David Guerrier, trompettiste étincelant et poignant virtuose

Effervescence vendredi 17 novembre en la salle Pierre-Aimé Touchard où l’Orchestre symphonique d’Orléans, placé sous la direction de Marius Sieghorst, se livre aux dernières répétitions de son concert “Scènes Russes” lors duquel la Danse Polovtsienne n°17 du Prince Igor de Borodine, ainsi que la renversante Symphonie n°4 de Tchaïkovski sont au programme des deux concerts qui seront donné samedi et dimanche.

David Guerrier et l’Orchestre d’Orléans.

Reste que le plus beau moment, l’aiguille d’or a cueillir au cœur de ce programme, est, sans nul doute , le Concerto pour orchestre en la bémol majeur de Aratunian, une œuvre flamboyante, émouvante, d’une pudeur technicolor faisant appel à une poignante virtuosité, à un éclat scintillant où le soliste se fond au cœur des timbres de l’orchestre en une lave d’âme en fusion, cet airain de l’élan sans cesse suspendu.

A quelques heures de la première

Vendredi 17 novembre, peu après sa première répétition avec l’orchestre donnée devant quelque quatre cent scolaires, peu avant de donner une classe de maître dans la classe du conservatoire du corniste Gildas Harnois, peu avant, encore, de participer au concert pour Crescendo, association regroupant les entreprises mécènes de l’Orchestre Symphonique d’Orléans, David Guerrier trouve chaleureusement le temps de converser avec Mag’centre.

Celui qui s’était produit très jeune à l’invitation de Didier Bidaux au Festival de Sully-sur-Loire, et qui avait interprété à Orléans en 2014 avec l’Orchestre à cordes d’Orléans et le pianiste Christopher Guzman, lauréat d’Orléans Concours International, le Concerto pour piano et trompette de Chostakovitch, parle avec amour, même s’il écoute en boucle depuis son adolescence la Symphonie de Tchaïkovski, de ce concerto d’Aratunian qu’il a immensément interprété et qu’il a eu la chance de travailler à l’âge de douze ans, à Lyon, lors d’une classe de maître, avec le trompettiste du Bolchoï, Timofei Dorkchitzere, interprète de référence de cette œuvre du compositeur arménien. À Orléans, la somptueuse cadence emplie de brio et de silence en coda du concerto est, du reste, celle que le trompettiste interprète ainsi en hommage et en “souvenir émouvant” au maître d’antan.

Que dire de ce concerto ? “L’Orchestre y tient un rôle très fort et le dialogue du soliste avec lui est passionné. En vérité, l’orchestre me porte, je joue avec chacun. Tout se déroule un peu comme dans l’échange qu’il peut y avoir entre le pianiste et l’orchestre dans un concerto de Rachmaninov”. Quant à la direction de Marius Stieghorst ? La réponse est concise, avec sourire au coin des lèvres et braise rieuse dans la prunelle soulignant la reconnaissance évidente : “Il dirige et inspire”.

“L’envie a été plus forte que la raison”

Pour ce concerto, David Guerrier joue sur une trompette autrichienne dont la sonorité lui semble davantage convenir à l’esthétique de l’œuvre que celle d’une trompette française. Ici, il nous confie avoir davantage voulu privilégier “quelque chose de moins brillant au profit d’un son plus chaleureux que perçant”.

David Guerrier , on le sait, est trompettiste mais aussi corniste. Il joue aussi du violon du tuba du trombone, du serpent à clés et pratique aussi le chant lyrique. Pourquoi tout cela ? “À un certain moment, l’envie est plus forte que la raison”, répond-il sincèrement. “Chaque instrument a son terrain de jeu, son lyrisme et sa virtuosité” poursuit -il.

En vérité, David Guerrier, d’une grande et simple humilité, interprète adorant par la pédagogie le partage de la musique savante pour une culture musicale populaire pétrie de naturel, ne cesse d’avoir envie de “découvrir des mondes musicaux”, de la petite note merveilleusement embarquée à celles en proie au grand chavirement maîtrisé de l’ultime vaisseau de l’opéra.

Amoureux de la musique de chambre, de la musique symphonique, ce trompettiste, ne serait-il pas tenté par la direction d’orchestre ? Histoire de continuer d’ouvrir son répertoire et de partager sa soif d’états d’âme musicaux ? Réponse : “Je pense que j’aimerais cela infiniment. Mais pour l’instant je joue de la trompette et du cor. L’essentiel est que tout cela reste beau”.

Quoi qu’il en soit et cela étant, vendredi soir, à l’issue de la répétition, tous les musiciens de l’orchestre d’Orléans ont fait vibrer leurs applaudissements à l’adresse d’un artiste, l’un des leurs et des plus grands, à l’issue de l’échange et du partage.

Jean-Dominique Burtin.

 Une magnifique comme affolante progressionDavid Guerrier commence ses études musicales en 1990 au Conservatoire à rayonnement intercommunal du Tricastin d’abord au piano, puis à sept ans, il commence la trompette dans la classe de Serge Vivarès. Il rencontre Pierre Dutot à Grasse en 1994 lors d’un stage et rejoint sa classe au conservatoire national supérieur musique et danse de Lyon en 1997 après avoir obtenu une dérogation spéciale vu son jeune âge (13 ans). Il s’y perfectionne jusqu’en 2000, apprenant également la trompette baroque avec Jean-François Madeuf, développant déjà son goût pour jouer les œuvres étudiées sur les instruments d’origine de la composition.

À onze ans, il participe à l’École des fans consacrée à Maurice André et remporte cinq ans plus tard le 1er Grand Prix de la Ville de Paris du Concours de trompette du célèbre concertiste. En 2004, il est désigné Soliste instrumental de l’année aux Victoires de la musique classique en tant que trompettiste. Il obtient le même prix en 2007 en interprétant le deuxième mouvement du Concerto de Henri Tomasi avec l’Orchestre national de France.

Il commence le cor en 2002 et devient très rapidement cor solo de l’Orchestre national de France. Il étudie le cor au conservatoire de Lyon jusqu’en juin 2006, se présente au poste de professeur de cor dans le même établissement et est titularisé dès septembre suivant. Mais la direction du conservatoire de Lyon ne voulant pas qu’il soit à la fois élève et professeur, il doit démissionner du rang d’élève pour pouvoir enseigner. Il est membre de la Chambre philharmonique (E. Krivine) et a été également cor solo de l’Orchestre national de France (K. Masur) de 2004 à 2009 puis à l’Orchestre philharmonique du Luxembourg (E. Krivine) de 2009 à 2010.

Il occupe aujourd’hui le poste de trompette solo dans cette même formation. Il joue également depuis peu le tuba, le trombone, le violon et l’ophicléide. Il attache une importance toute particulière à interpréter les œuvres du répertoire sur les instruments joués à l’époque où elles ont été créées. Il a fondé il y a quelques années l’ensemble Turbulences (cuivres et percussions), ensemble à géométrie variable, qui fait redécouvrir le répertoire original en l’interprétant sur instruments d’époque.

 Sa discographie comprend notamment le Septuor de Saint-Saëns avec les frères Capuçon et Frank Braley ; le 4e concerto pour cor de W.A. Mozart et le Concerto pour trompette de Leopold Mozart avec l’Ensemble orchestral de Paris (John Nelson) ; le Konzertstück pour 4 cors et orchestre de Schumann avec La Chambre Philharmonique (Emmanuel Krivine), les autres cornistes sont Antoine Dreyfuss, Emmanuel Padieu et Bernard Schirrer, tous 4 sur cors viennois ; et le dernier enregistrement en date comporte 2 titres sur le second album du Quatuor Anemos (trombones) – Anemos & Co – qui sont le Carnaval de Venise de J-B Arban et Teutatès, Fantaisie mystique d’A. Corbin, avec l’ensemble Turbulences (D. Guerrier, cornet à pistons ; A. Ganaye, ophicléide ; Chloé Ghisalberti, piano).
Où, quand, comment ?Concerts samedi 18 novembre à 20 h 30, dimanche 19 novembre à 16 heures, Théâtre d’Orléans. Tarifs: 28,25,24,22,13 €. Réservation le samedi de 13 heures à 19 heures au 02.38.62.75.30. Informations: www.orchestre-orleans.com

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