La large victoire de Benoît Hamon hier a esquissé le paysage de la présidentielle. À ce jour il est loin d’être celui qu’on attendait il y a encore quelques mois. Qui au printemps aurait parié un kopeck sur Emmanuel Macron ? François Fillon a gagné la primaire de la droite et du centre alors qu’Alain Juppé partait favori.
Cécile Duflot a été mise hors-jeu par les Verts, remplacée par un quasi inconnu du grand public, Yannick Jadot. Le 15 décembre, dernier jour de dépôt des candidatures à la primaire de la Belle Alliance, personne n’imaginait le triomphe de Benoît Hamon, le frondeur qui a quitté le gouvernement à l’insu de son plein gré et n’a eu de cesse, depuis, de s’élever contre la politique menée par les Hollandais. Le pays est allé de surprise en surprise et rien ne dit que ce soit fini.
Pour l’heure, sont sur la ligne de départ, à la droite de l’échiquier, Marine Le Pen pour le Front national, François Fillon pour la droite et le centre, sur la gauche, Nathalie Arthaud pour Lutte Ouvrière, Jean-Luc Mélenchon, le patron du parti de gauche , Yannick Jadot pour les Verts et pour le parti socialiste Benoît Hamon qui sera officiellement intronisé dimanche 5 février à la Mutualité en l’absence de Manuel Valls. L’ancien premier ministre redevenu député d’Evry « va pendre quelques jours de congé pour retrouver ses proches, prendre du recul et réfléchir ». Entre ces deux ailes, trône Emmanuel Macron qui, lui, s’est déclaré « ni de gauche ni de droite ».
Les Fillon chez les juges
Jusqu’ici, pour les élections présidentielles, la fin janvier a été le temps des clarifications. Les candidats étaient définitivement connus. Ce n’est pas le cas de l’édition 2017 où les incertitudes sont loin d’être levées. Il y a peu François Fillon était donné grand favori. Le Penelope gate le fait vaciller. Il recule dans l’opinion des Français et sa tentative menée tambour battant de rassembler son clan samedi à la Villette n’a pas eu autant d’effets qu’escomptés même si son clan est apparu rassemblé. En ce 30 janvier les enquêteurs de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) entendent le candidat et son épouse séparément dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte mercredi dernier par le parquet national financier pour « détournement de fonds publics, abus de biens sociaux et recel de ces délits ». François Fillon a dit qu’il se retirerait s’il était mis en examen ce qui n’est pas encore le cas et le sondage Kantar le donne encore gagnant au second tour face à Marine Le Pen, pour l’heure bien silencieuse.
Pas de boulevard devant Benoît Hamon
Victorieux à la primaire, haut dans les sondages, Benoît Hamon est loin d’avoir un boulevard devant lui. Le Premier ministre, Bernard Cazeneuve qui l’a reçu ce lundi après-midi lui a martelé que « la gauche ne réussira pas sans assumer le bilan du quinquennat de François Hollande dont nous avons tous les raisons d’être fiers des progrès qu’il aura grandement contribué à rendre possible ». Or le frondeur Hamon n’a cessé de pilonner la politique du gouvernement ces deux dernières années. Certes Il a assuré ce même jour qu’il « maintiendrait le cap fixé pendant la primaire , l’horizon que j’ai dessiné, évidemment que je m’enrichirai des uns et des autres. Je ne rentre pas dans cette campagne présidentielle avec une contribution qui serait étanche à toute forme de contribution d’autres responsables politiques; je l’ai dit, je ne me pose pas comme un homme providentiel qui détiendrait la vérité ».
Mais sur qui va-t-il s’appuyer au parti socialiste qui est désormais divisé entre progressistes et conservateurs? Le mauvais scénario qui verrait des fuites en masse chez Macron est très tendance étant donné la fracture profonde qui s’est fait jour entre les deux finalistes de la primaire. Est-il si certain? Après la participation significative à la primaire, un peu plus de deux millions, l’espoir de gagner n’est pas éteint chez les socialistes . Auront-ils un sursaut et Hamon dont on a pu mesurer l’habileté à naviguer entre les courants saura-t-il le galvaniser ?
Macron va devenir une cible
Pour l’heure tout semble réussir au candidat d’ « en Marche ». Samedi prochain il tiendra un grand meeting à Lyon. La « Macron mania » risque d’y être à son comble. Mais après, tout de suite après, les choses sérieuses vont commencer. L’ancien ministre de l’économie, jusqu’ici protégé, va devenir une cible. Il sera exposé et son programme chiffré décortiqué. Franchira-t-il favorablement l’obstacle ? Aucune surprise n’est à exclure.
F.C.