Le Bauhaus et la photo à l’ESAD d’Orléans

C’est un bien belle idée de l’ESAD d’Orléans que de proposer dans ses locaux cette exposition de photos tirées des archives du Bauhaus, occasion de revenir sur cette école-atelier d’architecture qui marqua si fortement les débuts du siècle dernier, mais aussi occasion de s’interroger sur la pratique photographique comme forme d’art.

Le réalisateur Amos Gitaï qui présidait le Jury du festival orléanais “Cannes 39” rappelait récemment lors de sa “Leçon de cinéma” que le Bauhaus où son père était architecte, fut la première école d’enseignement supérieure fermée et persécutée par les nazis dès leur arrivée au pouvoir, tant cette école représentait une façon sociale et donc politique d’aborder la question du design et de l’architecture. Walter Gropius, fondateur en 1919 du Bauhaus, définissait,dans son manifeste la mission du Bauhaus et l’objectif n’était pas de créer une mode ou un style “Bauhaus” mais de concevoir et de fabriquer des objets” capables de remplir leur fonction, être pratiques, durables, bon marché et beaux“, et ce “avec le moins de moyens possibles“, un vrai manifeste contemporain!

Il est ici passionnant de voir comment cette école qui se définit “non pas comme un phénomène culturel mais comme phénomène social” s’empare alors de la photographie dont l’évolution technique libère de plus en plus la pratique. L’exposition présentée permet de façon flagrante de saisir le regard que pose sur le monde, ces photographes pour beaucoup inconnus en travaillant à la composition d’images dont l’esthétique sert l’expression du sujet photographié. Beaucoup de ces clichés reflètent la vie collective du Bauhaus, mais aussi une réflexion approfondie de l’usage de la représentation photographique tant par le choix des sujets que par leur composition.

A une époque où la logorrhée photographique nous fait oublier que la réalité n’a pas de sens, et que seul le regard du photographiant peut enrichir l'”instantané” d’une intention signifiante, si tant est qu’il la définisse dans son rapport au réel photographié, l’automatisme de la technique a créé l’illusion d’une facilité d’expression qui vide de son sens une grande partie de la pratique photographique. Cette exposition nous rappelle opportunément combien une esthétique est fondatrice d’une démarche artistique.

Gérard Poitou

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