Super Wenesday place de Loire
En attendant le super Tuesday du 3 mars prochain, décisif dans la course à l’investiture présidentielle démocrate, Orléans vit son super Wenesday ce 13 février : la publication de l’unique sondage sur les municipales un mois avant le premier tour, mais aussi la présentation des listes Carré et Chapuis, des Carmes à la place de Loire.
Battre Trump : par le centre ou par le socialisme ?
Après le fiasco du désuet caucus de l’Iowa la semaine passée, la première primaire du petit État de Nouvelle Angleterre était très attendue mais ses leçons ne sont pas de portée immédiate. L’apparente courte victoire du sénateur socialiste Bernie Sanders marque en réalité un très net recul par rapport à son triomphe d’il y a quatre ans face à Hillary Clinton. En revanche, les centristes montrent leur force en dépit de l’effondrement de l’ancien favori, l’ex vice-président Joe Biden, relégué à un 5ème rang humiliant. Derrière la confirmation qu’il faudra compter avec « Mayor Pete », la surprise est venue de la sénatrice Klobuchar, pugnace lors des débats, et qui pourrait bien rivaliser avec Buttigieg pour incarner une candidature crédible, rassembleuse et modérée face à Trump.
Avec la déception d’Elizabeth Warren dont le « moment » semble passé, les centristes peuvent, s’ils se débarrassent vite de l’hypothèque Biden, montrer qu’ils demeurent majoritaires au sein des démocrates. Tout le défi consisterait alors à ne pas se couper du formidable élan de jeunesse et d’enthousiasme qui se retrouve dans la campagne de Bernie Sanders.
Hôtel Groslot, Orléans – ©GIRAUD Patrick
Gagner le Groslot : Orléans rive droite ou coulée verte ?
Bien loin de la Caroline du Sud, du Nevada et du super Tuesday, la vieille cité d’Orléans s’approche du scrutin municipal. Avec deux candidats ayant déjà exercé la fonction de maire, issus de la même équipe, les rapports de force sont bien difficiles à saisir, surtout quand on y ajoute la sensibilité aiguë à l’enjeu climatique et le discrédit d’une majorité gouvernementale plombée par une année de contestation.
L’attente vis-à-vis du sondage France Bleu Orléans-Tribune hebdo n’en était qu’aiguisée.
Le sondage fait-il l’élection ?
Comme la télévision, les sondages ont été accusés depuis leur apparition il y a un siècle – depuis 1938 et l’IFOP en France au moment des accords de Munich – de fausser l’élection en pesant sur le libre choix des électeurs. Si pour les débats télévisés, les analystes convergent pour relativiser l’influence des joutes cathodiques, à l’exception de l’implosion d’incompétence de Marine Le Pen en 2017, l’effet d’un sondage sur l’opinion publique est indéniable, a fortiori quand cette étude est unique. L’effondrement de Chaban face à Giscard avant le 1er Tour de 1974 a été accéléré par la perception sondagière du franc-tireur VGE et en 2017 le succès par effraction de Macron s’est nourri au sentiment d’un « vote utile » d’électeurs socialistes désespérés de l’effondrement de Hamon, inquiets de la montée en puissance des intentions de vote en faveur de Melenchon et stratèges pour éviter la perspective d’un second tour Le Pen/Fillon.
Le compte à rebours des 31 jours. Retour vers le futur ?
Serge Grouard – photo : Jean-Luc Bouland
À 31 jours du premier tour, le sondage IPSOS est un coup de tonnerre. Si la marge d’erreur doit conduire à la prudence, le fait que l’ancien maire Serge Grouard déboule en tête peut apparaître comme une surprise. Avec un tiers des intentions de vote pour le premier tour (32 %), le chiraquien montre une nouvelle fois sa capacité à faire campagne et à mobiliser l’électorat de droite traditionnel, les personnes de plus de 60 ans du centre-ville, ceux qui participent le plus au vote. L’absence de liste Rassemblement national profite également à Serge Grouard (il en récupère la moitié) et le légitimiste de la droite modérée pourrait renforcer son avance.
La position délicate du maire sortant
Olivier Carré. ©M-L Bonneau
En revanche, avec un quart seulement des intentions de vote (24 %), Olivier Carré est en grande difficulté, fragilisé par l’impopularité du gouvernement et l’éclatement de sa majorité municipale. Surtout, les thématiques mises en avant par les électeurs pour motiver leur vote correspondent aux fondamentaux du programme Grouard : santé (une singularité orléanaise), sécurité, environnement, stationnement.
Une poussée verte nationale freinée par la division de la gauche
Enfin, le maire sortant est talonné de près par le candidat écologiste Jean-Philippe Grand, porté par la vague nationale sur l’enjeu climatique en dépit de sa faible notoriété. Ses 22 % traduisent une poussée, mais sa 3ème place décevra dans un contexte où bien des métropoles placent en tête les écologistes.
Nathalie Kerrien
La course pour la possibilité de fusionner avec les grandes listes au second tour voit trois listes dans un mouchoir de poche, au-dessus de la barre des 5 % : le socialiste Baptiste Chapuis (7 %), l’ancienne adjointe à la culture Nathalie Kerrien (6 %) et l’insoumis Valentin Pellé s’il parvient à boucler sa liste (6 %).
Dans ces hypothèses, le second tour serait aussi serré et imprévisible que les dernières élections régionales en Centre-Val-de-Loire avec 3 listes au coude-à-coude, mais un avantage à Serge Grouard du fait des divisions à gauche. Le choix de Nathalie Kerrien pourrait peser lourd.
La glorieuse incertitude démocratique
Les déçus du sondage du 13 février pourront toujours se consoler et se redonner du courage à battre la campagne en se remémorant qu’il y a moins d’un mois, tous les sondages assuraient que le même homme serait vainqueur dans l’Iowa et le New-Hampshire : « Joe l’endormi ». C’est la campagne qui fait l’élection et là décision définitive se fait de plus en plus tard.
Paul Vuizet pour Magcentre