Hot Milk, c’est un voyage au cœur du sud de l’Espagne. On suit Rose, une mère tyrannique alitée depuis plus de vingt ans. Elle se déplace en fauteuil roulant et profite de sa fille, Sofia, pour l’aider au quotidien. Après avoir essayé de consulter nombre de médecins et de soignants, celle-ci décide d’hypothéquer sa maison pour pouvoir s’offrir le médecin de la dernière chance.
Sofia et sa mère, Rose, mangent. La bonne ambiance n’est clairement pas au rendez-vous. Copyright Metropolitan FilmExport
Par Jeanne Beaudoin.
C’est ainsi que, pour 25 000 euros, elles partent toutes deux de Londres pour Almeria, une station balnéaire au sud de l’Espagne, afin de rencontrer le Dr Gomez. Ce voyage leur permet un nouveau départ. Sofia (Emma Mackey) rédige, depuis bien trop longtemps selon sa mère interprétée par Fiona Shaw, une thèse en anthropologie. Elle a dû mettre ses études de côté pour l’aider au quotidien. Sa mère ne cesse de la rabaisser, de l’humilier, tout en se servant d’elle pour assouvir chacun de ses caprices. Le Dr Gomez (Vincent Perez) cherche ainsi à faire remonter à la surface les non-dits enfouis en Rose depuis bien trop longtemps.
L’éblouissement visuel cède la place à une tension suffocante
C’est entre la couleur cyan du ciel et celle turquoise de la mer que le décor prend place. Les paysages sont sublimes, tout comme les prises de vue. Chaque scène devient un véritable tableau. Un parallèle se crée. Entre la beauté des paysages et la douceur de l’histoire d’amour qui semble se dessiner peu à peu entre Sofia et la magnétique et mystérieuse vagabonde Ingrid (Vicky Krieps), le cadre pourrait être idyllique. Pourtant, tout devient oppressant. Les vociférations de Rose, un chien qui aboie toutes les heures de la journée parce qu’attaché sur le toit d’une maison, la chaleur écrasante, la jalousie de Sofia face à la personnalité égocentrique d’Ingrid ou encore les piqûres de méduses. Un territoire hostile dans lequel nos deux personnages peinent à se complaire. Le ton monte, le rythme aussi. Cependant, le synopsis se perd peu à peu dans l’esthétique.
Sofia sous le charme d’Ingrid – Copyright Metropolitan FilmExport
Une pression qui s’éternise
Hot Milk, c’est à l’origine un roman de Deborah Levy. Celui-ci, publié en 2016, a depuis été largement diffusé avec un accueil très positif. Son adaptation cinématographique par Rebecca Lenkiewicz, qui réalise ici son premier long métrage, garde un « female gaze » tout à fait sublimant. Ce film est écrit et réalisé par des femmes, et ça se sent. Si la réalisatrice s’efforce à façonner des personnages énigmatiques, l’écriture nécessaire à leur développement narratif se fait moins ressentir. Les personnages sont d’une antipathie rare, bien qu’il soit paradoxalement difficile de s’identifier à eux. Les scènes se multiplient sans donner lieu à une suite systématiquement logique, pouvant parfois créer des longueurs dans l’intrigue. Le scénario tourne autour du secret que garde Sofia, au plus profond d’elle-même. Un secret qui, seulement une fois révélé, pourrait permettre un retour à la vie normale. En attendant, l’atmosphère est sous pression. Mais la pression s’éternise et finit par s’épuiser.
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