“Peut-on rire de tout ? De la mort par exemple ? Mohamed El Khatib, lui, en a fait le pari en choisissant de raconter sur scène le décès de sa mère, atteinte d’un cancer du foie. Et ça marche. Entre fiction et réalité, humour et émotion, il nous entraîne dans la traversée de son deuil pour « rendre l’intime, sujet tabou et trop peu abordé, un matériau partageable ».
Au final, un instantané autobiographique – pour lequel Mohamed El Khatib s’est inspiré du cinéaste Alain Cavalier et de Sophie Calle qui filma les dernières heures de sa mère – où, seul en scène, l’auteur et metteur en scène s’appuie sur des lectures, des transcriptions d’enregistrements vidéo entre lui et sa mère, des emails, SMS, vidéos de famille… pour donner corps à une chronologie millimétrée depuis les consultations médicales, l’évolution de la maladie, jusqu’au rapatriement du corps à Tanger. À la limite d’un documentaire. Et l’on est dedans avec lui, à l’écouter nous parler de ces derniers moments ponctués de péripéties administratives, et à le suivre dans ses évocations du pays, de sa famille et de la culture marocaine. Mais pas d’apitoiement, pas de tristesse au grand jour. Non. Mais de humour : « C’est un trait caractéristique de ma famille ! Je ne souhaitais pas tomber dans le pathétique mais plutôt regarder les choses avec tendresse, prendre du recul. L’humour le permet et donne une respiration collective ». Comme l’imam qui, pendant l’inhumation, tient le Coran d’une main et fait des SMS de l’autre !
Au bout de 50 minutes d’un «one man show» tout en décontraction et pudeur, Mohamed El Khatib finit en beauté : celle dont il parle et que l’on ne voit jamais apparait dans un très beau portrait noir et blanc projeté sur un mur. Un bel hommage d’un fils, qui avoue avoir été marqué, ado, par le poids de ses origines sociales, à une mère « femme de ménage qui ne parlait pas le Français et ne savait pas lire », qui se veut un message de « fierté de son héritage et d’amour universel à toutes les mères ».
Estelle Boutheloup
Finir en Beauté est une co-production CDN Orléans/Loiret/Centre.
Lundi 9 (20h30), mardi 10 (19h30) et mercredi 11 février 20h30).
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