C’est Léandre Boizeau qui l’animera. On ne le présente plus. Instituteur, militant de gauche, passionné d’écriture, fondateur des éditions La Bouinotte (la petite fenêtre en Berrichon) président d’honneur du Comité de Soutien à Mis et Tiennot. Il évoquera Les forçats de la faim livre auquel a collaboré l’historien Yvon Bionnier.
Ces forçats furent condamnés à la suite d’une affaire qui, en 1847,a secoué le Berry, province pourtant réputée calme. Elle a laissé des traces profondes dans cette région et une culpabilité dont les mentalités commencent à peine à se défaire.
En 1847, année de la « Jacquerie ». Buzançais, village rural de l’Indre, est le théâtre de désordres sanglants. En 1846 la récolte de céréales a été mauvaise, le pain est cher, quasiment hors de prix. En France l’économie est en crise. A Buzançais comme partout dans la région de nombreux malheureux sont sans travail. C’est la misère. Dans toute la région il y a déjà eu des saccages de moulins et de châteaux.
Trois condamnations à mort et de vingt condamnations aux travaux forcés
Au matin du 13 janvier 1847 arrive à Buzançais en provenance de la Touraine, un chargement de blé à destination d’Issoudun. Les conducteurs s’arrêtent à une auberge du faubourg des Hervaux. Des femmes s’attroupent, s’opposent au départ du convoi malgré l’intervention du maire et de la maréchaussée locale. La tension monte. Les charrois sont conduits dans la cour du collège où il doit être procédé à une distribution de blé.
La nuit, arrive l’excitation s’accroit et, à l’aube, éclate une émeute dirigée contre les riches du
village. La foule pille le moulin et la maison de M. Cloquemin, saccage les habitations de M.M Gaulin, Brillant et Dauvergne. Chez M. Chambert c’est le drame : un émeutier est tué, en représailles M. Chambert est massacré ! Le préfet de Châteauroux venu avec une escorte de vingt-cinq dragons n’ose intervenir et reprend, prudemment le chemin de la préfecture. Il faudra l’arrivée de la troupe pour que le calme soit rétabli.
Le 19 janvier la répression commence. De nombreuses arrestations sont opérées suivies en mars de trois condamnations à mort et de vingt condamnations aux travaux forcés par les assises de Châteauroux.
Des vies brisées, volées
La nouvelle de la Jacquerie de Buzançais remonte jusqu’à Paris et connait un retentissement national. La dureté de la répression trouve un écho dans L’Éducation sentimentale de Gustave Flaubert. Victor Hugo en parle dans les Misérables, Karl Mark dans La lutte des classes en France, George Sand dans Les Correspondances, Jules Vallès dans Les Blouses.
Ces faits proprement dits ont donné lieu à plusieurs conférences de Léandre Boizeau et Yvon Bionnier. Cette fois le conférencier centrera ses propos sur l’impitoyable répression : deux cents arrestations, trois condamnations à mort exécutées sur la place de Buzançais, départs pour les travaux forcés . Une mère de famille, un vieillard sont envoyés à la centrale de Fontrevaud. D’autres atterrissent au bagne de Rochefort où les détenus sont traités comme du bétail. D’autres sont envoyés en Guyane, l’enfer, la maladie, la mort. Des vies brisées, volées. Léandre Boizeau dit : « des petites gens sans aucune défense, naïfs, apeurés qui croient en la justice laquelle les punit lourdement. La justice fut le bras armé du pouvoir, les magistrats étaient également députés et possédants. Ils ont rendu une justice de classe. Ce fut la même chose en 1946-47 face à Mis et Tiennot ».
Françoise Cariès.
Les forçats de la faim. Éditions La Bouinotte.
Conférence. De Léandre Boizeau, organisée par l’association Lecture et loisirs
Vendredi 27 janvier, à 18 h 30, à la bibliothèque. 36500 Vendœuvres