Programmé lors du dernier Festival de Cannes dans la section « Un certain Regard », le très très long métrage « Le rire et le couteau » d’une durée de 3 h 30, du Portugais Pedro Pinho nous plonge en plein cœur de la Guinée-Bissau. Dans un récit ethnographique, au travers d’une fiction, un ingénieur portugais est chargé par une ONG de valider le tracé d’une nouvelle route dans le pays, dans un paysage rural proche des rizières.
Diára (Cleo Diára) et Sergio Coragem (Sergio) – Copyright Météore Films.
Par Bernard Thinat.
La Guinée-Bissau se situe sur la côte atlantique, au sud du Sénégal. La population est lusophone avec de multiples langues locales, le français est un peu parlé en raison de la proximité du Sénégal au nord et de la Guinée au sud, deux pays francophones. La Guinée-Bissau a accédé à l’indépendance en 1964, les coups d’État se succédant depuis 1980.
Sergio de son prénom, ingénieur environnemental, rencontre au travers de son périple, de multiples habitants, se lie avec notamment Diára, jeune femme vivant semble-t-il de vols sur les marchés, au bagou invraisemblable, entourée d’amis en tous genres. On chante, on danse, on fait l’amour.
Il rencontrera aussi un personnage qui lui tiendra un discours politique d’un très haut niveau, sur le capitalisme, et sur le déséquilibre entre Noirs et Blancs. Quant à Diára, devant le refus de Sergio d’une somme importante offerte pour bâcler son rapport, ce qui s’appelle corruption, elle mettra son ami ingénieur face aux réalités du monde : « Puis-je moi, femme noire, refuser une telle somme ? ». Scène qui pourrait devenir culte.
Gui et Diára entretiennent une relation intime – Copyright Météore Films
Au final, il se rendra dans une contrée faite de rizières où pousse le riz, interrogeant les habitants sur la question de la route, où les avis sont partagés entre autochtones. Son rapport sera rendu, sans qu’on n’en connaisse les conclusions.
Le réalisateur a procédé par chapitres non linéaires, à peine reliés les uns aux autres, par ellipses, passant de la ville à la forêt ou au désert et revenant à la ville, ces chapitres pouvant évoquer une grande violence, ou simplement un repas amical et quasi poétique quand Diára emmène Sergio au sein de sa famille dans un village.
Extraordinaires performances des actrices et acteurs, notamment Sergio Coragem et Cleo Diára née au Cap-Vert, cette dernière se révélant totalement exceptionnelle dans son rôle de femme à la marge, d’ailleurs très justement récompensée par un Prix d’Interprétation féminine à Cannes. À découvrir ce chef-d’œuvre cinématographique malgré ou grâce à la durée du film.
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