Le désaccord enfle entre les instituteurs orléanais et le maire, Olivier Carré pour fixer une date de retour partiel à l’école des élèves du primaire dans le respect du protocole sanitaire émis par le ministère de l’Education Nationale. Ce document de 54 pages énumèrent de façon rigoureuse toutes les mesures à mettre en œuvre pour éviter la contagion dans les écoles. La deuxième phrase de ce texte précise explicitement: “La mise en œuvre des prescriptions nécessite une collaboration très étroite entre les services de l’éducation nationale et les collectivités territoriales”. Visiblement cette concertation n’a pas eu lieu entre le personnel enseignant et le maire d’Orléans, par ailleurs accusé à mots couverts d’avoir fait pression sur l’administration de l’Education Nationale pour maintenir cette date du 12 mai, au motif qu’il serait anxiogène pour les élèves et leurs familles de différer la date annoncée.
Ouverture ou pas mardi 12 mai ? les directeurs d’école d’Orléans répondront en fonction des conditions sanitaires constatées ce jour-là.
Interview de Geoffrey Capliez
Secrétaire général du syndicat national des écoles (SNE)
MC Pourquoi voulez-vous reporter ce retour à l’école au jeudi 12 mai ?
GC Les conditions de l’ouverture ne sont pas réunies, la mairie a alimenté les écoles d’Orléans en papier, gel hydroalcoolique et thermomètres mais rien n’a été vu ni pour la distanciation, ni pour le balisage, ni pour la gestion des sanitaires ni pour la désinfection régulière des locaux ni pour l’organisation des classes avec la distance d’un mètre etc… Donc, il nous parait difficile de tout faire pour les 65 écoles en une journée sans un nombre d’agents municipaux très important et dans ces conditions, le respect du protocole sanitaire nous parait très compromis.
MC Ce n’est pourtant qu’un retour partiel des élèves ?
GC Il y a des écoles qui annoncent la rentrée pour 6 ou 7 groupes avec deux sanitaires et pour chaque passage au sanitaire il faut désinfecter toutes les surfaces de contact , il faut aussi que la distanciation aux abords des écoles soit respectée avec des familles qui vont arriver sans savoir où s’orienter, il faudra donc les diriger tout en respectant là aussi le protocole, et de la même façon, pour les enfants qui arriveront dans la cour, il faudra bien les diriger, ils ne devront pas se ranger comme d’habitude parce que ce ne sera pas forcément leur classe qui aura été choisie .
MC Qu’en est-il du protocole sanitaire que vous avez reçu ?
GC On a reçu un protocole sanitaire qui a été officialisé le mardi 5 mai de 54 pages et en moins d’une semaine les collèges doivent se l’approprier et s’auto-former avec une vidéo pour tous les gestes d’un protocole sanitaire très strict et exigeant pour chaque geste du quotidien, il faut complètement déconstruire nos pratiques professionnelles .
MC Pourquoi deux jours de plus ?
GC Deux jours de plus aurait permis un échange avec la mairie et de valider si ce retour à l’école était réaliste en fonction du nombre de groupes à accueillir dans chaque école, de vérifier par exemple si la ville est capable de mettre à disposition des agents à plein temps car il semble qu’à 14 h les agents de nettoyage s’en vont ce qui veut dire que l’après midi, s’il y a plusieurs rotations de groupes, il n’y aura pas de désinfection donc on ne respectera pas le protocole. Il n’y a à ce jour aucun balisage aux abords des écoles d’Orléans qui permette de gérer le regroupement des familles en respectant la distanciation. Mes collègues directeurs qui sont en charge des écoles prendront la décision s’il ne peuvent pas appliquer le protocole, de ne pas ouvrir, ils ne mettront pas en danger les élèves et le personnel.
MC Ne craignez-vous pas que cette polémique inquiète les parents comme le dit le maire d’Orléans?
GC Olivier Carré est dans le politique, alors que notre ministre a dit qu’il fallait ouvrir mais pas à n’importe quel prix , ouvrir dans de bonnes conditions, en petits groupes et si on en est pas capables, il faut prendre le temps. Le temps d’échange indispensable n’a pas eu lieu avec la mairie d’Orléans, il n’y pas eu de collaboration, le projet d’accueil en lien avec le protocole sanitaire doit être établi en collaboration et une fois que le projet d’accueil est produit et rédigé, il doit être proposé aux familles pour les informer dans le cadre d’un conseil d’école extraordinaire où sont présents les élus, le directeur, les enseignants, et les parents : tout cela n’a pas été fait . Les parents des écoles d’Orléans ont reçu simplement un courrier expliquant très grossièrement comment cette rentrée allait se dérouler. C’est ce dialogue au sein de la communauté éducative qui doit être rassurant.
Les instituteurs sont responsables, nous ne sommes pas dans le refus d’ouvrir les écoles, c’est urgent pour les enfants, mais nous ouvrirons si et seulement si, les conditions sont respectées dans le cadre d’un dialogue et d’une collaboration prescrite dans le premier point du protocole sanitaire. Il faudrait que le maire nous explique en quoi ouvrir jeudi est un problème compte tenu de toutes les difficultés soulevées.
Propos recueillis par Gérard Poitou