Au Poinçonnet, les dessinateurs feront apprécier la qualité de leur trait et leur sens de l’humour ce week-end des 22 et 23 novembre. Toute la semaine, ils sont en campagne dans l’Indre pour donner aux jeunes des notions de connotation.
Le lauréat du prix de la pantoufle 2024 en masterclass au collège Lafayette de Châteauroux. Photo PB
Par Pierre Belsoeur.
Dix ans plus tard, les ados ne sont plus Charlie. Ils ignorent à quoi le terme fait référence. Tout juste le Bataclan évoque-t-il quelques réflexions aux élèves de quatrième que Nicolas Caldier rencontre cet après-midi-là au collège Lafayette de Châteauroux. Nicolas est le lauréat de l’édition 2024 du salon « Papiers d’actu » qui réunit les dessinateurs de presse et caricaturistes au Poinçonnet. Les interventions dans les établissements scolaires et animations d’ateliers dessin constituent sa principale ressource. Un dessinateur de presse ne vit pas de son art. Les journaux les sollicitent de moins en moins et les prix sont loin de suivre la hausse du coût de la vie. Une poignée de stars de la profession seulement s’en tirent. Et le constat n’est pas seulement national.
« Couvrir l’information, ce n’est pas la cacher ! »
Heureusement pour lui, et pour les élèves de Lafayette, le salon du Poinçonnet fait la part belle à ces animations. Quatre-vingts séances de deux heures sont programmées lors de cette treizième édition, dispensées par douze des 31 auteurs du salon. L’augmentation est exponentielle et irrigue le département entier. Des séances, Nicolas en assure sept et adapte son animation à son auditoire même si le contenu est identique. Une première heure pour apprendre à lire un dessin, une seconde pour empoigner le crayon, après visionnage d’un tuto ultrarapide de Coco, la dessinatrice de Charlie.
Et il y a du boulot ! Car si les jeunes sont bercés par le monde de l’image, ils ne savent pas toujours traduire textes et dessins. Ainsi un dessin caustique sur la liberté de « couvrir l’info » dans la bande de Gaza a fait flop. Les jeunes traduisant que couvrir l’info c’est en fait ne pas mettre à nu la vérité. Ils sont en revanche parfaitement au fait de l’actualité de la consommation et comprennent facilement la connotation d’un dessin consacré à Shein. Le dessinateur se retrouve confronté à une forêt de points d’interrogation lorsqu’il aborde la notion de rapprochement de deux actualités dans un même dessin, domaine de prédilection des dessinateurs pour obtenir un sourire du lecteur appréciant le deuxième degré.
Construction d’un message à transmettre avec les élèves.
« Ton idée est bonne, grossis ton trait »
En passant de la théorie à la pratique, l’atmosphère de la classe se modifie. Les élèves les plus scolaires, qui assuraient l’échange avec le dessinateur en première heure, ont davantage de mal à imaginer un dessin qui définisse : « l’IA aujourd’hui et demain ». Au contraire, les élèves qui s’étaient tenus à l’écart commencent à jouer le jeu. Mais cela, c’est l’art du dessinateur qui, par le vouvoiement des élèves, établit avec eux un rapport quasiment professionnel. Nicolas Caldier parvient, à partir des traits tracés par les élèves, à saisir leurs idées et les inciter à aller plus loin. Car le dessin, même s’il ne conduit pas à la caricature, c’est l’art de l’exagération. Il faut trouver une idée, la pousser jusqu’au bout et combiner dessin et texte pour la faire comprendre à un lecteur qui prendra le temps qu’il faut pour saisir le fameux deuxième degré.
Il suffit de quelques traits à Nicolas Calder pour identifier une bonne idée de dessin chez ses élèves. (Photo Pierre Belsoeur)
Tous les élèves de Nicolas Caldier ne sauront pas forcément traquer ce deuxième degré, mais ils sont sortis de cours en avouant ne pas avoir vu le temps passer. Le dessinateur n’était pas mécontent non plus : « La classe de quatrième, c’est la plus difficile à intéresser. J’en sais quelque chose, j’ai encore le souvenir de mes années collège. » Nicolas n’a que 35 ans.
Le programme
Cette treizième édition du salon Papiers d’Actu accueille 31 dessinateurs, dont six nouveaux venus qui vont plancher sur le thème de la santé. Parmi ces « bizuths », Dorthe Landschulz, dessinatrice allemande de Stern et du Monde, installée en Bretagne, Faujour qui a fait tous les métiers, y compris rotativiste à Ouest France et Udine de Charlie Hebdo qui renforce la représentation féminine sur le salon.
Rencontre avec les dessinateurs
Retrouvez les dessinateurs au centre culturel L’Asphodèle et partagez avec eux un moment convivial où caricature et dessin de presse sont au rendez-vous.
Horaires :
Samedi 22 novembre 10 h – 12 h 30 / 14 h 30 – 18 h 30.
Dimanche 23 novembre 10 h – 12 h 30 / 14 h 30 – 18 h.
À 16 h, remise du prix de la Pantoufle du Berry, du prix de la Caricature mais aussi du prix Horizon et du prix des dessinateurs. L’entrée au salon est gratuite.
Les expositions
À l’Asphodèle, les dessins de presse de Nicolas Caldier, lauréat 2024 du Prix de la Pantoufle, dans le hall. Exposition des œuvres des dessinateurs et des dessins participant aux Prix de la Pantoufle et de la Caricature.
Salle multisport : « À votre santé ! » – l’exposition de dessins des dessinateurs sur le thème du salon ; exposition hommage à Charlie Hebdo et aux victimes des attentats de Paris, en lien avec le Centre international de la caricature, du dessin de presse et d’humour de Saint-Just-le-Martel et avec les dessins faits par les dessinateurs lors de l’édition 2015 de Papiers d’actu.
Exposition des dessins des élèves de différents établissements du département qui concourent pour le Prix Horizon.
Battle de dessins en direct
Samedi 16h00 à l’Asphodèle, les dessinateurs s’affrontent sur des thèmes donnés par le public ! Qui sera le plus rapide ? Qui aura l’idée la plus farfelue, la plus (im)pertinente, la plus drôle, la plus touchante ?
Un animateur sera disponible pour accueillir les enfants de 15 h à 18 h
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