Un théâtre en pleine nature, un public enthousiaste au rendez-vous pour Gioacchino Rossini, deux mimes de la Cie du Divan, de la musique, c’était en Loir-et-Cher, quelque part en pleine Sologne, par une température douce.
Par Bernard Thinat.
S’il vous prenait l’envie de randonner à pied ou à vélo dans le sud du Loir-et-Cher, peut-être découvririez-vous, dans un hameau, quelques fermes aux alentours, un théâtre le long d’une petite route, le théâtre du Grand Orme, dans le hameau de Favras, ancienne commune de Feings, aujourd’hui fusionnée avec ses congénères pour former la commune nouvelle du Controis-en-Sologne.

Le Théâtre du Grand Orme
À l’origine une grange transformée au début des années 2000 en un théâtre par la « Compagnie du Hasard » chère à Nicolas Peskine (1), décédé en 2001, et dont la ville de Blois se souvient avec la salle de spectacles qui porte son nom, dans le quartier des Provinces. La Compagnie ayant cessé ses activités en décembre 2024, le site a été repris par l’association « Accords Centre Val de Loire » qui en a fait ses bureaux, un lieu de services et de ressources au profit des publics loir-et-chériens. Soutenue par le Département 41, l’association enrichit ses propositions et projette de nombreux évènements dans les domaines de la Danse, du Théâtre et de la Musique.
C’est dans ce cadre que « Accords CVL » a organisé « les soirées d’été », lors de deux week-ends, l’un à la mi-juillet, l’autre le second week-end d’août, au théâtre du Grand Orme, programmation culturelle de très haut niveau à destination du public local et au-delà, avec des tarifs particulièrement bas afin de ne pas rejeter celles et ceux aux revenus modestes.

Photo Théâtre du Grand Orme
Cie du Divan
En août, trois soirées et trois spectacles ! D’abord, place au mime, avec la « Compagnie du Divan » basée à Blois : deux femmes s’installent chacune dans son recoin, l’une à la mine peu engageante, rejetant sa voisine, installant un mur entre elle et « l’Autre », tel est le titre du spectacle, et l’autre donc, souriante, chaleureuse, cherchant à engager le lien entre voisines. Mais rien n’y fait ! Spectacle pour enfants certes, plein d’humour, mais aussi pour adultes qui y verront deux conceptions de la société, l’une repliée sur elle-même, craignant les différences de religion, de couleur de peau, de revenus financiers, l’autre accueillante, ouverte, enthousiaste, chaleureuse.
Il Signor Bruschino
Puis ce fut le sommet de la soirée avec l’opéra de Rossini, « Il Signor Bruschino », créé en 1813, proposé par « l’ensemble orchestral Musiques pour faire plaisir », constitué de musiciens et chanteurs lyriques issus des plus grands conservatoires européens. Du haut de gamme assurément. Une heure quinze d’enchantement avec la musique du compositeur italien accompagnée par les sept chanteurs et chanteuses, dont on retiendra notamment l’air de « Sofia » interprété par la soprano Lisa Bensimhon, instant de pure beauté.

Photo Théâtre du Grand Orme
La soirée se terminait en musique avec l’orchestre « Yves-Marie Bellot Trio » ces vendredi et dimanche, et « Pop Replica » ce samedi.
Un opéra de Rossini dans le Loir-et-Cher profond, en plein air, gradins totalement remplis par un public conquis, pour 15 € la place, qui l’eût cru ? Et pourtant, quand on met la barre très haut dans une programmation culturelle, ça fonctionne, le public est au rendez-vous, enthousiaste.
Le Théâtre du Grand Orme
Hommage à Nicolas Peskine
« L’homme aux formidables épaules, caché derrière sa barbe et la fumée de ses cigares, croyait intensément aux pouvoirs du théâtre, de la poésie incarnée, des étincelles et des rencontres qu’elle suscite. Perfectionniste et travailleur acharné, Nicolas Peskine mobilisait tout son art et toute son énergie, les ressources de son immense culture et son incroyable capacité d’entraînement pour chercher à provoquer la grâce du partage. Les soirs où la magie opérait, cet homme bourru et pudique s’illuminait. Il avait gagné. Et il gagnait souvent. »
Jacques Bugier, Le Monde (16 août 2001)
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