Une enquête avait été ouverte début juin pour la destruction d’espèces protégées. Ce mercredi 9 juillet, plusieurs personnes, dont le milliardaire Olivier Bouygues, ont été placées en garde à vue.
La Sologne est le terrain de chasse privilégié de riches propriétaires. Photo Magcentre
Nouveau rebondissement sur les dérives de la chasse en Sologne. Ce mercredi 9 juillet, le milliardaire et homme d’affaires Olivier Bouygues a été placé en garde à vue, dans le cadre d’un soupçon de massacre d’espèces protégées sur son vaste domaine de chasse à Fontenaille, près de La Ferté-Saint-Aubin dans le Loiret. Selon la procureure de la République d’Orléans, Emmanuelle Bochenek-Puren – qui s’est exprimée auprès de France 3 – quatre autres personnes ont été interpellées dans le cadre de cette affaire, qui met une fois encore en lumière les pratiques opaques d’une élite propriétaire sur l’un des derniers grands espaces naturels de France.
À l’origine de cette procédure, une perquisition menée début juin par l’Office français de la biodiversité (OFB) et la gendarmerie d’Orléans. Les agents y découvrent les cadavres de cormorans, de buses et d’aigrettes, toutes espèces strictement protégées par la loi. Selon les enquêteurs, ces oiseaux auraient été abattus car jugés « nuisibles » à la gestion du domaine. Ils perturberaient les populations de gibier, essentiellement des faisans et des perdrix, élevés et relâchés pour la chasse. Le parquet évoque alors une « destruction systématique depuis plusieurs années », ce qui laisse entrevoir une pratique bien ancrée et organisée, dans un but cynégétique assumé. Pire encore, un enclos abritant un nombre anormalement élevé de sangliers avait été découvert, laissant soupçonner un élevage clandestin, là encore destiné à alimenter des chasses privées.
Une Sologne réservée aux ultra-riches
Ce placement en garde à vue survient alors que la Sologne est au cœur d’un débat plus large. Cet espace forestier, historiquement marqué par une tradition de chasse, est devenu en quelques décennies le terrain de jeu privilégié d’ultra-riches s’accaparant des milliers d’hectares transformés en territoires de chasse hermétiques. Des domaines qui incarnent aujourd’hui un séparatisme territorial discret mais bien réel, où la nature est gérée comme un bien de luxe. Cette tendance empêche la faune sauvage de circuler librement, et contribue à l’appauvrissement de la biodiversité en favorisant une forme de chasse déconnectée des équilibres naturels. Plusieurs enquêtes et livres parus ces dernières années – notamment l’ouvrage de Jean-Baptiste Forray – ont dénoncé ces pratiques, qui transforment peu à peu la Sologne en un giron de domaines privés réservés aux ultra-riches.
La garde à vue d’Olivier Bouygues pourrait marquer une étape judiciaire importante, mais envoie surtout un signal fort aux « seigneurs fortunés » qui pensent pouvoir s’affranchir des règles qui encadrent la protection de la biodiversité dans la forêt solognote.
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