Les derniers coups de sécateurs ont été donnés ce vendredi 3 octobre dans les vignes de Mareau-aux-Prés au sud d’Orléans. Si les raisins sont arrivés à maturité précocement, la pluie a retardé la récolte. La vinification commence et le cru 2025 s’annonce prometteur.
Dans les vignes de Mareau-aux-Prés, petits et grands participent à la récolte du cru 2025. Photo Philippe Voisin
Par Philippe Voisin.
À l’orée de Sologne, en arrivant au croisement de deux petites routes qui ne permettent pas de croiser des véhicules sans mordre sur le talus, on retrouve une petite troupe qui va et vient entre les rangées de vignes qui hésitent entre le vert de l’été et la rouille de l’automne. En se rapprochant, on comprend que les vendangeurs ne sont pas ceux que l’on attendait. Par petits groupes, les têtes de quelques gamins dépassent à peine de la végétation. Quelques adultes à l’âge d’être retraités les accompagnent.
« – Regarde là, tu as oublié trois grappes !
– Attention, on ne dépasse pas le bâton. On reste groupés.
– Ton seau est plein, tu peux appeler la hotte de Quentin. »
Une petite écolière joyeuse confie : « C’est la première fois que je fais ça, c’est bien. Et puis ce soir, on n’aura pas de devoirs ».
Comme ses camarades, elle vient de l’école de Gutenberg à Orléans. Aujourd’hui, les petits écoliers sont sur une parcelle exploitée en cabernet franc par Quentin et Amandine, un couple de jeunes vignerons qui savent partager leur métier et leur passion pour la préservation de l’environnement. Après le pique-nique, c’est passage au pressoir et dégustation de jus de raisin. Au total, trois cents enfants ont participé aux vendanges à Mareau-aux-Prés, six écoles, une crèche et un lycée agricole.
Le fruit d’une matinée de vendanges s’amasse, promesse d’un cru généreux. Photo Philippe Voisin
L’association des Amis de la Cave de Mareau
Laurent Rabier est l’actuel président de l’association créée en 1984 qui organise ces animations pédagogiques. C’est un ancien directeur d’école en zone urbaine d’éducation prioritaire qui pratiquait les classes découvertes et emmenait ses élèves en Bourgogne. « La ville d’Orléans nous a coupé la subvention. Alors on a continué ici ! »
L’objectif de l’association est de favoriser le rapprochement ville-campagne et producteur-consommateur. Aujourd’hui, elle rassemble 80 adhérents motivés par la sauvegarde de l’activité agricole dans ce Val de Loire touché par la désertification rurale. Elle accueille tous les publics, de la crèche à la maison de retraite. L’activité ne se résume pas à la vendange des écoliers. L’association qui possède quelques parcelles permet à une cinquantaine de bénévoles de cultiver personnellement un rang de vigne, de la taille à la récolte. La découverte d’un métier peut se transformer en installation comme pour Bertrand Léau qui vient de reprendre le Domaine de la Bourdonnière, en bio.
Connaître et comprendre le métier de paysan
Agir pour la protection de la nature, c’est le deuxième objectif des amis de la cave coopérative. Actuellement, il reste sept exploitants sur l’appellation d’origine contrôlée Vins d’Orléans-Cléry. Sous l’impulsion de l’association, cinq se sont convertis en bio. « On espère bien convaincre les deux autres », s’empresse d’ajouter Laurent Rabier.
Dans quelques jours, six classes d’écoles orléanaises sont attendues pour la récolte des noisettes. Les élèves pourront ramener une partie de la récolte pour une exploration pédagogique du produit. Ça va sentir le gâteau à la noisette dans les cours d’école à la récré ! Dans la cave coopérative qu’elle a rachetée en 2019, l’association de Mareau-aux-Prés reçoit des visiteurs deux à trois jours par semaine. Elle organise des conférences sur l’histoire locale et des expositions comme dernièrement sur les girouettes avec le Liger-Club Orléanais.
Un vignoble royal
Le vignoble d’Orléans a été classé en AOC en septembre 2006. Il se concentre sur quatre communes de la rive gauche de la Loire, Saint-Hilaire-Saint-Mesmin, Mareau-aux-Prés, Cléry-Saint-André et Mézières-Lez-Cléry. L’appellation s’applique aux trois couleurs : rouge, rosé et blanc.
L’existence de ce vignoble est étroitement liée à la Loire, axe de transport majeur depuis le Moyen Âge. Les premières vendanges remontent au VIe siècle avec la fondation de l’Abbaye de Micy. Les nombreuses communautés religieuses ont mis en valeur les terres à vignes qu’elles possédaient pour en tirer des revenus substantiels. On leur doit l’introduction de cépages nobles, notamment le pinot qui a fait la réputation des vins de l’Orléanais dans l’Ancien Régime. Le vignoble s’est rapidement développé et faisait le bonheur des grandes tables européennes, jusqu’à la cour de Russie. Il s’étendait alors sur 28 000 ha, aussi vaste que le vignoble de Bourgogne.
La Révolution, le phylloxéra et l’industrialisation ont profondément transformé le paysage. La culture de la vigne devient au cours du XIXe siècle une monoculture de Beaugency à Châteauneuf-sur-Loire. Si la qualité baisse au profit de la quantité pour alimenter les grands bassins industriels, il reste cependant des crus de qualité supérieure jusque dans les années 1890 quand le vieux vignoble fut détruit par l’insecte cousin du puceron. Les terres à vignes deviennent alors des terres à arbres fruitiers. En 1960, il ne restait plus que 500 ha de raisin.
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