Le Baccalauréat nouveau est arrivé

On pensera ce que l’on voudra de M. Blanquer, mais il fallait une certaine dose de courage pour décider de se colleter avec la question de la forme et du contenu du bac, voire avec celle de sa finalité. Elle est récurrente depuis… 1960, année où un ministre nommé Bouloche avait eu la riche idée de faire passer le bac en février, avec rattrapage si besoin en juin (je le sais, je le passais) et a fait l’objet de moult réformes entre-temps.Gérard Hocmard

Par Gérard Hocmard

Il en fallait encore plus pour affronter les lobbies pédagogistes, les fronts communs de chercheurs en chambre qui n’ont jamais voulu reconnaître le moindre échec de leurs propositions ni admettre que leurs innovations aboutissaient trop souvent à compliquer l’apprentissage au lieu de le simplifier et contribuaient par dégât collatéral à un affaiblissement des fondamentaux, pour le plus grand bénéfice des officines de soutien et de remédiation scolaire.

Vouloir recentrer les épreuves du bac sur des disciplines fondamentales au lieu de multiplier les filières, chose qui a en plus un coût assez exorbitant, paraît une excellente idée, de même que l’introduction d’un grand oral au cours duquel le candidat sur la sellette aura vingt minutes pour convaincre un auditoire pluridisciplinaire. Ceci devrait permettre d’obtenir à terme, si c’est bien mené, une plus grande aisance des candidats à l’expression en public, en même temps que l’habitude de développer une argumentation ou de savoir répondre à des objections. Si l’on avait l’esprit mal tourné, on dirait que l’on réinvente la rhétorique, qui naguère encore avait mauvaise presse, mais on ne l’a pas et on se réjouit.

Inversement, on peut craindre deux choses, qui sont intimement liées. La première est que cette épreuve se galvaude en « concours de beauté » au lieu de garder son objectif —une interrogation en profondeur, qui pousse le candidat dans les retranchements de ses connaissances et de sa capacité à argumenter—, si les examinateurs, dans un souci d’indulgence ou par confort intellectuel, ne jouent pas le jeu et si, en amont, il y a eu un bachotage qui aboutisse à ce que les étudiants fournissent des réponses pré-mâchées à des questions convenues. Il n’en tiendra évidemment qu’aux enseignants de ne pas s’embarquer dans cette voie.

Un autre point de cette réforme qui mérite que l’on s’interroge et peut réellement susciter des inquiétudes est l’introduction du contrôle continu pour une part de la note finale. Une chose est qu’un jury tienne —au cas par cas— le plus grand compte des livrets scolaires, des notes et appréciations portées en cours d’année. Une toute autre chose est que ces notes pèsent pour 10% sur le résultat final quand on sait la pression croissante que le regard des élèves et la vigilance de leurs parents exercent sur la notation et le jugement des enseignants. On ne se rend probablement pas compte en haut lieu, ou bien on ne le veut pas, que ceci peut signifier de nos jours, dans certains établissements « difficiles », une menace d’agression physique ou de déprédation, genre pneus crevés ou pare-brise éclaté. Quelle sera alors la valeur de l’évaluation ?

Peut-on aussi oser espérer que les rectorats entérinent dorénavant les résultats, quels qu’ils soient, des jurys plutôt que d’exercer les pressions bien connues des enseignants pour que les statistiques soient homogènes, conformes aux pourcentages prévus et n’entachent pas l’image de la région lors de la publication ? Doublée d’une pratique vertueuse, la réforme redonnerait enfin toute sa valeur au diplôme.

Nul doute qu’il y aura sans doute quelques toilettages au fil de la mise en pratique, mais ce retour aux grands équilibres des disciplines et ce souci de choix cohérents de la part des candidats ne peut qu’être salué.

Commentaires

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  1. je ne regrette qu’une chose dans cette réforme c’est que la philosophie tient encore une place exorbitante, car elle n’a pas démontré, loin de là, sa saine influence sur sa capacité de s’opposer à l’influence des medias, publicité TV en tête, ni à contrebalancer les effets de communication des gouvernements

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