Un championnat d’Europe de tir, c’est un peu plus important, en nombre de tireurs, que les JO, mais beaucoup moins cadenassé par les services de sécurité. Visite au pays du tir décontracté.
Le drapeau français ferme le défilé des étendards des 35 nations présentes – photo PB
Par Pierre Belsoeur.
Un an après les JO, le Centre National de Tir Sportif fait de nouveau le plein. 900 tireurs de 35 pays à Châteauroux pour quinze jours, ça mérite le détour. Première surprise, aucun barrage sur la route de La Martinerie. Seule une jeune femme souriante accueille les visiteurs au poste d’entrée du CNTS. Et si elle s’enquiert de leurs qualités, c’est juste pour leur indiquer où ils peuvent garer leur véhicule. Exit le grand parking des JO d’où on gagnait en navette les tribunes du centre après avoir montré patte blanche pour la deuxième ou troisième fois. Désormais seuls les compétiteurs sont armés et déambulent avec leurs fusils déchargés et cassés avant de pulvériser les plateaux. À ce jeu de massacre, c’est d’ailleurs une Française qui a été la meilleure. Julie Anastassiou est championne d’Europe depuis samedi à Châteauroux en skeet olympique (quand on est chasseur on appelle ça ball-trap)
2 000 nuitées pendant deux semaines
Ça avait tout de même un petit air de JO lorsque l’on a attaqué la cérémonie d’ouverture, devant des tribunes du stand des finales pleines à craquer et que la ronde des drapeaux s’est mise en place face à deux anciens ministres des Sports : Amélie Oudéa-Castéra et Gil Avérous. La première avait fait une échappée de vingt-quatre heures avant la cérémonie commémorative de l’ouverture des Jeux, un an après Paris 2024, elle est désormais présidente du comité national olympique. Quant à Gil Avérous, il avait interrompu ses vacances pour revenir dire sur ses terres tout le mal qu’il pensait de la suppression par le gouvernement du Pass’Sport (lire par ailleurs). L’ancien ministre, mais aussi le maire et président de communauté d’agglomération Châteauroux Métropole, qui a accompagné le projet du CNTS tout au long de sa construction, a conscience de l’intérêt sportif, mais aussi économique de cet équipement.
Les tribunes du stand des finales archi pleines, comme un an auparavant pour les JO – photo PB
Hugues Senger, le nouveau président de la Fédération française de tir sportif, a parfaitement conscience qu’avec le souvenir des JO, la qualité du CNTS et les atouts touristiques de l’Indre, la France va devenir pour longtemps le lieu vers lequel vont converger les tireurs de toute l’Europe, voire du monde. « Nous nous inscrivons dans la durée, avec une couverture médiatique de plus en plus importante. »
Un public chouchouté
Ce championnat d’Europe des épreuves de tir extérieur (25 m, 50 m, 300 m, skeet olympique et cibles mobiles) est le deuxième grand événement cette année à Châteauroux, après les championnats de France qui avaient accueilli également près de 1 000 tireurs en février, toutes disciplines confondues. Le CNTS est l’un des seuls centres au monde où l’on peut pratiquer la totalité des disciplines du tir, de l’arbalète au tir à 600 m en passant par le tir en campagne.
Si le président reconnaît que l’expérience olympique a permis à ses équipes de progresser, il maintient que sans verser dans le tout sécuritaire, la FFT a le savoir-faire pour organiser de grands événements. « Nous sommes beaucoup plus libres, nous maîtrisons notre discipline. »
Tout est en tout cas mis en œuvre pour que le public puisse suivre, tir après tir, l’évolution de la compétition avec des panneaux réactualisés en temps réel. Non seulement l’accès au CNTS est gratuit, mais les visiteurs peuvent également se tester, pistolet en main. Une idée de sortie, d’ici au 7 août.
Pratique. Championnats d’Europe de Tir sportif 2025 : 25 m /50 m/ 300 m, cible mobile et plateau, Centre National de Tir Sportif, route de Lignières à Déols, du 23 juillet au 7 août, entrée libre et gratuite.
Pass’Sport, Gil Avérous se fâche
Amélie Oudéa-Castéra et Gil Avérous commencent à avoir leurs petites habitudes lors des événements sportifs – photo Pierre Belsoeur
Les discours d’ouverture d’une compétition sportive sont en général des prises de parole convenues déclinant les incontournables. « Nous sommes ravis de vous accueillir et que le meilleur gagne. » Amélie Oudéa-Castéra avait évoqué les coupures regrettables dans le budget des sports, logique quand on est présidente du Comité national olympique après avoir porté la bonne parole gouvernementale avant et pendant les JO. Gil Avérous – face au président de la FFT Tir, à Alexander Ratner, président de la Fédération européenne ESC, à Luciano Rossi, président de la Fédération mondiale ISSF – n’a pas ménagé le gouvernement français. Le coup de rabot sur le budget du ministère de la Jeunesse et des Sports l’agace, mais la suppression du Pass’Sport le fait bondir :
« C’est une décision scandaleuse de priver les jeunes de pratique sportive. Si le gouvernement ne revient pas sur sa décision, Châteauroux prendra en charge cette dépense supplémentaire. Le sport ne doit pas être une variable d’ajustement. »
Il ne s’agit pas d’une parole en l’air. Le maire de Châteauroux a fait ses comptes : 1 500 enfants à 50€ (le montant du coup de pouce de l’État qui correspond au montant d’une licence), ça fait 75 000€ que la ville va devoir financer. Le maire a d’ailleurs convié les présidents des clubs sportifs de la ville à une séance de réflexion le 28 août.
Plus d’infos autrement :
L’interview de Gil Avérous, l’homme qui murmure à l’oreille des ministres