La récente saisie de centaines de bouteilles de protoxyde d’azote en Indre-et-Loire révèle l’ampleur d’un usage détourné en pleine explosion chez les jeunes. Risques sanitaires graves, trafic organisé et collectivités démunies : la consommation de proto est désormais un problème national.
310 bouteilles de gaz hilarant saisies par la Police nationale de Tours le 12/12/2025. Source policenationale37
Par Philippe Voisin.
C’est une saisie spectaculaire de 310 bouteilles de protoxyde d’azote qui a été rendue publique il y a quelques jours sur les réseaux sociaux par la Police nationale d’Indre-et-Loire. Le produit appelé aussi gaz hilarant a été découvert par les agents de la Brigade Anticriminalité (BAC) dans un véhicule à Saint-Pierre-des-Corps. Il était vraisemblablement destiné à un usage détourné et illicite.
Une consommation en croissance continue
L’inhalation du protoxyde d’azote est un phénomène identifié depuis plusieurs décennies, mais une recrudescence de cet usage chez les collégiens, lycéens et étudiants est constatée par les services de l’État. Les interventions des forces de l’ordre qui se sont multipliées cette année n’empêchent pas l’augmentation de la consommation. En 1 an, on comptabilise 56 interventions de la police municipale d’Orléans sur des situations de consommation ou d’abandon de cartouches dans l’espace public ; plus d’une cinquantaine de verbalisations dans le seul département du Loiret. Pendant la même période, 412 bouteilles ont été collectées dans le sud de l’agglomération orléanaise, 361 apportées par la seule ville d’Olivet. Toutes les régions sont concernées, les zones urbaines et rurales. Le problème est national. Même les départements qu’on pensait à l’abri de cette contagion réagissent, l’Indre, le Doubs, le Jura…
Le proto ou gaz hilarant
La diffusion de ces substances s’est organisée. Des journalistes d’investigation de TF1 filmaient en août 2025 l’acquisition, via les réseaux sociaux, de six cartouches de protoxyde d’azote pour 140 € ! Sur Internet, on peut facilement s’approvisionner.
Présent dans les préparations culinaires comme la crème chantilly, dans les aérosols d’air sec ou dans des mécanismes industriels, ce gaz est détourné de son utilisation courante pour ses propriétés euphorisantes par inhalation avec des ballons gonflables. Sa consommation présente des risques majeurs pour la santé : manque d’oxygène, perte de connaissance, brûlures, vertiges, baisse de la vigilance, troubles neurologiques irréversibles…
Des collectivités démunies ?
En l’absence de politique nationale et de plans de lutte coordonnés, les collectivités territoriales ont pris rapidement la mesure du danger pour la jeunesse. Les premiers arrêtés d’interdiction ont été publiés dès 2020 mais la lutte s’intensifie depuis cette année. Les sanctions sont alourdies. La vente, la détention et l’abandon des cartouches sont désormais totalement interdits sauf pour les professionnels sur présentation d’une autorisation d’utilisation. Ces délits sont passibles d’une amende de 3 750 €. Toute incitation d’un mineur est par ailleurs passible d’une amende de 15 000 €. La répression est encore loin de dissuader les jeunes consommateurs. On a tous encore à l’esprit le dramatique accident d’Alès dans le Gard qui a coûté la vie à trois jeunes le 3 décembre dernier. En juin 2025, la ville de Tours lançait une campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux. Cependant, la prévention a ses limites et les résultats ne sont pas convaincants.
Que faire en présence de déchets sauvages ?
Les services de gestion des déchets de l’agglomération orléanaise conseillent de rapporter les cartouches dans les déchetteries qui collectent les produits toxiques et dangereux. Mais ils sont confrontés à l’absence de filières de recyclage agréées. Le coût supporté par la Métropole d’Orléans s’élève à 155 000 € depuis le début de l’année.
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