Christophe-Emmanuel Bouchet, ce peintre hors norme, à la notoriété plus grande en dehors de nos frontières, notamment en Allemagne, qu’en France, est de ceux dont on ne comprend pas que la reconnaissance ne soit pas de mise vis-à-vis d’une création exceptionnelle.
C’est pourtant un artiste au parcours hors du commun, dont l’art relève, entre autres, d’une formation initiale parfaite aux Beaux-arts de Toulouse, de Bordeaux, de Tours.
Il possède aussi le diplôme national et le diplôme supérieur d’expression plastique à Paris. Mais une formation n’a pas toujours valeur de reconnaissance et les premiers travaux avant-gardistes mêlés à un handicap physique important font que ce Tourangeau a du mal à trouver sa place dans le monde de l’art normatif. Diplôme en poche, s’il se préoccupe d’esthétique, il n’en conserve pas moins un regard critique sur la société.
Christophe-Emmanuel Bouchet, à contre-courants
Christophe-Emmanuel Bouchet est né à Saint-Aignan-sur-Cher (Loir et Cher) en 1959. Malentendant de naissance, il ne fréquentera jamais l’école primaire. Sa mère lui enseigne à la maison la lecture et l’écriture.
Il s’installe à Berlin-Ouest un 24 décembre 1980. Il entre dans l’histoire de l’art et dans la grande Histoire en avril 1984, en commençant, avec Thierry Noir, à peindre le Mur de Berlin (Mariannenplatz, Potsdamerplatz, Checkpoint Charlie). «Nous ne voulions pas embellir le Mur, c’était plutôt une réaction physique contre la vie inhumaine près du rideau de fer.» Il y laissera une mémoire picturale indélébile, comme peu d’artistes avant lui.
Le 4 juillet 1986, il peint à Checkpoint Charlie, toujours avec Thierry Noir, 42 statues de la Liberté pour célébrer le centième anniversaire de l’installation à New York de la statue de Bartholdi. Son approche décalée de la peinture et la spontanéité de ses créations berlinoises ont fait de lui un avant-gardiste du «Street art».
Il est aussi en novembre 1987, le premier peintre de l’histoire du Mur de Berlin à avoir peint le Mur côté Est en renversant de la peinture après avoir scié le Mur entre deux fragments !
Christophe-Emmanuel Bouchet se partage entre son atelier de Düsseldorf et celui de Chenonceau dont il a racheté l’ancienne gare pour la transformer en œuvre d’art à part entière.
Il se désigne lui-même comme «citoyen du monde».
Une performance et du grand art.
Le 18 juin dernier, à l’occasion d’un tournage pour France3, nous nous sommes rendus à Francueil, tout près de Chenonceau, dans la propriété de Roger Remoue et de Leticia Gonzalez Mantilla, qui sont à l’origine de la rencontre et du retour en France de Christophe-Emmanuel Bouchet.
La prestation de Christophe-E. Bouchet, devant ses visiteurs, a été éloquente quant à son talent créatif. Se dévoiler ainsi devant la caméra, mettre à jour sa technique, ses compétences et prendre le pari de réaliser une œuvre devant nous relève d’une gageure. Une sacrée gageure!
Il est vrai que l’artiste peintre avec son expérience du Mur de Berlin et de la rue n’a pas peur du regard du public au contraire de bien des artistes qui n’osent afficher les raisons de leur notoriété.
Pour sa part, Christophe-Emmanuel Bouchet, interroge son public sans aucun problème pour recueillir des idées sur la toile à réaliser. Faute de réponse, il opte pour un hommage à ses visiteurs orléanais.
“Jeanne a trouvé à Orléans, son prince”, tel est le titre qu’il a donné à une superbe toile.
Passant d’une couleur à une autre, d’un détail à un gros plan, à l’opposé sans jamais prendre de recul et toujours avec le coup de pinceau sûr, minutieux et terrifiant de dynamisme.
Toutes ces qualités, mêlées à une assurance digne des plus grands, font que le résultat, plus tard, est époustouflant et impressionnant.
Une œuvre qui sera montrée dans différents lieux d’Orléans et qui sera peut-être, enfin, le point de départ d’une véritable reconnaissance.
Il est à souligner que le travail de Christophe-Emmanuel Bouchet s’inscrit aujourd’hui dans une thèse de doctorat actuellement en cours à l’université de Paris Ouest.
«Art Liberté»
Egalement à souligner: la grande exposition «Art Liberté» qui se tient à la gare de l’Est, à Paris jusqu’au 8 juillet, «du Mur de Berlin au Street art» porté par la SNCF et la Mairie du 10e arrondissement de Paris.
Gérard Poitou
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