Les Noirs n’existent pas : Tania de Montaigne donne l’alerte

Romancière, journaliste, auteur en 2015 de « Noire » qui reçut cette année-là le prix Simone Veil Tania de Montaigne creuse son sujet et vient  de publier « Les Noirs n’existent pas ».La  date  retenue  pour la sortie du livre n’a pas été choisie au hasard. Ce 8 mai était la journée nationale de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions. L’auteure ne consacre pas son essai à ce sujet proprement dit mais à ses conséquences au long cours souvent subliminales qui demeurent bien  ancrées dans nos sociétés actuelles.

« Le  racisme est dans nos pensées les plus spontanées, dans nos dire et dans les réflexes de nos entreprises y compris culturelles », démontre-elle en un peu moins d’une centaine de pages denses et intenses.

Enfant, Tania de Montaigne était une petit fille à la peau noire comme d’autres l’avaient blanche jusqu’au jour où à Draveil, au début des années 80, – elle a 13 ans- elle demande à un « coiffeur normal pas pour noires » de lui faire un  brushing. Réponse : « Ah non, on ne coiffe pas ça ! » Ce refus la catapultait dans le groupe des Noires. Elle en possédait les caractéristiques du moins celles que tout un chacun par habitude culturelle attribue à ce groupe, comme il en accorde d’autres aux Blancs, aux Jaunes, aux Magrebins. Aux Indiens. « Les Noirs courent vite, les Noirs rient fort, les Noirs dansent bien… Ça colle.

Et, que nous ayons déjà vu des noirs nuls en sport, des noirs qui ne rient pas ou dansent très mal, n’annule pas l’association, au contraire. Ils deviennent l’exception qui confirme la règle » écrit l’auteure.

C’est plus fort que nous, écrit-elle, sans que nous le voulions,  sans que nous y  prêtions garde, nous établissons des catégories. L’écrivaine, riche de l’expérience que lui  donne sa quarantaine d’années et de la curiosité souterraine qu’a  développée et popularisée la psychologie contemporaine invite son lecteur  à s’interroger  « sur les mécanismes qui provoquent le développement des stéréotypes concernant les Noirs, les Jaunes, les Arabes , les Juifs, les Blancs, bref de n’importe quel être humain ».  Elle n’accuse pas, elle ne donne pas de leçon. Rien de brutal, rien de définitif. Elle appelle à une prise de conscience et pour mieux le souligner elle dégaine le N majuscule symbole « d’une existence majuscule dont la réalité nous échappe ».

Lucide elle conclue, « Rien ne peut évoluer sans nous au gré du vent. Tant que les préjugés restent tapis et ne montent pas jusqu’à la conscience, ils ne peuvent être détricotés ». Des mots qui donnent l’alerte.

Françoise Cariès

« L’assignation Les Noirs n’existent pas »
Tania de Montaigne, Grasset, 94 pages 13 euros

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