Ce dimanche 29 avril avait lieu la soirée d’ouverture des fêtes johanniques, avec la cérémonie de la remise de l’épée et l’entrée à cheval dans la ville porte de Bourgogne. Entre l’émotion palpable lors de la remise de l’épée, la fierté de Mathilde, première Jeanne d’Arc métisse et l’annonce de l’invité du 8 mai ; cette soirée d’ouverture fut bien remplie.
(c) Marie-Line Bonneau
La presse, régionale, nationale, et même internationale (avec une chaîne de TV russe) était au premier rang dimanche soir pour photographier la nouvelle Jeanne et ne pas louper une miette de la cérémonie d’ouverture. Organisée à la Collégiale Saint-Pierre-Le-Puellier, la remise de l’épée est la première cérémonie officielle des fêtes, cérémonie qui sert à faire le lien entre l’ancienne et la nouvelle Jeanne et à l’introniser dans ce rôle si particulier que sera le sien durant plus d’une semaine.
Cette année, il n’y a pas que Mai 68 que l’on célèbre à Orléans, mais aussi les cinquante ans de cette cérémonie, qui fut instaurée pour la première fois en 1968. Cinquante ans, cinquante Jeanne, dont une quarantaine était présente ce soir à la Collégiale. Bienveillantes, elles entouraient Mathilde, toutes vêtues d’une cape rose et l’on sentait leur fierté d’avoir incarné un jour la Pucelle d’Orléans. Annick Dupont, première incarnation de Jeanne d’Arc en 1945, était elle aussi de la partie, souriante et nostalgique.
La foule était nombreuse et la Collégiale, vite bondée. Si les personnalités habituelles étaient là (le maire, le préfet, les élus et parlementaires), les familles et amis étaient aussi en nombres et les spectateurs lambdas ont dû jouer des coudes pour se trouver une place.
Une Jeanne d’Arc Colonelle
La cérémonie a duré une heure, durant laquelle de nombreux discours ont été prononcés avant que l’épée ne quitte Priscille (Jeanne d’Arc 2017) pour rejoindre Mathilde.
Première à prendre la parole, la présidente d’Orléans Jeanne d’Arc, Mme Baranger a mis l’accent dans son discours sur la pureté de Jeanne, Pucelle aujourd’hui tournée en ridicule. « Dans une société de la jouissance, peut-on encore réussir dans la vie en étant pure ? » a-t-elle demandé, devant une Mathilde concentrée.
Le colonel Cédric Colardelle a, lui, vanté la modernité de Jeanne, en avance sur son temps en matière de stratégie militaire. Il en a profité pour dire avec humour qu’aujourd’hui, Jeanne d’Arc aurait sans doute été faite colonelle.
C’est ensuite le maire d’Orléans, Olivier Carré, qui s’est exprimé avec beaucoup d’émotion. Il a rendu hommage tout d’abord à Arnaud Beltrame, qui comme Jeanne d’Arc, a fait don de sa vie pour en sauver d’autres. Il a continué, la voix chancelante, en évoquant à demi-mot les insultes racistes auxquelles Mathilde Edey Gamassou, première Jeanne métisse, a dû faire face. « Du courage, tu en as, a-t-il déclaré, devant une Mathilde souriante. Tu es la preuve que les flèches acérées de la bêtise glissent sur l’armure de ta foi et du juste ». Reprenant ensuite lui aussi du courage, Olivier Carré a annoncé dans son discours le nom tant attendu de l’invité du 8 mai, qui sera cette année le Premier ministre, M. Édouard Philippe.
Touche pas à ma Jeanne
Enfin, dernier discours de la soirée, Mgr Blaquart à lui aussi tenu à soutenir Mathilde contre la bêtise humaine, rappelant que la vraie Jeanne unissait et que personne ne pouvait la récupérer politiquement. Ponctué d’un slogan humoristique, « Touche pas à ma Jeanne », ce discours a ensuite laissé place à la fameuse remise de l’épée.
Entourée de ses deux pages, Mathilde a reçu des mains de Priscille l’épée de Jeanne et a promis d’en être la digne gardienne pour l’année à venir. La cérémonie s’est close sous les applaudissements.
« C’était encore plus beau que ce que j’imaginais, glisse Mathilde, avant d’enfiler son armure. Cette cérémonie était très émouvante, avec toutes les anciennes Jeanne présentes, elle s’inscrit vraiment dans une lignée ». La jeune fille ne souhaite pas s’attarder sur les polémiques et se dit sereine pour les jours à venir, voulant profiter des fêtes. Elle retient de Jeanne d’Arc avant tout « son don de soi, comme le Christ ». Et la voilà qui file, pressée de mettre son armure (10 kilos tout de même) et de monter à cheval.
Nous la retrouvons porte de Bourgogne, accompagnée de son escorte, devant une haie de flambeaux. La foule présente n’est pas nombreuse, la faute à une pluie incessante, mais les soutiens de cette nouvelle Jeanne sont bien présents, criant des bravos mouillés. Le maire lui remet les clés de la ville, ainsi qu’un bouquet de fleurs.
Les trompettes se mettent à jouer et déjà il est temps de repartir, direction le Campo-Santo, pour un spectacle retraçant la vie de la Pucelle. La troupe passe devant la cathédrale illuminée et Mathilde, toujours souriante, salue de la main les spectateurs.
La soirée s’est terminée vers 23h, dans la joie et toujours sous la pluie. Rendez-vous désormais mardi 1er mai, à 10h, pour la chevauchée qui partira de la place du Martroi.
Valentine Martin