Ses collègues et les membres d’ EELV qu’il a récemment quitté sont formels : « il ne faut pas voir dans la révélation du comportement de Denis Baupin un coup politique. Dans celles qui se sont tues jusqu’ici, il y a tous les âges, de 24 à 70 ans. Elles avaient peur de parler, enfin elles ont osé. C’était très connu dans le parti », nous a déclaré la sénatrice verte Ester Benbassa. Vice-président de l’Assemblée nationale, prié de démissionner de ce poste par Claude Bartolone, son président, Denis Baupin s’est exécuté en début d’après-midi.
Ce lundi, tôt dans la matinée, le site Mediapart et France Inter dans sa matinale révélaient que l’élu écologiste de Paris serait l’auteur présumé d’ harcèlements sexuels pour la plupart couverts par la prescription et émanant du témoignage de huit victimes. Silencieux pendant plusieurs heures, celui qui est par ailleurs l’époux de la ministre du logement, Emmanuelle Cosse avec qui il a deux jeunes enfants, a réagi à travers un communiqué de ses avocats affirmant que « ces allégations étaient mensongères, diffamatoires et qui ne reposent sur aucun fondement. M. Denis Baupin conteste fondamentalement l’idée de harcèlement sexuel et plus encore d’agression sexuelle, lesquels lui sont totalement étrangers ».
Des députées racontent
Cependant Sandrine Rousseau, porte-parole d’EELV, l’une des élues dénonçant ce comportement a rapporté sur France Inter des faits remontant à octobre 2011 lors d’une réunion à Montreuil : « J’ai voulu faire une pause. Denis Baupin est venu. Il m’a plaquée contre le mur en me tenant par la poitrine et a cherché à m’embrasser. Je l’ai repoussé violemment », avant d’ajouter, « j’en ai parlé à un membre du parti qui m’a répondu : « Ah ! Il a recommencé ! »
Isabelle Attard parle, elle, de « harcèlement quasi quotidien de SMS provocateurs, salaces. Il y avait des moments où on, n’en avait plus, c’était par salves ». Elle fait remonter ces faits de juin 2012 date de son élection dans la cinquième circonscription du Calvados à son départ d’EELV fin 2013. Selon elle « nous étions plusieurs députées à recevoir le même SMS ».
Elen Debost, adjointe EELV au maire du Mans, confie avoir décidé de parler en tombant le 8 mars, journée de la femme sur la photo de plusieurs députés les lèvres maquillées de rouge sur laquelle figurait Denis Baupin et destinée à protester contre « les violences faites aux femmes ». « Prise de nausée, j’ai vomi », explique Elen Debost dans une lettre adressée à la direction du parti et publiée par le Parisien.
Plusieurs membres d’EELV n’ont pas protesté de l’innocence du député certains allant jusqu’à dire « c’était très, très connu dans le parti ». Actuel secrétaire national par intérim, David Cormand a déclaré sur France Inter être « très reconnaissant aux femmes qui ont été victimes de ces agissements d’oser le dire aujourd’hui. Quel que soit le moment où on le fait, dès qu’on en a connaissance et dès qu’on a le courage de le dire, il faut le faire ».
Pétition pour lever l’omerta
Il y a un an, dans « Bas les pattes », des journalistes dénonçaient le sexisme des politiques. Ce lundi une pétition a été lancée sur la plate-forme Change.org, intitulée « Violences sexuelles en politique, levons l’omerta ». R relayée par la militante féministe Caroline de Haas, elle s’adresse aux responsables de partis politiques et aux présidents de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental, leur demandant notamment d’inscrire dans leurs statuts que tout responsable du parti ou élu auteur de violences sexuelles est exclu et d’inscrire dans le règlement intérieur, déclaration de principe ou de statut de leur parti ou institution, la lutte contre les violences sexuelles comme une priorité.
Dans un communiqué , l’association « Osez le féminisme » demande à « en finir avec l’impunité des puissants » et rappelle que “penser que l’affaire Denis Baupin est isolée est une erreur : depuis des années, des hommes politiques ont été impliqués dans des affaires de violences machistes : Dominique Strauss-Kahn (qui mit fin à la procédure judiciaire américaine par une transaction financière), George Tron (renvoyé aux assises pour viols aggravés), plus récemment Jean-Michel Baylet (article paru dans Buzzfeed le 10 mars dernier relatant une transaction secrète avec une ancienne collaboratrice qu’il aurait molestée en 2002), Michel Sapin (qui a claqué l’élastique de la culotte d’une journaliste à Davos affaire révélée en Avril 2016 dans « L’Elysée off »), et maintenant Denis Baupin. Pour cinq affaires qui sortent publiquement, combien d’autres sont étouffées, dissimulées, condamnant les victimes au silence ? »
F.C. avec l’AFP
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