À Blois, la Fondation du doute met à l’honneur Benjamin Vautier, alias Ben, avec une nouvelle exposition hommage au créateur du Mur des mots en 1995. Visible jusqu’au 14 décembre, elle a pour titre À bas l’impérialisme.
Fabienne Quinet, maire adjointe à la culture à Blois, a salué Éva et François Vautier, les enfants de Ben, et celles et ceux qui ont permis l’organisation de cette exposition exceptionnelle, la première depuis le décès de l’artiste. Crédit photo J-L Vezon.
Par Jean-Luc Vezon.
L’artiste franco-suisse Ben (1935-2024) a laissé une trace artistique indélébile avec ses étonnants « tableaux-écritures », en blanc sur fond noir, à la fois drôles et philosophiques où il dénonce notamment toutes les formes d’impérialisme et prend position pour les cultures minoritaires et le tiers-monde. À Blois, Ben le Niçois est un peu chez lui avec la célèbre façade de la Fondation du doute et ses 313 citations, commande publique de Jack Lang, alors maire de la ville.
Père du centre d’art contemporain blésois, Ben était donc à l’honneur ce 3 octobre à l’occasion du vernissage de son exposition en présence de sa fille Éva, de son fils François et de son petit-fils Tom Barbagli. Adjointe à la Ville culturelle et aux relations internationales, Fabienne Quinet a salué « cet artiste d’envergure qui savait si bien poser des questions de politique et de société ». Pour Gilles Rion, directeur de la Fondation du doute, Ben était « une voix singulière, libre et engagée qui réveille nos consciences ».
Chacun a pu prendre la mesure de cet homme pour qui l’art devait interroger et désarçonner. Parfaitement scénographiées, 70 de ses œuvres sont ainsi présentées sur les murs de la salle d’exposition selon des thématiques particulières : l’impérialisme, les cultures minoritaires, le pouvoir, la guerre… Parmi elles, le célèbre Message des cultures minoritaires du tiers-monde à l’avant-garde des impérialistes cosmopolites (1992) ou Je vais tout vous dire / il faut tout dire (1996), un étonnant acrylique sur confessionnal en bois.
Éva Vautier, commissaire de l’exposition, perpétue la voix de Ben toujours « ironique, provocatrice et profondément politique ». Crédit photo J-L Vezon.
« La critique de l’impérialisme constituait pour mon père un champ artistique, politique et philosophique : l’impérialisme est une force normalisatrice qu’il fallait sonder, retourner, déconstruire pour préserver la pluralité des imaginaires. La diversité linguistique et culturelle n’était jamais à ses yeux un simple folklore ; elle était la condition d’une humanité libre, inventive et irrémédiablement différenciée », insistait ainsi sa fille Éva Vautier, galeriste à Nice et commissaire de l’exposition.
S’inscrivant dans le sillage de Marcel Duchamp, influencé par John Cage, George Maciunas, Dada et Isidore Isou, ardent défenseur de l’esprit Fluxus qu’il a rejoint en 1962, Ben qui se qualifiait « d’emmerdeur » a laissé 12 000 œuvres. À l’heure des vérités relatives, du trumpisme triomphant, de l’hyperconsommation et de l’aliénation numérique, les créations de Ben résonnent aujourd’hui avec une intensité particulière.
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Pas de doute, Ben est parti…