Tony, Oslo et Maddy, des champions made in Montargis

Des forêts du Gâtinais jusqu’à celles du Wisconsin en passant par l’Est de l’Europe et la Scandinavie, Tony Presles a bâti sa vie autour de ses chiens, des greysters. Champion reconnu en sports canins attelés, il raconte comment – au-delà des podiums – Éloa, puis Nalya, Maddy, Oslo et à présent Wade ont changé son rapport au monde, au voyage et à lui-même.

Tony Presles aux côtés d’Oslo, son partenaire de course et compagnon de route – photo Tony Presles


Par Izabel Tognarelli.


Le portail s’ouvre, Nalya – 8 ans – vient à notre rencontre. Elle pourrait profiter de l’ouverture automatique du portail pour filer à la vitesse de l’éclair en direction des champs qui bordent la maison gâtinaise, mais non : elle nous escorte tranquillement, le pas léger, cherchant à plusieurs reprises le contact des prunelles. Au bout de l’allée, Tony nous accueille avec le reste de la meute : Oslo et Maddy, les deux champions, et Wade, six mois, un chiot encore un peu turbulent aux yeux de ses aînés. Maddy le rappelle à l’ordre d’un grognement sourd. Oslo ne fait pas dans le détail : de sa gueule, il saisit Wade par la nuque et le plaque au sol, histoire de lui rappeler comment fonctionne la hiérarchie. Et Tony d’intervenir, histoire de remettre de l’ordre : « Je ne veux pas de bagarre ! »

Le déclic qui a tout changé

En une dizaine d’années, Tony a gravi les échelons jusqu’à devenir l’un des Français les plus réguliers sur les circuits nationaux et internationaux de sports canins attelés. Il a découvert cet univers presque par hasard alors que les responsabilités familiales l’avaient obligé à arrêter le motocross. Mais le sport et l’adrénaline lui manquaient : « Un jour, j’ai vu un reportage à la télé, je me suis aperçu qu’il existait un sport où un chien tracte un vélo. À l’époque, je faisais plein d’activités avec Éloa, ma malinoise : de l’obéissance, de l’agility, du dressage, etc. » Il a contacté le Canicross du Val de Loire, à Chambon-la-Forêt (son premier club), qui organisait justement un stage avec un champion du monde le week-end suivant : « J’y suis allé et j’ai eu immédiatement le déclic ! » Le voilà happé : premières courses, premiers classements, puis vient la bascule avec Nalya, sa première greyster, des chiens spécialement taillés pour la course.

Une porte qu’il n’aurait jamais ouverte sans les chiens

« Je n’étais pas un grand voyageur », admet-il, presque étonné à l’idée du chemin parcouru. La passion des chiens et du sport, ainsi que son ambition d’atteindre les meilleurs niveaux, l’ont conduit à se tourner vers les greysters, race spécialement développée pour les sports attelés, issue d’un croisement entre greyhound, braque allemand et pointer. Ce mélange leur confère rapidité, puissance, endurance et agilité, des qualités indispensables pour le bikejöring et les compétitions de canitrottinette (scooter, en anglais) attelée. Mais dans le milieu des années 2010, cette race était encore peu répandue : « C’était difficile d’en trouver. Il fallait connaître quelqu’un – ou quelqu’un qui connaissait quelqu’un – pour espérer en adopter un. » Ainsi est-il allé chercher Nalya, en Belgique, en 2018.

Oslo, haletant mais heureux après une course intense, et Tony, submergé par l’effort et l’émotion – photo C.A.M

Quand la meute transforme le maître

Lui qui se disait peu voyageur parcourt désormais l’hémisphère nord comme d’autres traversent la rue. Pour adopter Oslo et passer au « scooter 2 chiens », Tony file jusqu’au nord de la Norvège : « Je suis allé chez l’éleveur qui avait le père d’Oslo avant d’aller chercher Oslo chez son éleveuse. En faisant étape chez des mushers, on rencontre la famille du chien, on découvre d’autres cultures, d’autres façons de faire, des langues différentes ».

Les mushers (conducteurs de chiens) forment une grande famille, éparpillée dans différents pays. La passion des chiens est leur trait d’union : « Entre mushers, on partage, on échange, on s’invite. Ça nous permet vraiment de voyager, d’être accueillis, de se faire comprendre. » Et pour cela, l’anglais reste l’espéranto naturel, qui ouvre presque toutes les portes : « À présent, je me débrouille en anglais, car – par la force des choses – on y est obligé. Je m’y suis mis pour les chiens, car je me rends compte que, dans le monde, l’anglais reste la langue principale. »

Une maison pensée comme une petite société canine

Tony doit ses résultats à la relation harmonieuse qu’il entretient avec ses chiens et au travail quotidien mené avec eux. Chacun a sa propre chambre et son matelas, une organisation qui évite les tensions et respecte les rythmes individuels. L’entraînement varie selon les saisons ; ostéopathie et kiné font partie de leur routine. La rigueur n’a rien de militaire, mais elle est constante : « Je suis le chef d’orchestre. » On comprend en filigrane que la recette réside dans une autorité calme, fondée sur des règles stables et beaucoup d’affection.

Tony et Gen Baril, unis par leur passion des chiens et des sports canins – photo Tony Presles

Oslo le météore, Wade l’apprenti

Parmi ses chiens, chacun a sa personnalité. Oslo est son météore : une machine de course née pour le sprint. « Son seul but dans la vie, c’est que je lui mette le harnais et qu’on parte courir. » Il suffit de l’observer sur la ligne de départ : tout son être est tendu vers un objectif unique : franchir la ligne d’arrivée.

Wade est son fils. Avec lui, Tony en est encore au stade de l’éducation : il n’est pas en âge de tirer un vélo. Il lui faut découvrir le monde et apprendre la sociabilité. Les séances sont courtes, suivies de récupération, et centrées sur des apprentissages simples : boire après l’effort, manger sur demande, voyager sans stress.

Son premier « cours » fut d’ailleurs un trajet de 13 heures en camping-car, dans une cage aménagée comme une petite chambre, ponctué de pauses pour se familiariser avec les bruits, les camions, les personnes inconnues… et apprendre à se retenir jusqu’à l’arrêt suivant. Plus ces habitudes sont acquises tôt, mieux elles s’installent : ainsi Tony forme-t-il des chiens équilibrés, capables aussi bien de courir que de prendre l’avion sans paniquer.

Et maintenant : vivre de sa passion

Au fil des années, cette façon de travailler avec sa meute a façonné non seulement sa pratique, mais aussi ses projets d’avenir. Tony vit déjà pleinement sa passion. Désormais, il vise l’étape suivante : en vivre. Donner des stages, organiser des séminaires, proposer des démonstrations, mais aussi poursuivre un objectif précis : « Avec ma compagne, nous nous sommes donné pour mission de développer le transport aérien des chiens. Je pense que c’est à travers des vidéos, des réels, à travers nos yeux et nos chiens qu’on pourrait améliorer le transport aérien pour eux. »

Une nouvelle aventure s’ouvre, toujours guidée par la même boussole : les chiens qui, depuis le Montargois, lui ont ouvert le monde.

Palmarès.

  • Tony est champion de France 2021 en bikejöring (avec Oslo)
  • Champion de France Scooter 2 chiens (avec Maddy et Oslo) 2022 et 2023
  • Champion de France Scooter 1 chien (avec Oslo) 2025
  • Vice-champion de France Scooter 2 chiens (avec Maddy et Oslo) 2024 et 2025.
  • Aux championnats du monde 2025, organisés dans le Wisconsin, Tony a obtenu une médaille de bronze en Scooter 1 chien avec Oslo et il est arrivé 9e en bikejöring avec Maddy.
  • Par ailleurs, Oslo est classé 1er aux chiens d’or en Scooter 1 chien (classement de la Fédération française de sports et loisirs canins).

    

Tony et Oslo, médaille de bronze aux championnats du monde (21-26 octobre 2025, Wisconsin) – photo Gen Baril

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Foppa, en lettres capitales

Commentaires

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  1. Les vidéos de bikejoring qu’on peut voir sur youtube sont impressionnantes, il m’est arrivé de croiser un tel attelage sur la levée de Loire mais on aimerait en savoir plus sur la performance de ces chiens : quel distance un chien peut-il ainsi parcourir sans altérer sa santé, quelle est la vitesse de déplacement des attelages ?

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