Je n’aurais pas eu d’opinion sur la question de la dictée quotidienne si je n’avais eu par hasard, au moment où la mesure était annoncée, à corriger ces jours-ci une série de traductions effectuées par des étudiants de l’enseignement supérieur, donc bacheliers.
par Gérard Hocmard
Ces copies m’ont, comme on dit, fait tomber de ma chaise ! Ainsi on peut être admis à faire des études supérieures en France en 2017 alors même que l’on écrit : « ll prena une bûche et la metta dans le feu » (sic) ?

Que l’on bute sur l’orthographe de rhétorique, de chrysanthème ou de métempsychose, sur le genre d’escarre (féminin) ou d’antidote (masculin) peut se comprendre, que l’on écrive : « je ne peux y croir » (sic) peut être une étourderie (soyons généreux !). On a déjà la générosité moins large en s’apercevant que les conjugaisons des verbes autres que ceux du premier groupe en –er sont très largement ignorées ou en tombant sur des phrases comme : « il l’a regarde » (sic) qu’il faut lire à deux fois pour comprendre que le personnage « la regarde ». Mais qu’il n’y ait aucun accord en genre et en nombre entre les noms, les adjectifs et les verbes est tout autre chose, car c’est affaire de logique et si ces accords ne sont pas respectés on a vite fait de ne plus rien comprendre.
Comme ont été bien inspirés ceux qui ont décrété voici quelque vingt ans qu’on ne décompterait désormais pas plus de quatre points pour l’expression dans les copies de bac ! Il fallait faire du chiffre, n’est-ce pas, amener 70, puis 80 et pourquoi pas 100% d’une classe d’âge au bac ! Quel beau gâchis ! Et l’on s’étonne des décrochages en première année du supérieur ou de notre régression dans les classements internationaux ? Car il serait vain de croire qu’il n’y a dans les constatations que l’on peut faire d’expression et d’orthographe calamiteuses que pinaillage orthographique et élitisme mal placé. Il ne s’agit encore une fois ici que des aspects logiques de l’orthographe, indépendamment de toute bizarrerie ou arbitraire de l’usage, que de précision de l’expression dans la mesure où toute insuffisance en ces domaines ne peut qu’affecter aussi, de manière indirecte, les raisonnements scientifiques.
M. Blanquer va avoir fort à faire pour redresser la barre. Souhaitons qu’il reste assez longtemps sur la dunette pour faire retrouver son erre au bateau ivre.