Splendid’s : brûlure du monde d’aujourd’hui et fidélité à l’infini…

Au 7ème étage du Splendid’s Hôtel, sept gangsters américains sont encerclés par la police. Ils ont kidnappé puis étranglé la fille d’un millionnaire. Il n’y a pas de doute sur l’issue à venir : elle leur sera fatale. C’est le début d’une danse de mort où ils vont jouer à être ceux qu’ils n’ont jamais été. Sous le regard d’un flic fasciné qui a choisi de trahir son camp et de les rejoindre, les voyous tentent de retarder l’assaut.

C’est en ce Mercredi 14 janvier que le metteur en scène et directeur du Centre Dramatique National d’Orléans nous ouvre les portes du théâtre sur un texte de Jean Genet dont la publication en 1993, se fera posthume.«Il faut rêver longtemps pour agir avec grandeur, et le rêve se cultive dans les ténèbres. »
Jean Genet

Après de nombreuses mises en scène telles que Jan Karski et La Mouette, Arthur Nauziciel nous propose cette fois la création Splendid’s, interprétée en anglais, surtitrée en français.
C’est entre ciel et terre, plongés dans une danse mortifère dont la sensualité et l’élégance nous coupe le souffle que sept comédiens laissent leurs vies entre nos mains.
Un abandon métaphasique caractériel de la force ombilical et viscéral de l’acteur. Ici le metteur en scène nous plonge dans cet espace hors du temps, tel une poussière désorientée dans une apesanteur dès lors, inexplorée.
Un beau travail tout en maitrise et en justesse, où l’artiste sonde par rituel sa relation au cosmos et l’inscription de son être au cœur de l’univers. Là où la chorégraphie rencontre la résistance d’un corps et le traverse avec lenteur et désespoir.
Un subtil paradoxe qui pourrait nous faire penser à la danse Butô, dite aussi : « danse du corps obscur ». Une danse subversive qui se caractérise par sa lenteur, sa poésie et son minimalisme.

Une rare écoute sacrée : maintenant tout peut arriver !

Nauziciel à cette faculté de créer un environnement où la justesse erre comme un mendiant. Il nous confie alors cette rare écoute sacrée qui glisse en nous, et permet à nos sens de devenir alertes et sensibles à tout ce qui nous entoure.
Et pourtant…
Fascinante est la manière dont bougent les images sans même qu’on ne s’en aperçoive. C’est ce rêve, ce fantasme, cet endroit hors du commun et hors du temps qui fait que chaque âme présente au même endroit au même moment, sur cette scène, dans cette salle, devient alors dynamite ! Chaque âme qui marche en funambule sur la frontière fragile de ces brisures d’existences peut alors chuter… à tout moment.
Parce que maintenant tout peut arriver !
« Tous mes rêves sont sans issue, sans château fort, sans plan de ville. Un vrai remugle de membres coupés. » a écrit Antonin Artaud.
Un peu comme ces sept portes, ces sept consciences froides, ce recommencement infini qu’est le théâtre ; sans queue ni tête.
Mais c’est aussi un policier qui devient gangster, un homme qui se métamorphose en femme, un spectateur qui tousse, un rêve où nous suçons le canon d’un révolver, une actualité… un fait divers…

Une belle fidélité à l’infini

« Le théâtre est un art de l’instant fait d’éternité. »disait Joël Pommerat.
Le texte, prend alors le corps et l’espace, tel une arme à feu.
De cette manière, le metteur en scène en fait un acte sacré. Un acte instantané. Non pas une illustration de la vie mais quelque chose près de la vie, par ressemblance.
La vérité, y en a t-il une ?
La seule vérité qu’il y ait au théâtre, c’est que c’est une durée. Une durée dans un lieu, un lieu où la parole résonne, où le geste prend poids et ampleur, où tout ce qui était ordinaire s’immobilise et laisse place à l’extraordinaire. C’est un territoire en tension, rempli de questions. En suspens.
Alors paradis ou enfer ? Il semblerait que nous soyons simplement confrontés à la mélancolie fascinante de la mort et de ses travers.

Une belle brûlure du monde d’aujourd’hui, ça oui !

« Se retrouver dans un état d’extrême secousse, éclaircie d’irréalité, avec dans un coin de soi-même des morceaux du monde réel. » Antonin Artaud.
Devant tant d’horreur, la conscience, la contenance, la foi que nous connaissions, l’amour que nous connaissions, spirituel et viscéral, en est altéré.
Inévitablement… involontairement… sensiblement…la prise d’otage artistique fait fatalement écho aux derniers événements tragiques de ce mois de janvier 2015.
Mais est-il compliqué de couper « affect personnel et moral » pour entrer dans la matière que le metteur en scène veut toucher ? Est-il compliqué de faire cette expérience de l’humain ? L’humain dans l’instant ?
Quand tant d’échos tragiques, polémiques et politiques envahissent les médias ? Quel doit être le travail de l’acteur ? Posons-nous cette question.
Voilà… je m’appelle Ana Elle et je suis écrivain. Je m’appelle Ana Elle et je suis comédienne. Je m’appelle Ana Elle et je suis femme. Je suis une amie, une sœur, une fille… Je m’appelle Ana Elle et simplement… je suis humaine.
Alors je rentre chez moi, et je m’enferme, et je me mets à écrire. J’écris avec la même intensité, la même démence, le même sentiment et la même émotion qui me possède l’âme et me fait saigner les yeux. Cette même fulgurance, qui s’empare de nous, en tant que bête furieuse, en tant qu’identité, sensible, exposée et hasardeuse, quand nous sommes amoureux. Cette profusion céleste qui vient de ce gouffre abyssal qu’est notre cœur et du plus profond de notre sexe mordu de douleur.
C’est comme ça que je veux écrire. C’est comme ça que je veux vivre. Tous les jours. Avec le même déchirement qui s’impose à moi, lorsque je me rends compte que je me fais l’effet d’une triste moucheture à la surface de la terre rougeoyante… simple éclaboussure dilettante.
Tous les jours.
Tous les jours, tous les jours je veux écrire, je veux jouer, je veux contempler, et je veux baiser.
C’est ça.
C’est ça que je veux faire de ma vie.
Vivre.
Ainsi bravo à chaque artiste ayant contribué à ce projet. Vivons !

Ana Elle

Du 14 au 16 janvier 2015

CDN Orléans: http://www.cdn-orleans.com/2014-2015/

Avec : Ismaël Ibn Conner, Jared Craig, Xavier Gallais, Rudy Mungaray, Daniel Pettrow, Timothy Sekk, Neil Patrick Stewart, James Waterston, et la voix de Jeanne Moreau.
Durée : 2h

Un chant d’Amour  :

[vimeo]http://vimeo.com/31598448[/vimeo]

Retrouvez tous les articles Magcentre et autres « rififis d’écrits » signé Ana Elle sur : Cendrillon des Routes 

https://www.facebook.com/pages/Cendrillon-des-routes/559790710751141?ref=hl 

Commentaires

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  1. “Un abandon métaphasique caractériel de la force ombilical et viscéral de l’acteur.”
    “Nauziciel à cette faculté de créer un environnement où la justesse erre comme un mendiant. ”
    “Devant tant d’horreur, la conscience, la contenance, la foi que nous connaissions, l’amour que nous connaissions, spirituel et viscéral, en est altéré.”

    Ouah le beau florilaige de fotes d’ortografe, de fotes de françé et de logoraie absconse !!!

    Ah, il était beau le temps où de sévères secrétaires de rédaction relisaient et caviardaient la prose des journalistes en herbe (et des autres !)

    Enfin, merci pour la poilade !!!!

    Et relisons Boileau :
    “Ce qui se conçoit bien s’exprime clairement et les mots pour le dire arrivent aisément…”

  2. Et Stendhal répond à Boileau : “L’orthographe ne fait pas le génie”. Evidemment ! reprend Flaubert tout en souriant, c’est une idée reçue et tout comme IDÉAL : Tout à fait inutile, : ORTHOGRAPHE : Y croire comme aux mathématiques. N’est pas nécessaire quand on a du style !

    Eh oui… je crois que cela s’appelle un “sans faute”.. non pardon plutôt un punchline.

    Heureusement la vie est belle 🙂

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