Un peu partout en France et notamment en région Centre-Val de Loire, les municipales dans le viseur, la droite se cherche un supplément d’âme en se radicalisant. Entre populisme ripoliné et comm’ numérique parfaitement assaisonnée à la nostalgie, certains transforment la politique locale en laboratoire d’illusions.
En pleine campagne, les illusions s’infusent tranquillement dans les esprits. ©Freepik
Par Fabrice Simoes.
Pour les élections municipales, à Bourges, un raout déjeuner-débat sur « une ville de Droite qu’est-ce que ça change ? » aura lieu dans quelques jours. Au programme, la présence de la tête de la liste RN et UDR, Ugo Iannuzzi, et de l’un de ses potentiels adjoints. En vedette, le maire de Salbris, Alexandre Avril, est annoncé. Le conseiller régional LR, avant de poursuivre sa mue vers la droite de la droite sans que les électeurs n’en soient trop offusqués, est désormais vice-président de l’Union des Droites. Élu apolitique, dans une commune qui n’a jamais connu d’autre courant de gauche que le nom, il viendra expliquer comment faire d’une commune de droite une commune à la droite de la droite. Un « comment ça marche » tel un François de Closets de la politique. Fort de sa néo-expérience en matière de gestion municipale, et de son village-laboratoire de l’enfumage doctrinaire sous couvert de renouveau, c’est une référence dans le domaine de la communication optimisée à coups de digital et d’apparitions CNews. Sous couvert d’une espèce de Great again à la sauce salbrisienne, s’est installée dans les esprits une gloire d’antan sublimée. Vous savez quoi ? Le candidat a trouvé son électorat comme Aya Nakamura a trouvé son public…
Du pipeau à la flûte traversière
Dans chaque ville de moyenne importance, en région Centre-Val de Loire ou ailleurs, la technique peut être appliquée. En ces temps où les idées émergent du maelström de la beaufitude décomplexée, ça fonctionne à tous les coups ou presque. C’est parfaitement applicable, par mimétisme, au-delà de la Sologne, terre de droite depuis des lustres, terreau fertile depuis des siècles de servitude acceptée. Dans ce nouveau paradigme, au-delà du cadre local, là où la connaissance du terrain et le clientélisme effacent tout le reste, seuls les bons communicants, ceux qui ont fait force de vente en première langue, ceux qui connaissent le manuel du petit poujadiste version IA peuvent trouver place. La dérive est nette depuis quelques années. Et les électeurs nourris à la désinformation digitale, à la déséducation, parfaitement calibrés par la destruction de la pensée critique, fournissent les fouets qui les feraient avancer plus vite. Faire croire aux moins de quarante ans que c’était mieux avant parce qu’ils ne l’ont pas vécu. Figer dans les mémoires de ceux de plus de quarante un passé positif sublimé qui n’a jamais existé. Celui de leur jeunesse, réelle, et du plein-emploi, romancé. Il suffit, pour capter les nigauds, de jouer du pipeau des réseaux sociaux comme de la flûte pour attraper les rats d’Hamelin.
Débat entertainé
Comment ne pas être un bon candidat quand une société érige les émissions de télé-réalité en nouvel art de vivre ? Ou encore comment ne pas être un bon candidat quand les débats politiques sont menés par de pseudos humoristes devant de nouveaux publics pas forcément ignares, mais souvent incultes ? Qui peut être un bon candidat quand les réseaux sociaux, font et défont, au travers de sondages faussés, le résultat d’une élection pas encore ouverte ? En politique comme ailleurs, à chaque strate son niveau d’incompétence, comme un principe de Peter perpétuellement renouvelé. En osmose avec les esprits d’un Donald Trump ou d’un Viktor Orban, ces nouveaux héros de l’Iliade, ces candidats ont fait du populisme leur cheval de Troie, leur fer de lance, leur glaive d’apparat, voire leur cape d’invincibilité.
Les fractures, la peur, les boucs émissaires et une once de désinformation : voilà les éléments majeurs de la démarche. Le summum : faire du tout-en-un. Exemple, des cris d’orfraie face aux taxes sur l’actionnariat et les dividendes, et tourner le dos, au moment du vote contre la suppression des 150 balles de prime de Noël des chômeurs en fin de droits. Les précaires n’auront pas droit au boudin blanc parce qu’il faut bien partager la dette ! Terminées les promesses ! D’ailleurs elles n’engageaient que ceux qui les écoutaient. Comme des Houdini du XXIe siècle, un peu d’anticatastase et le tour est joué. « Monsieur prend des vessies pour des lanternes », déclamait le Sâr Rabindranath Duval. Pierre Dac l’a déjà confirmé : dans ces cas-là, ça brûle !
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