Partir un jour, mais revenir pour danser avec le passé

Amélie Bonnin nous livre un film chantant entre cuisine et retour vers le passé. En choisissant Juliette Armanet comme tête d’affiche, elle veut toucher un large public, et complète le casting avec d’excellents acteurs. Rempli de cette énergie joyeuse dans l’esprit des variétés télé, on passe un très bon moment.

Juliette Armanet et Bastien Bouillon. Photo Topshot Films – Les Films du Worso – Pathé Films – France 3 Cinéma



Par Bernard Cassat.


Il y a eu En fanfare d’Emmanuel Courcol qui rassemblait magnifiquement le public autour de la musique, réunissant par la même occasion deux classes sociales, deux pratiques musicales qui s’ignoraient et même se méprisaient. Partir un jour est dans cette veine. En utilisant deux thèmes hyper grand public, le karaoké dont tout le monde raffole et la cuisine qui remplit des chaînes entières de télévision. Liées entre elles par une romance, la nostalgie d’un amour de jeunesse qui n’a pas abouti.

Cécile (Juliette Armanet). Photo Topshot Films – Les Films du Worso – Pathé Films – France 3 Cinéma


Si Cécile revient dans le routier de son père alors qu’elle est chef dans une cuisine étoilée, c’est juste pour voir ses parents, surtout lui qui traverse une mauvaise passe. Il sort d’un infarctus, doit se reposer, se calmer. Vu son caractère, rien que cela l’énerve. Incapable de quitter les fourneaux, il cuisine assis sur une chaise roulante. François Rollin dans ce rôle est magnifique. On retrouve son amour et sa précision de langage, notamment quand il sort le petit carnet où il a noté les propos de sa fille à la télé. Et même lorsqu’il chante, alors que ce n’est vraiment pas un virtuose, l’émotion est là.

Juliette et sa mère (Dominique Blanc). Capture bande annonce.


Dominique Blanc, sa femme, régente la cuisine dans un tourbillon d’énergie. Ses grands yeux noirs cachent mal sa fatigue et ses exaspérations de la situation. Formidable comédienne, elle fait passer une sensibilité magnifique. Lorsqu’elle se ressource dans son camping-car qui sans doute n’a jamais bougé, elle résume toute l’histoire : elle n’a pas pu partir un jour.

Cécile, leur fille, chantée par Nougaro et jouée par Juliette Armanet, apporte au film son professionnalisme de chanteuse, mais y rajoute une présence d’actrice tout à fait honorable. Son visage un peu austère sait traduire à la fois la retenue, l’évitement comme l’adhésion. Et trouve quand il le faut une force directe et immédiate. Bastien Bouillon, son amour de jeunesse devenu garagiste mais resté très ado avec sa bande de potes, lui donne la réplique avec une belle prestance. Toutes les séquences du groupe d’ex-collégiens sont un peu lourdes quand il n’y a pas les chansons pour les soutenir. Mais leur humour potache, même s’il reste sans aucune surprise, fait consensus. Dignes représentants du feel good, de la déconne et de l’enthousiasme à tout-va des airs populaires, ils se lancent dans Alors on danse pour partager de la joie facile.

Cécile et son père (François Rollin) dans la cuisine du routier. Capture bande annonce.


Tout est cliché dans le scénario, mais passe bien. Ce qui en revanche est dommage, c’est le conformisme de la mise en scène. Tout est déjà vu. Avec en apothéose la séquence dans la patinoire, où les deux ex-amoureux qui le redeviennent sont pris dans un mouvement tournant classique du genre. On a l’impression que la réalisatrice Amélie Bonnin cherche à aligner des poncifs pour bien appartenir à un cinéma tellement consensuel qu’il ne heurte personne. On aurait quand même souhaité un peu plus de piquant visuel, comme dans la séquence du camping-car, où la mère et la fille se donnent la réplique en chanson. Peut-être d’ailleurs n’y a-t-il pas assez de chansons, car ce sont les meilleurs moments.

La grande scène de la patinoire. Capture bande annonce.


Le battage médiatique ne ment pas sur un point : le film est agréable. Mais l’outrance de louanges est à prendre avec des pincettes. Film agréable certes, mais petit film quand même, au montage qui aurait gagné à être plus nerveux. La grossesse non prévue de Cécile ne perturbe que peu le fil léger du scénario, et tout rentre dans l’ordre, les ex-amants finissent amis, Cécile retrouve son homme, repart vers sa vie de grande chef où elle ne fera certainement pas de macédoine de légumes. Car question cuisine, la lutte de classe n’est pas résolue. Le shiso sur le turbot d’un côté, les bourguignons d’un autre. Mais bon, Amélie Bonnin ne cherchait pas de troisième voie, loin s’en faut. Elle préfère rester neutre et chanter Partir un jour, comme les boys band le faisaient il y a quelques années.


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