. Va-t-il renouveler son succès du mois dernier à la porte de Versailles à Paris ? Ses comités de soutien du Puy-de-Dôme et du Cantal n’ont pas ménagé leurs efforts. Amenés par le sénateur du Cantal, président du groupe RDSE (Rassemblement démocratique et social européen) du Sénat à majorité radicale de gauche, Jacques Mézard, son soutien indéfectible, ils ont tout fait pour mobiliser.

L’élu cantalien, fidèle aux principes du radicalisme, laïcité, défense de la laïcité et de la ruralité, respect du parlement et des élus, très sévère avec l’exécutif sortant, ayant rejeté la candidature de la patronne du PRG, son parti, place tous ses espoirs dans l’ancien ministre de l’Économie qui incarne à ses yeux « le renouveau. Il est capable de faire le pont entre nos valeurs et la modernité », affirme-t-il.
Le Justin Trudeau français
Le leader d’En Marche que les media nationaux occupés par les candidats de la primaire des 22 et 29 janvier, délaissent en profite pour faire du terrain. Vendredi dans la Nièvre sur le thème de la santé, le lendemain dans la matinée, il arpentera l’Allier. L’homme qui va s’adresser au Massif Central est un jeune homme avenant au look très soigné et classique, qui peut, bras écartés, emporté par son élan, se lancer d’une voix éraillée dans des envolées messianiques qui ont stupéfait et même dérangé. Il séduit, c’est indéniable, par sa simplicité, par ses qualités relationnelles, par la droiture de son regard, par la clarté de son verbe, par son habileté à captiver l’attention. A l’international, à New York où il est allé chercher des fonds qui lui manquent pour sa campagne, ne le compare-t-on pas, déjà, à Justin Trudeau, charismatique premier ministre nord-américain, le Kennedy canadien ? Une star à l’aise dans son rôle, qui n’hésite pas à exposer son couple à la une des magazines, un bateleur qui a pris goût aux bains de foule, qui sait la captiver. C’est essentiel pour un candidat mais est-ce suffisant pour un président ?
L’homme de la révolution ?
« Macron est dans la séduction, pas dans l’action. Il ne dit jamais non aux gens, il leur dit seulement ce qu’ils ont envie d’entendre ou ce qu’ils peuvent entendre », dit de lui une de ses anciens collègues au gouvernement. Porte de Versailles, pendant une heure et demie le candidat a égrené ses propositions pour l’avenir que l’on retrouve dans son livre intitulé Révolution. Ce Narcisse, dans la communication jusqu’au bout, n’a pu s’empêcher d’orner sa quatrième de couverture de son portrait radieux. Vient ensuite la table des matières, véritable catalogue du bon élève Macron : « Ce que je suis, ce que je crois, ce que nous sommes. La France que nous voulons, investir dans son avenir, produire en France pour sauver la planète. Vouloir la France, protéger les Français, maîtriser notre destin, rendre le pouvoir à ceux qui le font ». Le style et le contenu des chapitres sont à l’avenant, lisses, consensuels, pleins de bonnes intentions. C’est Oui Oui en politique.
Alors comment expliquer que cet ancien banquier qui n’a jamais été élu, qui a jusqu’ici un parcours ultra-protégé et très classique, qui joue avec les codes les plus éculés de la communication politique, qui est tout fait intégré et le parfait produit d’un système qu’il remet en cause plaise à ce point. Personne, il y a quelques mois ne pariait sur la réussite de son aventure. Aujourd’hui plus d’un est perplexe devant l’avancée de ce jeunot qui a mordu la main d’un François Hollande qui la lui avait tendue. A droite comme à gauche, les candidats à la Présidentielle observent avec inquiétude son spectaculaire percée.
Il n’est pas le premier à avoir tenté un tel parcours, à commencer par Jean-Pierre Chevènement. Aucun ne l’a réussi. Mais l’époque a changé. Aujourd’hui serait-il plus propice qu’hier aux hommes neufs, sortis de nulle part ? Les Français vont-ils aller jusqu’au bout de leur envie de renverser la table autour de laquelle sont agglutinés les partis ? Emmanuel est-il l’homme qui correspond à ce mouvement ? Qui y a-t-il derrière ce visage avenant, un conteur de grand talent ou un entreprenant réaliste appelé à jouer un rôle dans notre histoire ?
Françoise Cariès