Il faut souvent être personnellement concerné pour comprendre un problème, et bien le décrire. Dans « Regarde-moi, j’existe », Marie Lincourt nous partage sa connaissance intime du monde du handicap pour mieux le mettre en lumière, et nous y sensibiliser.
Dans son ouvrage, Marie Lincourt livre un récit poignant d’acceptation, de lutte et de renaissance. ©JLB
Par Jean-Luc Bouland.
« Mais enfin, comment puis-je donner de l’espoir à d’autres alors que mon moral est au plus bas ? Réconforter des handicapés, quand je pense à mettre fin à mes jours ? (p 37) ». La phrase est terrible, l’interrogation poignante, et le ton très juste, peut-être trop. Mais le sujet le mérite et l’histoire semble vraie, trop vraie pour être négligée, voire ignorée.
À 23 ans, la vie sourit à Léa qui semble tout posséder : « une belle carrière, un grand amour, une passion pour la musique. Jusqu’au jour où tout bascule !
Percutée par une voiture, elle se retrouve clouée dans un fauteuil, son corps trahi, son monde en ruines. Désespérée, Léa s’enfonce. » Un drame, dont elle arrivera à s’en sortir, au prix d’un important travail sur elle-même, au contact des autres, plus handicapés qu’elle. Dans son dernier ouvrage publié aux éditions Le livre Actualités, intitulé « Regarde-moi, j’existe », Marie Lincourt* n’a pas utilisé son style le plus déjanté, que l’on a connu dans d’autres ouvrages, mais trempé tout simplement sa plus belle plume dans une encre aussi sympathique que pertinente, pour traiter d’un sujet lourd, qu’elle a découvert dans son univers familial, qui l’a touchée personnellement.
« Il y a 12 millions d’handicapés en France en 2025 » nous assène son éditeur. Et tout ouvrage publié contribuant à les mettre plus en lumière, pour mieux les comprendre, est des plus recommandables. Ainsi, aidée par sa famille, Léa, alors en fauteuil roulant, mais autonome, ira jouer sa musique pour les autres, dans une Maison d’Accueil Spécialisée, « un lieu de douleurs muettes et de regards fuyants », où elle percevra d’autres détresses, bien plus profondes. « À travers ses chansons, elle entre en lien avec des êtres oubliés, apprivoise leurs silences et découvre une nouvelle famille ». Une nouvelle famille qui fait presque office de miroir vers ses propres douleurs et appréhensions, et qui lui permettra de trouver une autre raison de vivre, et même l’amour, après une résilience nécessaire.
Marie Lincourt veut ici livrer « le récit bouleversant d’un retour à la vie et d’un combat pour la dignité. Une ode à l’altérité, à la résilience, et à cette lumière que l’on trouve parfois au cœur de la nuit. ». Sans conteste, dans un style simple, proche du lecteur et de la vie de tous les jours, sans fioriture mais avec une émotion aussi flagrante que la connaissance de son sujet, elle nous entraîne aisément tout au long de ces pages, comme si Léa était proche de nous, et comme si certains des pensionnaires charmés par sa voix pouvaient être de notre famille. « De quoi demain sera-t-il fait ? Je l’ai vécu à plusieurs reprises, ce lendemain incertain (…) Les souvenirs défilent et m’étouffent. (p148) ». Léa s’interroge, et trouvera la réponse. Une réponse qu’elle veut partager avec nous, dans l’espoir que nous saurons l’appréhender, et la faire circuler…
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