Avec Des îles de Loire, Nicolas Jolivot nous emmène explorer le fleuve royal en kayak. De l’amont à l’estuaire, ce carnet de voyage, publié aux éditions Elytis, dessine le portrait sensible d’un paysage mouvant, entre aquarelles, observations naturalistes et méditation poétique.
Amis lectrices et lecteurs,
Je vous écris depuis les bords de Loire. Il est tôt, l’air est encore frais, une brume légère flotte au-dessus de l’eau : ça fait du bien après la vague de chaleur de début juillet. Le fleuve glisse lentement, couleur d’étain sous le ciel. Un héron s’éloigne, des foulques s’ébrouent : il n’y a guère que le vol soudain d’un oiseau pour troubler le silence, mais aussi le bruit léger, régulier, du clapotis de l’eau sous les rames. Et peut-être le souffle du vent dans les saules, si on y prête attention. Je lis un livre qui me donne envie de vous écrire.
Une ambiance méditative
Nicolas Jolivot est carnettiste et promeneur attentif. Il a descendu le fleuve, île après île, carnet en main, regard ouvert. Il a dessiné ce qui s’offrait à sa vue – des bergeronnettes, une aigrette, des feuillages, des silhouettes d’arbres. Rien de démonstratif, juste des observations précises, sensibles, un peu inquiètes parfois ; dessinées avec la « patte » caractéristique de l’auteur : des paysages à l’aquarelle qui semblent saisis entre deux averses de lumière.
Chaque page est une escale : une île, une lumière, un détail (l’ombre d’un peuplier, la trace d’un oiseau, un galet chaud sous les pieds). Il note les noms, souvent oubliés, parfois poétiques (île Gaultier, île aux Hoplias, île de Trèves), dessine les berges, les herbes folles, la faune qui y niche. On sent la vase, le sable sous les pieds, la chaleur, la fraîcheur de l’eau autour des chevilles. Il y a même ce passage où il barbote sous le vieux pont de Lavoûte, tandis que de jeunes gens plongent en un rite immuable, vieux comme le temps.
Ce livre est tout simplement magnifique : grand format carré, couverture au toucher doux, illustrations délicates. C’est un livre qui fait respirer, un beau livre d’été. On tourne les pages comme on avance, en se laissant porter par le courant, sans hâte.
Un fleuve majestueux, mais fragile
Mais ce beau livre n’est pas qu’un carnet de paysages, il constate aussi ce qui change. Le castor est certes revenu, mais le fleuve est aussi encombré par la jussie et le xénope lisse (un amphibien venu d’Afrique australe). Les plantes d’aquarium prolifèrent, les sternes désertent. En une génération, la Loire a vu arriver des plantes venues de loin, des espèces qui bousculent l’équilibre ancien. Le fleuve semble immuable, et pourtant, le monde entier s’y reflète, avec ses bouleversements et ses dérives. Nicolas Jolivot ne se dresse pas en donneur de leçon : il observe, il note et, sans insister, nous rappelle ce que nous avons devant nous, à portée de main : une beauté fragile, mouvante.
Je pense que vous aimerez ce livre. Il donne envie de partir, d’écouter, de ralentir. Peut-être même de s’embarquer à notre tour sur un kayak, afin de voir la Loire autrement, depuis ses îles qui ponctuent son cours. Si vous le trouvez en librairie, ouvrez-le et laissez-vous embarquer. Sinon, commandez-le, il vaut vraiment le coup !
À bientôt,
Izabel Tognarelli
PS : Des îles de Loire est paru en octobre 2024 aux Éditions Elytis (39 €)