Ce jeudi 11 décembre, le collectif Féministe 45 a organisé un rassemblement devant la mairie d’Orléans, juste avant le conseil municipal. L’objectif : dénoncer le partenariat entre le CCAS d’Orléans et Familya, une association présentée comme neutre mais dont les liens avec les milieux catholiques conservateurs suscitent de vives inquiétudes. Malgré une mobilisation bruyante, casseroles à la main, la mairie est restée inflexible.
Des pancartes « Violences sexistes = Ripostes féministes » et « Familya Antichoix » pour protester contre le partenariat entre le CCAS et Familya. Photo : Jean-Luc Bouland.
Par Charlotte Guillois.
Une enquête de Médiacités a récemment mis en lumière la proximité du réseau Familya avec des cercles catholiques conservateurs et anti-IVG. Jusqu’à peu, l’association bénéficiait encore du soutien financier du milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin, fondateur de l’Académie Saint-Louis, établissement d’élite réservé aux garçons. Ses propos sont ouvertement réactionnaires : il affirme souhaiter « plus de bébés de souche européenne » et « évangéliser la France »…
Le collectif Féministe 45 pointe la dimension profondément normative du discours de Familya, qui prône une conception traditionnelle de la famille sous couvert de « conseil conjugal », « médiation » ou « ateliers de formation relationnelle ». L’association revendique son inscription dans la « tradition sociale de l’Église », un positionnement d’autant plus sensible que certains de ses intervenants sont directement liés au diocèse d’Orléans. La prétendue neutralité affichée apparaît donc largement discutable.
Des financements et des choix politiques qui posent question
Pour Christine, militante de Féministe 45, l’enjeu est clair : « Familya est soutenue par le diocèse et défend des positions anti-avortement. Nous voulons que les femmes puissent divorcer, avorter, fuir les violences, ce que Familya ne garantit pas. » Elle rappelle aussi que l’association a obtenu 24.000 € du CCAS sans débat préalable au conseil municipal, alors que le Planning Familial, voisin des locaux de Familya, n’a reçu que 1.000 € malgré une demande de 37.000 €.
Si Stérin ne finance plus Familya, d’autres soutiens problématiques ont pris le relais, notamment la fondation Stella Domini, connue pour son engagement contre l’avortement. Face à ces révélations, plusieurs institutions ont déjà coupé les ponts : la Région Centre-Val de Loire a refusé d’aider Familya Orléans et la métropole de Lyon a mis fin à ses subventions.
Un dialogue impossible avec la mairie
Gauthier Dabout invitant à la discussion avec Familya… tout en refusant lui-même la discussion. Photo : Jean-Luc Bouland.
Lors de la manifestation, l’adjoint au maire Gauthier Dabout s’est présenté comme ouvert à la discussion, avant de rejeter un à un les arguments des manifestant⸱e⸱s. Il a défendu Familya, assurant qu’elle n’avait « aucune idéologie » et que ses bénévoles n’étaient « pas du tout anti-avortement ». Une position difficilement conciliable avec les faits présentés, et encore moins avec les liens avérés de l’association avec des structures catholiques conservatrices et anti-IVG.
Au conseil municipal, la fermeture a été tout aussi nette. Interrogé sur la compatibilité du partenariat entre une association religieusement marquée et le principe de laïcité, Serge Grouard a sèchement répliqué : « C’est vous qui êtes en décalage. C’est une association très bien. Je refuse d’en débattre. »
Une conception de la famille qui n’est pas sans conséquences
En maintenant coûte que coûte son soutien à Familya, la mairie d’Orléans prend clairement position : elle accorde sa confiance et des fonds publics à une structure dont les liens avec les milieux catholiques conservateurs, le diocèse d’Orléans et des financeurs opposés à l’avortement ne font plus aucun doute. Derrière le vernis du « soutien aux familles » se joue en réalité un choix politique lourd de conséquences : celui de légitimer une vision moraliste et rétrograde de la vie familiale, au détriment des structures laïques et féministes qui accompagnent réellement les femmes et les minorités.
Face à un tel verrouillage du débat public, la mobilisation de Féministe 45, soutenue par des organisations comme la CGT, le Planning familial et le NPA, rappelle une évidence : défendre l’égalité, la liberté de choix et la laïcité est un impératif démocratique. Et lorsque les institutions refusent d’entendre ces voix, il nous appartient de faire du bruit, casseroles en main s’il le faut, pour faire cesser de maquiller l’idéologie conservatrice en simple action « au service de la famille ».
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