L’Aisne, un département plein de ressources, à découvrir #1

L’Aisne est un département plein de ressources, à découvrir pendant les vacances. De Saint-Quentin à Laon en passant par le Chemin des dames et Château-Thierry.

Par Marie Lincourt

Saint-Quentin et son style Art déco : un patrimoine architectural unique.

Située dans l’Aisne, en région Hauts-de-France, Saint-Quentin est aujourd’hui considéré comme l’un des hauts lieux de l’architecture Art déco en France. Si cette ville est si richement dotée de bâtiments de ce style, c’est en grande partie à cause  de la Première Guerre mondiale.

Une ville détruite, une ville à réinventer. 1918 – Saint-Quentin est en grande partie détruite. La reconstruction devient alors un vaste chantier national. Plutôt que de restaurer à l’identique, les architectes et urbanistes vont faire de cette épreuve une opportunité : bâtir une ville moderne, au goût du jour, selon les codes esthétiques et fonctionnels de l’époque. Et c’est là que l’Art déco entre en scène.

L’Art déco : un style moderne et raffiné – Né dans les années 1910 et popularisé après l’Exposition internationale des Arts décoratifs de 1925, le style Art déco incarne une « modernité élégante » comme on disait à l’époque. Il se caractérise par des formes géométriques, des matériaux nobles, une ornementation stylisée, souvent florale.

Commencez donc votre visite de la ville par le Buffet de la gare, dont les murs recouverts de mosaïques, le comptoir en béton armé, le sol étoilé et les vitraux valent le coup d’œil.

Puis prenez le temps d’aller flâner dans la ville et levez donc le nez pour voir les nombreux bâtiments publics et maisons privées qui sont inspirés de ce courant : Le Palais de Fervaques (ancien Palais de Justice), avec ses magnifiques verrières et mosaïques  qui mêlent Art nouveau et Art déco.

La Poste Centrale, (Place de l’Hôtel de Ville), un des chefs-d’œuvre de cet art,  ou encore La Salle du Conseil municipal qui jouit de vitraux, de boiseries, et de plafonds magnifiquement travaillés.

Enfin, sans vous tordre le cou, levez la tête pour regarder  les maisons privées aux bow-windows décorés de frises,  et leurs balcons en fer forgé aux motifs de fleurs ou de soleil.

Saint-Quentin entre tradition et modernité demeure l’un des plus beaux témoignages du style Art déco en France.

Guise et le Familistère : une utopie grandeur nature à voir d’urgence

Bienvenue chez Godin, le philanthrope qui rêvait d’un monde meilleur ! Fondateur d’une manufacture florissante de poêles en fonte, Godin investit toute sa fortune dans un projet hors norme dès 1859, en créant à Guise un véritable “Palais Social” pour ses ouvriers : trois grands « pavillons » abritaient des centaines de familles dans des appartements lumineux et salubres, reliés par de vastes galeries vitrées. Une école, un théâtre, des bains, une buanderie collective et des jardins ainsi qu’une  coopérative à prix coûtant venaient compléter cet écosystème unique. Les familles vivaient dans des appartements spacieux, dotés de l’eau courante et baignés de lumière, un luxe rare pour les ouvriers du XIXe siècle. Les enfants étaient scolarisés gratuitement dès le plus jeune âge, filles et garçons confondus, dans une école modèle prônant l’instruction pour tous. Le tout avec une vision égalitaire étonnamment moderne, y compris pour les femmes qui pouvaient travailler et participer à certaines instances de décision dans la gestion du palais social. Enfin un homme éclairé !

On reste bluffés par la visite du Familistère, qui accueille aujourd’hui des événements culturels, mais qui reste néanmoins un lieu de vie avec des appartements encore habités.

Depuis le début des années 2000, le Familistère de Guise connaît une renaissance grâce au programme de réhabilitation « Utopia ». Ce projet ambitieux, piloté par le Syndicat mixte du Familistère Godin, vise à restaurer et valoriser ce site patrimonial unique.

Un hôtel de 90 chambres devrait bientôt prendre place dans l’aile gauche du bâtiment.

Le Chemin des Dames et la Caverne du Dragon : mémoire vivante d’un front meurtri

À quelques dizaines de kilomètres de Guise, le paysage paisible du Chemin des Dames dissimule l’une des pages les plus tragiques de la Première Guerre mondiale. Cette crête calcaire, entre l’Aisne et l’Ailette, fut le théâtre d’une offensive meurtrière en 1917, où des milliers de soldats français périrent pour quelques mètres de terrain. C’est ici qu’eut lieu la mutinerie de Nivelle, et que tant de jeunes vies furent brisées dans la boue et le feu.

Au cœur de ce front, une ancienne carrière de pierre, la Caverne du Dragon.

Ne vous imaginez pas un trou dans lequel une grosse bête avec des écailles crache le feu, mais imaginez plutôt le feu craché par les mitrailleuses des soldats postés aux sept entrées, retranchés au fond de cette grotte, occupée tour à tour par les Allemands et les Français, où infirmerie,  postes de combat,  chapelle, dortoirs, avaient pris place.

Ce lieu souterrain, glacial et oppressant, est le témoin de la vie abominable des soldats et conserve encore les stigmates des combats.

Il abrite aujourd’hui un mémorial-musée où la mémoire des combattants de toutes nationalités est honorée à travers des expositions, des témoignages et une scénographie immersive.

Le Chemin des Dames, lui,  n’est pas seulement un champ de bataille figé dans l’histoire. On y trouve encore des obus que les cultivateurs déterrent en labourant les champs et les trous de ces obus présents partout sont les seuls indices des villages entièrement rasés. 

 A suivre