Alors que l’Assemblée nationale examine le projet de loi de moralisation de la vie publique cinq groupes, de gauche et de droite, ont fait part de leur volonté de faire sauter en partie le « verrou de Bercy », une anomalie française injuste et inefficace et, pour ce faire de rétablir sur ce sujet la version sénatoriale du projet de loi.
Le « verrou de Bercy » consiste en la possibilité offerte aux fraudeurs fiscaux d’échapper à la justice, si le ministère des Finances le décide. Par exemple, s’il y a des révélations dans la presse, le parquet ne peut pas engager des poursuites pénales pour fraude fiscale. C’est Bercy qui décide, le ministre des Finances en particulier, mais pas seul, avec une Commission des infractions fiscales, la CIF. Celle-ci est composée de huit magistrats qui examinent chaque cas envoyés par Bercy. Or, l’usage veut qu’elle suive les recommandations du ministère. De plus comme le ministre, elle n’a pas à motiver ses avis : qu’elle dise oui ou non à des poursuites, elle n’a aucune justification à apporter.
Il y a eu des tentatives de suppression de ce verrou, notamment après l’affaire Cahuzac en 2013. Mais Bercy tient à ce monopole qui est en fait un levier, un moyen de pression qui lui permet de menacer les fraudeurs et de les obliger à payer.
Plusieurs députés de la France Insoumise, un élu communiste, un élu socialiste, des Constructifs ont appelé dans une conférence de presse « à une brèche dans ce dispositif controversé ». Le groupe LR, majoritairement favorable sur le fond n’a pas souhaité participer à cette conférence de presse mais doit défendre un amendement à l’objectif similaire.. Bien qu’alliés à la majorité les députés Modem ont indiqué dès lundi vouloir également la levée de ce « verrou ».
« Non seulement les plus gros délinquants passent à travers la justice en négociant avec le fisc le montant de leur redressement, mais cela entraîne un manque à gagner pour l’Etat », a souligné l’Insoumis Éric Coquerel. « Il ne peut y avoir deux justices selon que vous êtes puissant ou misérable » a renchéri le communiste Fabien Roussel, dénonçant des « cadeaux aux multinationales comme Google avec lequel le ministre du budget Gérald Darmanin compte négocier leur redressement ».
Pour le Constructif Charles de Courson (UDI) qui bataille en ce sens de longue date « Il faut en finir avec une anomalie française remontant à l’Ancien Régime qui préfère le rendement fiscal des gros contribuables au détriment de l’égalité devant la justice ». La balle est dans le camp des LREM où une minorité est tentée de voter avec l’opposition alors que le gouvernement fait touut pour maintenir le statu quo.
F.C.