Capton, qui vit et travaille à Orléans, est un artiste de renom international. Ce peintre vient d’effectuer un solo show à la galerie Courcelles à Paris et, jusqu’au 14 décembre, est l’invité d’honneur du 49e Salon national des artistes animaliers de Bry-sur-Marne. À l’invitation de la municipalité, Capton exposera, du 28 novembre et pour quatre mois, un vaste et magnifique ensemble d’œuvres en la collégiale Saint-Pierre-le-Puellier d’Orléans.
Par Jean-Dominique Burtin.
Élégance et virtuosité porteuses d’émotion

“Pégase” au cœur de la collégiale. Photo J-D. Burtin.
À Orléans, dans le magnifique comme impressionnant écrin de la collégiale, ce créateur né en 1961, présente soixante-six tableaux, huiles sur toile à main levée, dont une vingtaine de nouveautés et des œuvres encore jamais vues. Taureaux, chevaux, moutons, volatiles enchanteurs et créatures mythologiques envahissent avec puissance et beauté l’espace orléanais. Gil Bastide, galeriste et commissaire de l’exposition, a conçu une remarquable et spatiale scénographie qui n’est pas sans faire délicieusement allusion à la maison de Rosa Bonheur, célèbre artiste animalière dont Gilles Capton revendique la filiation artistique. Par ailleurs un immense Pégase sur bâche et la reconstitution d’une écurie réalisée avec l’assistance de Didier Girard, régisseur de la collégiale, apportent de surprenantes touches de charme et de beauté à cette exposition.
Une finesse illuminant précieusement le naturel
Capton : « À dire vrai je ne savais pas si je pouvais aller jusqu’au bout de cette aventure ; cela m’a pris plusieurs mois pour composer cette exposition et ce fut difficile à gérer entre accrochages en salons et en galeries. Gil Bastide m’a, côté administration et scénographie, enlevé de la pression en me permettant de ne me consacrer qu’à la peinture. De fait, Gil Bastide m’a vu débuter, il adore les artistes, sait mettre en œuvre leur travail, il sait aussi recevoir les suggestions, tant et si bien que c’est un travail d’équipe et que j’ai pu me sentir, pour avancer, dans un cocon confortable ».
Travailleur infatigable dans son atelier, Capton ne conçoit pas sa création sans aller à la rencontre de producteurs pour découvrir le patrimoine local et trouver son inspiration au contact de la présence et du regard des animaux dont il offre une vision toute en puissance et tendresse. Voici une vérité qui s’accompagne d’une finesse illuminant le naturel, un réalisme précieux, une peinture incomparable du vivant et du mouvement.
Au tout début d’une grande aventure

Capton, infatigable créateur. Photo J-D. Burtin.
Comment Capton a-t-il commencé à dessiner et à peindre ? Réponse de l’artiste : « À l’âge de cinq ou six ans, je reproduisais les images de Tintin. Mon plein et mon vide viennent de là, de la ligne claire. Plus tard, je me suis aussi intéressé, pour son graphisme, à la publicité. À Orléans, à l’école des Beaux-Arts, j’ai été l’élève de Grandfond, Hétreau, Leclerc et de Davalan, superbe professeur de couleurs. Aujourd’hui, pour faire les blancs je pars des nuages, tous mes tons foncés me viennent d’un crépuscule ou d’un clair-obscur, et le beige, de bancs de sable. Puis je travaille sur une palette restreinte. »
Des moments de doute et de réflexion
Reste que c’est en 1982 que Gilles Capton quitte l’école des Beaux-Arts, monte une boîte de décoration et, inspiré par les muralistes américains, réalise des trompe-l’œil à l’aérographe et des stands. Puis vient un moment de doute et Capton « décide de tout quitter ». Pendant trois ans, cet artiste va faire à Paris, nous explique-t-il, des petits boulots dans l’univers du spectacle. Ainsi devient-il standardiste à l’Olympia, contrôleur au Théâtre Edouard VII tout comme au Zénith. Tout cela lui permettra de croiser, entre autres, les routes de Johnny, Depardieu, Catherine Lara ou Sheila.
Rendre toute sa noblesse à la nature animale
Au bout de ces trois années, Capton revient à Orléans, rencontre Éric Besnard qui lui permet de mesurer que dessin et peinture sont bel et bien sa vie. Au bout de quelque temps, Capton va rencontrer le galeriste orléanais Jacques Le Bihan. C’est le début d’une grande amitié qui se soldera par plusieurs expositions à la galerie L’Escalier. C’est toutefois en 1998 que, tous les dimanches, sachant qu’il faut « toujours aller voir ailleurs », Capton se rend au marché parisien de la création, boulevard Edgar Quinet.
Gilles Capton : « D’un seul coup, j’ai trouvé une famille d’artistes avec qui je pouvais échanger ; elle m’apportait des conseils et me sortait de mon isolement. Par ailleurs, du fait de la venue de nombreux touristes, je voyais certains de mes tableaux partir dans le monde entier. À cette époque je peignais, pour leur rondeur et leur sensualité, des tomates, mais aussi des animaux que je représentais dans des appartements telles des vaches baroques, tout cela parce que la vache est déesse mère, mère nourricière à qui je tiens à rendre toute sa noblesse. »
En 1996, Capton se rend au Portugal, va à la rencontre d’éleveurs de taureaux, assiste à la dramaturgie d’une corrida, et se met à représenter ces animaux. Cependant le travail à l’huile ne vient pas tout de suite. « Cet animal était pour moi tellement impressionnant, par sa puissance, sa dignité et son courage, que je n’ai pu, pendant un an, afin de l’évoquer, qu’utiliser le fusain et l’encre ».
Sentir et ressentir une présence, mesurer un regard
Afin de peindre de magnifiques percherons, « ces chevaux lourds et doux », Capton, une nouvelle fois, se rend à la rencontre d’un éleveur et découvre avec bonheur que ce dernier travaille à l’écoute de personnes autistes qu’il fait monter sur une charrette pour qu’ils puissent tenir les rênes. Plus que jamais le coup de cœur naît d’une humanité rencontrée. Pour Capton, réaliser un portrait passe par le souvenir des mots d’une éleveuse ou d’un éleveur et par la mémorisation du moment où il a croisé l’animal et son regard. « C’est du portrait, on se mesure mutuellement », explique l’artiste.
La naissance et la réalisation d’une toile ? « J’ai mon cadrage dans la tête. Il y a tout d’abord le grand croquis à la peinture blanche sur fond noir. Et je commence toujours par l’œil. Dans une toile je laisse tous mes défauts, je garde les repentirs car je ne suis pas un robot et ai droit à l’erreur. Il me faut près d’une heure de chauffe avant d’être bien dans le tableau, me souvenir du geste qui ne doit pas devenir mécanique mais garder son naturel. Au fil du temps, la facture de mon travail évolue, je peux ainsi reprendre des tableaux d’il y a dix ans pour qu’ils soient le reflet de qui je suis aujourd’hui. »
Un hymne d’amour à la nature

Gil Bastide et Capton devant l’œuvre “Nature sacrifiée”. Photo JD-Burtin.
Militant, amoureux de la mythologie et se mettant sans cesse en danger en sortant de ses zones de confort, Capton peint les oiseaux, ces « messagers d’Odin » qui vont explorer le monde, ces hommes taureaux évoquant le rapport humain de dominant dominé, ces flamants, ces corneilles ou ce bouc angora figurant sur l’affiche, appelé Ulysse et issu de l’élevage de Sandrine Durgeau.
Par ailleurs, via tout ce bestiaire magistral et d’exception, il s’agit aussi de découvrir le regard d’un artiste humble porté sur la nature sacrifiée. Gilles Capton : « Devrait-on sacrifier la nature pour qu’elle devienne religion et qu’on la respecte ? Mes tableaux de la nature sacrifiée s’inspirent des cris d’alarme qu’adressent inlassablement les scientifiques à nos dirigeants. Aujourd’hui l’homme ne respecte plus la nature. Faudra-t-il un grand sacrifice, un holocauste planétaire pour que nous prenions conscience de notre arrogance, de nos erreurs, de notre croyance aveugle en notre capacité à tout contrôler en ignorant, impunément, la Nature et nos racines ? Reste-t-il l’espoir d’une Renaissance, d’une réconciliation entre l’Homme et la Nature ? »
Capton, peinture
Du 29 novembre 2025 au 29 mars 2026,
Collégiale Saint-Pierre-le-Puellier, Orléans.
Du mardi au dimanche, de 14 heures à 18 heures. Entrée libre.
Un livret d’exposition, où l’on retrouve des photos prises par Jean-Dubrana est disponible sur place.
Plus d’infos autrement :
Capton, un peintre animalier à la tendre et magnifique puissance