Le backlash, la riposte à MeToo

La bibliothèque centrale de Tours a reçu ce mercredi 19 novembre trois personnalités féminines de la lutte en faveur des droits des femmes pour aborder un thème encore discret, le backlash. Comme son nom anglophone l’indique, il s’agit littéralement du « clash de retour », ou en bon français, « le retour de bâton » en réponse à tous les mouvements féministes des dernières années en France et partout dans le monde.

Dans de nombreux pays, la lutte en faveur des droits des femmes subit la riposte des milieux conservateurs. Illustration Freepik


Par Asmaa Bouamama.


Attention au backlash ! Derrière cet anglicisme signifiant « retour de bâton », se cachent toutes ces résistances qui s’organisent face aux progrès des droits des minorités. Deux maîtresses de conférence à l’Université de Tours étaient présentes à la bibliothèque tourangelle pour éclairer sur ce phénomène de société : Colombine Madelaine, juriste de formation et professeure de droit public, et Viviane Albenga, enseignante-chercheuse en sociologie du genre. Lucie Daniel, responsable d’études à l’association Equipop qui lutte contre les discriminations de genre et les violences faites aux femmes, était aussi présente.

Toutes les trois ont abordé le backlash, en rappelant l’origine du terme. C’est la journaliste américaine Susan Faludi, en 1991, qui écrivait l’essai coup de poing, Backlash, la guerre froide contre les femmes, dans lequel elle dénonçait déjà les offensives plus ou moins insidieuses contre les femmes, contre leurs tentatives d’émancipation et la défense de leurs droits. Les intervenantes ont tenté d’éclairer ces phénomènes, alors que dans le domaine du juridique, on observe un mouvement de reconsidération de certains droits fondamentaux comme celui du droit à l’IVG dans un certain nombre d’États, notamment aux États-Unis. Colombine Madelaine y voit un contrôle que les hommes tiennent à maintenir sur le corps des femmes. D’autres pays ont choisi de reconsidérer le droit à l’IVG, comme certains pays de l’Est. Lucie Daniel ironise tristement avec un phénomène inversé qui s’observe depuis quelques années, « Avant c’étaient les femmes mexicaines qui allaient aux États-Unis pour avoir recours à l’avortement, et maintenant ce sont les Américaines qui vont au Mexique pour bénéficier d’avortements médicalisés, car l’interdiction de l’IVG ne dissuade pas les femmes d’y avoir recours, cela a pour conséquence de rendre le parcours d’accès plus difficile et dangereux, voire mortel. »

Le backlash traverse tous les pays du monde

Comme le rappelle Lucie Daniel, tous les pays sont concernés par le backlash. « Aujourd’hui les États-Unis sont même un réservoir de forces masculinistes », insiste-t-elle. On observe des chocs culturels ainsi que des façons très variées d’aborder la position des hommes et des femmes dans les sociétés, mais le backlash comme réponse à MeToo et à tous les mouvements de ces dernières années se manifeste dans quasiment tous les pays. Les hommes ne seraient ainsi pas prêts à s’identifier à la lutte féministe, si l’on en croit la présence largement féminine dans la salle de la médiathèque de Tours ce 19 novembre.

La sociologue Viviane Albenga considère le problème comme avant tout culturel et donc malléable. Elle évoque une sensibilisation des hommes au harcèlement public par exemple, mais beaucoup moins sur les violences qui ont lieu en privé. Une étude menée par l’Université de Tours montre que seulement 58 % des hommes interrogés estiment que le mouvement MeToo est positif, contre 84 % du côté des femmes. Un écart qui semble révéler un dialogue difficile encore à embrayer entre les hommes et les femmes, puisque MeToo est une démarche sociale et mondiale où les femmes prennent la parole individuellement en clamant « Moi aussi ». Les hommes, d’après Viviane Albenga, ont du mal à parler et à s’identifier dans des figures masculines autres que celles auxquelles on les assigne, à savoir un agresseur potentiel. Même si bien des hommes se sont ralliés à la cause des femmes et refusent de s’inscrire dans une démonstration de force plus violente et suprémaciste, les mouvements du backlash peuvent faire craindre une surenchère de prise de pouvoir sur le théâtre du politique, social et de surcroît, en privé.


Plus d’infos autrement :

À Tours, l’association Utopia 56 dénonce la privation de droits pour les mineurs étrangers

Commentaires

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  1. Je propose à Mag Centre, de lancer une pétition sur toute la région centre pour que les hommes qui ont assez d’être stigmatisés comme potentiellement violents de dire pourquoi ils ne le sont pas !

    C’est un véritable vivier de témoignages qui pourraient être reçus ! Les hommes ne sont pas nés violents ! Seulement ils risquent de le devenir si on les y invite ! Alors le virilisme est un peu dépassé ne croyez-vous pas !

    On peut essayer ! C’est peu de chose mais cela peut rapporter plein de bonnes choses !

    Je suis disponible pour assister ! Si quelqu’un s’y colle.

    Bien à vous

    Monique LEMOINE

  2. “Les hommes peuvent devenir violents si on les y invite! ”
    Cette phrase peut se comprendre de deux façons :
    soit parce que si une femme s’ habille pour se sentir belle des hommes peuvent vivre cela comme une invitation à la séduire pour avoir une relation sexuelle avec elle quitte , si elle refuse, à la traiter d’allumeuse ( et on connait la suite )
    soit parce que les églises de toutes obédiences ont martelé depuis des millénaires que la femme est une pécheresse, que l’homme doit la dominer et que tous nos malheurs viennent d’elle ( le pain à la sueur de notre front, la mort, les guerres et tout le reste, la lecture des textes bibliques Ancien et Nouveau Testament regorgeant de ces allusions et condamnations).
    Pour ma part j’estime que c’est d’abord le bourrage de crânes par des religieux avides de pouvoir et mal dans leurs peaux qui ont généré cette brutalité.

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