Jeudi 24 mai, le théâtre d’Orléans accueillait l’artiste Phia Ménard pour un spectacle peu commun. Les Os noirs aborde la thématique de la mort, et plus particulièrement de la mort que l’on se donne à soi-même. Soyons honnête, parler suicide pendant une heure sur scène n’est pas banal et MagCentre a voulu en faire l’expérience. Retour sur une soirée forte en symbole.
Phia Ménard n’est pas une artiste comme les autres. Cette circassienne a débuté avec l’art du jonglage puis s’est formée à la danse contemporaine et au mime. Elle créé la compagnie Non nova () en 1998 et devient créatrice ; elle improvise, imagine et met elle-même en scène ses spectacles. En 2008, elle annonce sa volonté de changer d’identité et de sexe. Son travail prend alors un tournant plus personnel, et va se diviser en différents cycles. Les Os noirs (http://www.magcentre.fr/evenement/les-os-noirs-phia-menard/) est la troisième pièce de son cycle des pièces du vent. Phia Ménard y aborde le thème de la mort et du suicide, tout du moins la vision qu’elle en a.
Des tableaux où la matière est reine
Il s’agit en effet ici de visuel car il n’y a pas de trame narrative dans cette pièce, tout se joue dans la mise en scène. Découpée en plusieurs parties, la pièce est une succession de tableaux ayant pour fil rouge la mort, moment de basculement savamment préparé. L’autre fil rouge, c’est cette femme toujours sur scène, la marionnettiste Chloée Sanchez, qui semble être une poupée désarticulée aux mains des éléments extérieurs. La mer, les bois, la croûte terrestre ou encore la société, voilà la marionnettiste devenue à son tour marionnette, malmenée par ce qui l’entoure. Elle parle peu, crie beaucoup et gémit tout autant.
Ce n’est pas un spectacle facile à regarder, avec ses couleurs sombres (un panel de noir et gris) et ses tableaux faisant penser à des cauchemars sans fin. Les Os noirs n’est pas le divertissement qui vous changera les idées ou vous rendra plus léger. C’est une interrogation face à la fin de notre vie, la façon dont nous la voyons, avec tout l’imaginaire collectif, et dont nous la pensons.
Pour cela, Phia Ménard utilise et joue avec les matières, des bâches qui s’envolent, des papiers kraft qui se gonflent. Conformément au cycle, le vent rend la matière vivante et visible. La créatrice convoque chez le spectateur plusieurs de ses sens : l’ouïe, la vue, mais également le toucher, opéré par la comédienne. C’est une expérience qui se vit plus qu’elle ne se raconte et qui se voit plus qu’elle ne s’écrit.
Une expérience déroutante
Après le spectacle, on reste un moment sonné, un peu perplexe. Tout chez Phia Ménard est symbolique, et il faudrait analyser plus en profondeur la pièce pour comprendre les messages cachés. Consciente de son imagination débordante, la créatrice s’interroge beaucoup sur la réception de ses œuvres, mais fait confiance à l’imagination des spectateurs pour les décrypter.
Au final, l’expérience des Os noirs s’est révélée bien plus déroutante que prévue ! Mais également plus profonde et intéressante. En somme, une performance qui remue et ne laisse pas indifférent.
Valentine Martin
http://www.scenenationaledorleans.fr/