Olivier Marleix, député de la deuxième circonscription d’Eure-et-Loir et conseiller municipal d’Anet a mis fin à ses jours le 7 juillet 2025. Il avait 54 ans. Il était le père de deux filles, Anna et Salomé. Le 13 novembre dernier, soit quatre mois après, son éditeur Robert Laffont publiait son manuscrit validé deux jours avant son décès. « Dissolution française – La fin du macronisme » est son livre posthume. C’est aussi une énigme.
Dans ce qui s’apparente à un véritable testament politique, Olivier Marleix dévoile les arcanes de la vie parlementaire. Photo ZC
Par Philippe Voisin.
Le suicide d’un homme ou d’une femme est toujours suivi de la question lancinante « pourquoi ? ». L’insondable profondeur de l’être défie la raison et projette le commun dans ses hésitations sur le sens de la vie. Alors, quand le drame touche un homme public, le curieux espère trouver dans les derniers écrits du malheureux, quelques réponses au trouble ressenti.
Essai politique et crise française
Il faut le dire sans attendre, on a tort de chercher dans son livre les causes profondes qui ont entraîné Olivier Marleix vers la solution ultime. L’ouvrage est un essai politique, né de l’expérience d’un élu intègre et consciencieux, parisien de naissance, cantalou de cœur. Ce n’est pas un livre choc, testamentaire, qui révélerait des secrets inédits sur le déclin français, sur cette République désarticulée par un chef de l’État, au choix incompétent ou manipulé, pour nourrir quelque théorie complotiste ? Loin du discours mercantile du service marketing de l’éditeur, au fil des lignes, on entre progressivement dans la mécanique d’une institution fondamentale de la République qui fait battre le cœur de l’État de droit auquel appartient l’auteur profondément attaché à l’unité de la nation, simplement.
« L’ambition collective d’une nation plus fraternelle, c’est ce qui m’anime », écrit-il. On ne peut douter qu’il connaisse l’origine du mot « animer » : donner la vie. Une phrase qui contribue au trouble du lecteur. Olivier Marleix jette son regard froid et lucide sur la France d’aujourd’hui. C’est un livre d’actualités. Ses expressions sans concession révèlent un homme profondément désenchanté :
« Ce grand-guignol qu’est devenu la politique française. Bienvenue en absurdie. La France, le pays des Shadocks. Je ne crois plus en la mondialisation heureuse. La Commission européenne : nous sommes chez les fous. »
Un regard implacable sur la classe politique
Assis aux premières loges sur les banquettes rouges du palais Bourbon, il contemple le désastre. « Les Français ont raison d’être méfiants envers les politiques ». Gaulliste nostalgique de la politique d’avant, Olivier Marleix est obsédé par la cohésion nationale, par l’esprit de fraternité qui a fait naître tant de vocations dans les générations précédentes pour accompagner les plus démunis. Son gaullisme est social. La valeur travail est sa priorité. Le vrai peuple de France est à Anet et à Dreux. Son enracinement le conforte et lui donne la force de croire en cette droite, « seul projet pour reconstruire l’unité nationale ».
Au fil de la lecture, on découvre la vie d’un président de groupe qui s’agite au cœur du réacteur. Argumenter, défendre, proposer, s’opposer. Alliances, audaces, victoires et défaites. Le côté ombre de la vie parlementaire. Noble mayonnaise. En observateur non-calculateur, il dresse un rapport d’activités parlementaires qui sert à comprendre les engrenages subtils qui ont entraîné « sa France » vers la perte de sens politique. Il écrit comme un combattant. Il est à l’offensive contre l’ascension du Rassemblement National, décrit la bérézina de la droite à partir de 2017, sans concession pour sa famille politique. Il accuse la gauche de marché qui a détruit l’économie française depuis Mitterrand dont Emmanuel Macron est l’héritier et le continuateur.
Ah Macron ! « Sa campagne fut un chef-d’œuvre de marketing ! » Emmanuel Macron responsable de la fracturation du pays. Un mot-flèche pour chacun des différents Premiers ministres. Mais respect pour Michel Barnier qui a rédigé la préface de cet ouvrage. D’autres mots pour ses cousins politiques des Républicains. Après avoir refermé ce livre, le trouble ne s’est pas dissipé.
Pourquoi avoir tant désiré la publication de cet essai politique aussi « technique » quelques jours avant de commettre l’irréparable ? Pour laisser cette image lisse d’un homme convaincu, incarnation discrète d’une droite qui est devenue rare ? Comme le souligne Érik Orsenna, Marleix réveille la voix de la droite républicaine et humaniste contre les assauts des monarchistes, des catholiques et des populistes, têtes de gondole chez les libraires. Alors pourquoi ?
“Dissolution française – La fin du macronisme”
Editions Robert Laffont
Carrière politique
- Olivier Marleix est né le 6 février 1971 à Boulogne-Billancourt (92) et décédé le 7 juillet 2025 à Anet (28).
- Maire d’Anet de 2008 à 2017 puis conseiller municipal.
- Conseiller départemental de 2008 à 2014.
- Élu député de la deuxième circonscription d’Eure-et-Loir depuis 2012 sur le siège de Gérard Hamel. Il a été président du groupe parlementaire Les Républicains de 2022 à 2024.
- Il était le fils d’Alain Marleix, ancien secrétaire d’État et député du Cantal.
- Il a commencé sa carrière politique au cabinet de Charles Pasqua, puis de Michèle Alliot-Marie. Il est élu président de l’Union des Jeunes pour le Progrès (Gaullistes sociaux) en 1997. Un an plus tard, il devient directeur de cabinet de Martial Taugourdeau, président du Conseil général d’Eure-et-Loir.
- Il a soutenu les candidatures à l’élection présidentielle d’Édouard Balladur et de Nicolas Sarkozy et conseillé les ministres Claude Guéant et Brice Hortefeux.
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