Le mouvement sportif régional sonne l’alarme !

Le Comité régional olympique et sportif (CROS) a alerté le 11 septembre dernier le grand public et les élus des conséquences délétères d’une nouvelle baisse en 2026 des crédits d’État affectés au sport français. À ce jour, si les arbitrages du gouvernement Bayrou devaient être confirmés, la diminution sur deux ans de l’enveloppe dédiée au sport dépasserait 30 %.

Un an après les Jeux de Paris 2024, le mouvement sportif régional est amer face aux baisses de l’enveloppe dédiée au sport. Photo Magcentre


Par Pierre Dussin.


« Les représentants de nos principales ligues sportives régionales qui totalisent trois quarts de nos 650 000 licenciés assistent aujourd’hui à notre conférence de presse en présentiel ou en distanciel », a tenu à préciser d’emblée Véronique Bury, co-présidente du CROS. C’est dire que l’heure est grave. La parenthèse des Jeux olympiques 2024, dont le 1ᵉʳ anniversaire vient d’être fêté, est désormais bien refermée. Et l’héritage des JO a comme un goût amer au regard des promesses d’Emmanuel Macron « de faire du pays une nation sportive » alors que dès cette année une disette budgétaire était imposée à tout l’écosystème sportif. « Mon prédécesseur avait alerté sur la nécessité d’anticiper l’impact des JO », poursuit Véronique Bury. « Or, si nous avons bien eu une augmentation notable (1) du nombre de licences délivrées dès la rentrée 2024, nous nous sommes vite heurtés au manque d’équipements et d’éducateurs. »

Un Pass’Sport redimensionné

Pour 2025, l’amputation des crédits alloués au sport initialement fixée à 273 millions d’euros avait été ramenée à 80 millions grâce à un amendement du sénateur LR Michel Savin en janvier dernier. Mais en cours d’année, un coup de rabot supplémentaire de 300 millions a été validé et s’est traduit entre autres par la restriction du périmètre du Pass’Sport. Ce dispositif créé en 2021 octroyait, sous conditions de ressources, une aide de 50 euros aux parents lorsqu’ils inscrivaient un de leurs enfants (de 6 à 17 ans) à un club sportif. Or depuis début septembre, cette aide, portée à 70 euros, ne concerne plus que les jeunes de 14 à 17 ans. « Cette mesure est totalement injuste », déclare Abdoul Abdallah, co-président du CROS. « Cela va affecter les familles modestes qui préféreront inscrire les garçons pour les canaliser. Les filles seront les grandes perdantes. »

D’autant que certaines fédérations comme le cyclisme ou la natation sont là pour enseigner des savoirs fondamentaux aux 6-13 ans : savoir nager et savoir faire du vélo en toute sécurité. « Quand on voit la hausse du nombre de noyades constatée cet été, ce type de restriction fait froid dans le dos », s’exclame une responsable de club.

Moins de 6-13 ans dans les clubs ?

Résultat de ce nouveau Pass’Sport édulcoré : le nombre d’inscriptions enregistrées lors de cette rentrée chez les 6-13 ans est d’ores et déjà en baisse de deux tiers. C’est ce qui ressort des premières remontées transmises par des clubs de handball, de judo, de basket… au CROS Centre-Val de Loire.

Véronique BURY
Véronique Bury s’inquiète particulièrement pour l’accès aux associations sportives pour les moins de 13 ans. Photo Magcentre


La hausse des prix des licences est une autre conséquence prévisible de la baisse des subventions accordées aux fédérations et aux clubs. « Cette année, la fédération de cyclisme va être contrainte d’augmenter le coût des licences », confirme Nathalie Lombard, agent de développement au Comité départemental olympique sportif (CDOS) du Loiret. « Certaines fédérations avaient déjà acté dès la rentrée 2024 cette augmentation pour tenir compte notamment de l’inflation », note Véronique Bury. « Mais il n’est pas concevable de penser que des jeunes ne puissent pas être accueillis dans nos clubs à cause de freins financiers. Si l’on en arrive là, c’est vraiment problématique ! »

Quid des collectivités locales ?

Les dépenses des collectivités territoriales pour favoriser la pratique sportive de leurs administrés – 12 milliards en 2022 (2) – sont deux fois plus importantes que celles portées par l’État dans ce domaine. « Les élus locaux vont devoir faire des choix et je crains que le sport devienne une variable d’ajustement », s’inquiète Nicolas Gougeon, trésorier de la Ligue régionale de handball. Même son de cloche de la part d’Arnaud Besse, directeur du CDOS du Loir-et-Cher, qui se dit « préoccupé par la baisse des dotations étatiques aux collectivités ». « Je crains des suppressions d’emplois et les premiers impactés, ce seront les têtes de réseaux, les ligues, les comités départementaux. Si l’on veut faire revenir le sport français 30 ans en arrière, lorsqu’il ne reposait quasiment que sur des bénévoles, il faut le dire. »

Le sport en fête, vraiment ?

Le 14 septembre 2024, en marge de la célébration des athlètes sur les Champs-Élysées, le président de la République annonçait la création d’une Fête nationale du Sport qui se tiendra désormais chaque année le 14 septembre. « Nous devons nous retrouver autour d’une fête du sport, populaire, qui se déploie dans la rue, les écoles, les complexes sportifs dédiés », déclarait-il lyrique. Certes, les objectifs de ce rendez-vous annuel, encourager la pratique sportive, renforcer les liens sociaux autour des valeurs du sport… sont fort louables. Mais en cette rentrée 2025, beaucoup d’acteurs sportifs locaux ne partagent pas forcément la ferveur que devrait susciter un tel événement national. Près de 5 000 événements sont néanmoins programmés sur toute la France et identifiables via une carte interactive sur le site du ministère des Sports. « Je constate que le département du Cher a décidé de boycotter cette fête », indique Véronique Bury. « Cela ne sera pas notre cas et je me rendrai prochainement à Toury en Eure-et-Loir pour assister aux nombreuses démonstrations et initiations sportives proposées par des clubs locaux. »

La co-présidente du CROS rappelle toutefois qu’elle vient d’envoyer un courrier d’alerte à tous les députés / sénateurs du Centre-Val de Loire, avec copie aux principales collectivités territoriales et annonce que le CROS vient de mettre en ligne un Jeu-Plaidoyer pour « sensibiliser le grand public et les élus aux enjeux majeurs du financement du mouvement sportif français (voir encadré ci-dessous). Ces coups de rabot budgétaires sont incompréhensibles car 1 euro investi dans le sport, ce sont 13 euros économisés par la collectivité (3). En effet, ce sont des dépenses en moins dans la santé et dans la prévention de la délinquance ».

Changement de cap avec Lecornu ?

Amélie Oudéa-Castéra, tout juste élue présidente du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) il y a trois mois, assurait le 10 septembre dernier à Ouest-France vouloir se battre pour les moyens accordés au sport français. « Nous voulons que le sport soit mieux traité et mieux considéré. Nous continuerons dans les semaines à faire entendre fortement notre voix, à un moment où l’équipe gouvernementale que constituera Sébastien Lecornu aura besoin de réviser un certain nombre d’équilibres ».

(1) : + 3,8 % au niveau national ; source : les licences annuelles des fédérations sportives en 2024 – INJEP Fiches repères
(2) : Groupe BPCE – L’Observatoire sur l’économie du sport – janvier 2023
(3) : Étude de l’Observatoire des métiers du sport (janvier 2024)

Le Jeu-Plaidoyer « Le Sport joue sa survie »

Il s’agit de 10 questions mises en ligne sous forme de quiz pour sensibiliser sous une forme un peu décalée aux enjeux financiers qui pèsent sur l’écosystème sportif : www.cros-centrevaldeloire.fr/le-sport-joue-sa-survie

Exemples de questions :

  • Quelle proportion du budget global de l’État est consacrée au sport ?
  • Quels sont les bienfaits du sport sur les enfants de 6 à 13 ans ?
  • En Indre-et-Loire, les associations sportives sont portées par 15 000 bénévoles. Quelle proportion de ces associations existe uniquement grâce à l’engagement des bénévoles, sans aucun salarié ?

À la fin du quiz, les internautes sont invités à partager leurs témoignages sur les conséquences concrètes de la baisse des crédits du sport qu’ils constatent dans leur club en tant que pratiquant ou bénévole.


Plus d’infos autrement :

Pass’Sport : Châteauroux persiste et signe !

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