La décision du conseil municipal de Neuville-aux-Bois de nommer un square pour enfants du nom de l’ancien maire de la commune, Kléber Malécot, a pour le moins créé un malaise, voire choqué certains habitants. Condamné en 1997 pour l’affaire dite du « corbeau », l’élu qui occupa le fauteuil de maire durant 47 ans, s’était illustré en proférant des menaces de mort par coups de fil anonyme auprès de quelques familles qui avaient eu l’outrecuidance de s’opposer à l’un de ses projets industriels.
Témoin de ce malaise communal, nous avons reçu cette lettre ouverte de Michel Fesneau, ancien conseiller municipal, que nous publions ici intégralement.
Lettre ouverte au Conseil municipal de Neuville-aux-Bois
Pour beaucoup, « L’important, pour un square c’est qu’il existe et que les enfants puissent venir y jouer, il n’y a pas besoin de lui donner un nom ». Voilà qui relève du bon sens.
Mais ça ne s’est pas passé ainsi à Neuville aux Bois. En effet, pour la municipalité, il fallait aussi une inauguration en grande pompe, voilà une bonne idée. Et bien sûr il fallait donner un nom, à ce square d’agrément. Pas besoin de chercher bien loin, il suffit de regarder alentour et découvrir qu’habitait là un certain… . Voilà la deuxième bonne idée.
Personnellement, j’ignore qui a eu cette belle idée mais en conseil municipal, ce fut l’unanimité. Pourtant, certains élus trouvaient mesquin ce choix d’un terrain de jeux pour bambins, vu l’importance du personnage. Ils auraient préféré quelque endroit plus prestigieux, au centre du village. Il faut dire qu’il y eut un précédent en 2012 avec la rue du général Leclerc.
Parmi nos élus municipaux, il y a ceux qui ont appris le passé de Neuville-aux-Bois par bribes, sous forme d’historiettes ou d’anecdotes (piscine, cavalcade, salles de sport) et ceux qui ont vécu cette histoire locale et dont les souvenirs sont embellis au fil des années comme un album de famille aux tons sépia.
Mais il y a aussi ceux qui ont vécu autre chose. Tout un chacun a entendu parler de l’histoire du corbeau de Neuville-aux-Bois. Cette histoire ancienne se passait sous le règne de Kléber Malécot (dire règne c’est plus rapide que d’énumérer tous ses mandats successifs et cumulés). Il faisait alors la gloire de Neuville-aux-Bois, son nom et sa photo apparaissant régulièrement dans le journal local.
On peut ne pas connaître tous les aspects de ces années pourtant pas si lointaines, mais en connaître un minimum semble nécessaire avant d’honorer un nom et cela demande une recherche, un travail de mémoire à propos de cet homme aux diverses condamnations dont celle pour appels malveillants, menaces de mort du type « on va mettre le feu à ta maison », menaces faites à une famille avec enfants en bas-âge.
Mettre à l’honneur ce personnage, c’est pour les victimes raviver leurs douleurs. Mettre à l’honneur cet homme, devrait être pour vous, élus municipaux, l’occasion de découvrir les diverses faces du personnage et ses dérives, ces faces cachées que notre maire actuel feint d’ignorer, préférant honorer les réalisations en béton. .
Avez-vous imaginé, ne serait-ce qu’un instant, le traumatisme pour un enfant de savoir ses parents menacés de mort, pour une mère de savoir son mari et ses enfants menacés de mort, pour un mari de savoir sa famille menacée et aussi ses voisins, ses proches et un cercle d’amis ?
J’aurais préféré ne pas avoir à dénoncer une deuxième fois le comportement de cet homme. Dois-je craindre que des élus de Neuville-aux-Bois soient, un jour, à nouveau capables d’un tel comportement, encouragés par votre démarche d’aujourd’hui ?
Rendre justice aux victimes est un devoir, car « la politique ne se conçoit pas sans éthique ».
Un ancien élu municipal Michel Fesneau