La La Land, a city of stars

Studio affichant un paradis artificiel aux couleurs scintillantes, lumière sur le plateau, duo de starlettes prêtes à swinguer sur les pas millimétrés de Gene Kelly, chorégraphies “minellienes”, dialogues a capella et tralalas “jacques demiens” sur les landes hollywoodiennes à la belle étoile, bien sûr sous l’euphorie de l’amour aux aromates du champagne. Moteurs… Action! [Clap]

La comédie musicale occupe une place bien particulière dans le cinéma. Il n’existe pas de case «comédie musicale» à proprement parler. Celle-ci est directement répertoriée dans le genre comédie ou musical; ne serait-ce aux Golden Globes. Désormais considérée comme niaise, ringarde voire kitch (notamment le cinéma bollywoodien), la comédie musicale n’a pas pour autant disparu des écrans et continue d’exister de façon ponctuelle; merci Baz Luhrmann.


S’attaquer à un genre suranné demande une certaine assurance; surtout quand il appartient au patrimoine américain. Le français Michel Hazanavicius avait tenté l’expérience en proposant une version deux-point-zéro du cinéma muet avec The Artist. Bien qu’acclamé par le public hollywoodien, le film résulte plus d’un travail raté et désastreux. Pari risqué donc pour le jeune réalisateur trentenaire, Damien Chazelle.

Synopsis

Mia et Sebastian, naïfs, ambitieux, vivent d’amour et d’eau fraîche. Tous deux espèrent pouvoir réaliser leur rêve: l’une souhaite faire carrière dans le cinéma et l’autre, ouvrir un club de jazz. Les chemins divergent inopinément quand Hollywood s’entremêle et saupoudre de jalousie, de désillusion, de désespoir et d’insouciance…

Un drame musical non instantané

Emma Stone et Ryan Gosling (déjà rencontrés dans la comédie Crazy Stupid Love et le distrayant Gangster Squad) en tête d’affiche, apparitions caméos de J.K Simmons (déjà présent dans Whiplash en coach tyrannique) et John Legend’ la soul mais aussi producteur exécutif, autant dire que La La Land s’offre un casting cinq étoiles.

La La Land, d’apparence gnangnan et too much, découle un curieux mélange de feuilleton dramatique et un goût véritable pour le vintage. Le film commence d’emblée par une ouverture de rideaux: format 1,33:1 (4/3) puis format cinemascope synchronisé au technicolor; typographie rétro oblige. Plan séquence in media res filmé sur un périphérique où des conducteurs de tout horizon se mettent soudainement à chanter – improbable -, se dandiner, bien loin des bouchons parisiens. Autant dire, le ton est donné et ce n’est que la première partie.

S’ensuivent amusements, drôleries, embrassades, heart warming moments, passages chorégraphiés et chansons interminables sous une mise en scène rythmée, kitch, niaise et totalement assumée: Damien Chazelle a compris et s’en donne cœur joie.
Occasion également pour le réalisateur de rendre hommage à ses mentors Vincente Minnelli, Jacques Demy et Gene Kelly qui ont contribué au genre. A savoir: le jeune réalisateur américain n’est pas à sa première comédie musicale. Son premier long métrage, Guy and Madeline on a Park Bench (Godard avec Miles Davis en bande son), témoignait d’ores et déjà sa passion pour le genre.

Pendant ce temps, nos jeunes tourtereaux, Mia et Sebastian, exultent leur joie, leur amour et ce, pendant les quatre saisons. S’ouvre alors une deuxième partie plus tendre et délicate, souligant les traits psychologiques des personnages et moins dynamique, voire nonchalante selon l’avis de quelques spectateurs. Le réalisateur peint, de façon pragmatique, une Amérique où la jeunesse soif de réussite dits «dreamers» est confrontée à ces dures réalités; surtout à Hollywood. Derrière toute cette mascarade réside une fable mélancolique, évoquant probablement l’expérience personnelle. Cette question de sensibilité et de ressenti retranscrits à l’écran est principalement dû à l’étonnante et incroyable prestation d’Emma Stone. Radieuse, elle fascine autant pendant ses auditions que ses moments dandinants aux côtés de Ryan Gosling. A eux deux, ils incarnent un couple rayonnant, respirant la joie de vivre.


Damien Chazelle livre une vision d’une Amérique scintillante, swinguant et chantant dans tous les coins de rues accompagné d’une bande originale éclectique (attention à l’épidémique «City Of Stars») et principalement jazzy. Et la tradition veut que les acteurs du films interprétent eux même les chansons; pas d’impasse possible pour Ryan Gosling.

Le jazz, un leitmotiv chazellien

De Miles Davis à Thelonious Monk en passant par Art Blakey, toute la clique BlueNote y est référée. Damien Chazelle n’est pas un simple amateur mais un amoureux véritable du jazz, et il nous le fait savoir. Il ne suffit qu’à jeter un coup d’œil à sa (courte) filmographie: tous sont imprégnés de jazz. Notamment dans le très rythmé et ambitieux Whiplash.


Il n’est donc pas anodin de voir ses personnages en faire la promotion. Lors d’une discussion autour d’un verre, Sebastian pose la question «Que sait tu du jazz?» à Mia. Celle-ci lui répond «C’est la musique d’ascenseur.» Outré, Sebastian la reprend et contextualise l’histoire du jazz. Il essaie de lui faire comprendre avec insistance qu’il n’y a pas d’ambiance particulière pour écouter et apprécier le jazz.
Plus qu’une passion, le jazz devient un motif récurrent dans les films de Damien Chazelle. Malgré le fait que le jazz soit, à l’heure actuelle, galvaudé, dévalorisé et délaissé, soutenons, comprenons et respectons la détermination du jeune réalisateur.

Ode manifeste à la comédie musicale aux allures vintages, La La Land pétille, émerveille, vivifie et ravive. Damien Chazelle réinvente le genre par son identité visuelle forte, évocatrice d’une certaine nostalgie et de l’amour éphémère. Il livre également une vision d’un monde parfois niais et kitch mais insiste sur la persévérance et le travail qui finissent toujours par payer.

La preuve: encensé et récompensé par les festivals du monde entier, le film a récemment été nommé dans toutes les catégories à l’Académie des Oscars. Il ne reste plus qu’à croiser les doigts.

Charlie Tamperry

Actuellement en salle

«La La Land» de Damien Chazelle 2h08
Avec Ryan Gosling, Emma Stone, John Legend, Rosemarie DeWitt et J.K. Simmons

Genre Comédie musicale Année 2016

 

 

 

Commentaires

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  1. La La Land, pâle copie de nos commedies musicales françaises ou americaines, scenario sans queue ni tête , dialogues singeant ceux de Woody Allen , ” faux ” danseurs ..dont on attend le “faux ” pas ..si j’avais ètè seule je quittais la salle après le ballet bancal sur l’autoroute , car la pagaie .. n’allait plus finir!!!
    a éviter à tous prix!

  2. Sur la même longueur d’onde que CB, j’ai failli quitter la salle à la mi-temps. C’est du sous-sous-sous-sous-Demy. Dommage,- car le metteur en scène avec sa francophilie a l’air plutôt intéressant dans les interviews. En revanche, le ballet sur les caisses enchevêtrées dans l’embouteillage m’a plutôt fait rêver, un fantasme que de pouvoir piétiner ces carrosseries immobiles. Et la musique est prometteuse, mais alors après, quelle catastrophe, d’autant que la comédienne ne sait pas trop danser et puis, sans être trop désagréable elle a les yeux exorbitées de Marion Cotillard, vraiment ces ricains d’aujourd’hui ne sont pas des gens comme nous…Où sont les vrais comédies musicales us bien tartes, sucrées, surannées, ringardes avec les Fred Astaire et Gingers Rogers, mais au moins les musiciens swinguaient, les comédiens savaient danser et dans la note.

  3. j ai adoré!!!
    la forme,le fond,l esthetisme,la musique,l interprétation géniale,les références etc…quel plaisir ce film..il mérite amplement ces prix ainsi que l accueil positif du public au vu des files d attentes et du bouche à oreille..

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