Éclats de Grenade, l’Andalouse

L’Alhambra rayonne sans conteste sur Grenade. En complément de cet éblouissement, une virée dans les alentours permet de découvrir de pittoresques « villages blancs » ou de mesurer l’empreinte laissée par le poète martyr Federico Garcia Lorca.

Alhambra. Laurier mauve dans les jardins du Generalife © YH

En toute majesté, une forteresse de couleur ocre surplombe Grenade sur fond de sommets enneigés de la Sierra Nevada. Bâtie au XIVe siècle sur un promontoire par la dynastie des Nasrides, cette cité-palais – l’Alhambra – fait figure d’emblème de l’art musulman en Espagne. Nous grimpons la voir de plus près. Il faut se frayer un chemin dans la foule. Comme le joyau attire près de 3 millions de visiteurs par an, des quotas ont été mis en place. Pas plus de 8000 entrées par jour. Ce qui permet de ne pas jouer des coudes.

Premier choc esthétique dans les jardins du Generalife, près de la résidence d’été des émirs de Grenade. Quiétude des lieux baignés de canaux d’irrigation et de jets d’eau. Leur doux murmure est rehaussé par les couleurs des roses, des orangers, des cyprès ou des massifs de lauriers mauves. Ce décor voluptueux est fermé à une extrémité par la salle des concubines ornée de moucharabiehs donnant sur le parterre. Visiblement, ces souverains d’antan qui ont imposé le style andalou savaient vivre !

Sentiment confirmé un peu plus loin : le palais de Comares expose une fine architecture de dentelles de pierre et de stucs. Sur les murs, les poèmes gravés sont autant de louanges divines. Le palais ouvre sur la superbe Cour des Myrtes. L’édifice se reflète dans l’étang central rectangulaire, cerné de marbre blanc et de buissons de myrtes taillés au cordeau. Attenant, le patio des Lions réservé à la vie familiale justifie son nom : entourée de pavillons à colonnes, la fontaine centrale est portée par douze lions sculptés. Ils symboliseraient, dit-on, les signes du Zodiaque.

La balade se poursuit par la visite du quartier militaire de l’Alcazaba, sa tour et ses hammams intérieurs, puis par le palais de Charles Quint. Il fut construit au XVIe siècle, comme un ajout des vainqueurs castillans, la dynastie des Nasrides ayant cédé en 1492 le « pays al-Andalûs » aux rois catholiques.

Parfum de nostalgie en redescendant par les ruelles pentues du quartier mauresque de l’Albaicin, bercé par le son des guitares et les chants gitans.

Grenade. Chants gitans dans le quartier de l’Albaicin © YH

D’autres monuments méritent le détour. En premier lieu, la Cartuja, la Chartreuse, pour sa sacristie de style baroque, mais aussi la cathédrale érigée sur l’emplacement de la grande mosquée et la chapelle royale où reposent les dépouilles de Ferdinand d’Aragon (1452 -1516) et de son épouse Isabelle de Castille.

Grenade. La cathédrale au coeur de la ville © YH

Le blanc et le noir

Direction le nord-ouest de la province, vers le village de Montefrio. Champs d’asperges et vallons piquetés d’oliviers se sont emparés des paysages. Peuplé de quelque 5500 habitants, Montefrio est l’un de ses « villages blancs » qui a préservé son authenticité. Le bourg s’étale au pied d’un piton rocheux spectaculaire, haut de 850 mètres, duquel émerge le clocher d’une église surnommée « La Sentinelle ».

De là, on dispose en effet d’une belle vue panoramique sur les environs. On remarque au cœur de la ville, un surprenant bâtiment doté d’une coupole ronde, l’église de l’Incarnation, datant du 18e siècle. Son architecte s’est inspiré du dôme du Panthéon d’Agrippa de Rome.

Riofrio. Dégustation de caviar © YH

Une petite faim ? Pour attendre le déjeuner servi vers 15 heures, rien de tel qu’une pause à l’élevage d’esturgeons de Riofrio. « Nous sommes le premier producteur mondial de caviar bio », assure Maria Eugenia. La pisciculture bénéficie de l’approvisionnement en eau des montagnes alentour. « Nous n’utilisons aucun produit chimique », poursuit-elle. Les bassins font l’objet d’une épuration naturelle à l’aide de filtres biologiques. Les poissons ont l’air à leur aise. Les plus gros esturgeons de 35 kilos donnent 3 kilos d’œufs, au bout de 15 à 18 ans. Etonnez vous, après cela, que le caviar soit un produit de luxe ! Ici, la variété de poisson privilégiée est le naccarii, encore appelé esturgeon de l’Adriatique. « Il est moins connu que le beluga, mais ses œufs sont de meilleure qualité ». On s’empresse d’aller vérifier, le temps d’une dégustation. Même en petite quantité, cet « or noir » local, accompagné d’un verre de vodka (ou de cava), est un vrai régal.

Ainsi mis en appétit, nous rejoignons un hôtel-restaurant de charme « La Bobadilla ». Conçu en forme de village andalou typique aux murs blanchis à la chaux, le lieu séduit par le calme qui s’en dégage, ses installations confortables… et sa cuisine de haute volée.

Sur les pas de Federico Garcia Lorca

Grenade. Vue sur la ville depuis l’Alhambra © YH

Pèlerinage à Fuente Vaqueros où se trouve la maison familiale de Federico Garcia Lorca, transformée en musée. Il naquit là en 1898 et y vécut ses sept premières années. Un piano rappelle que Federico fut musicien avant de devenir poète. Un petit film retrace sa passion pour le théâtre populaire et les tournées de sa compagnie ambulante « La Barraca, » lors de sa période estudiantine. Déménagement ensuite dans le village voisin de Valderrubio qui entretient le culte du dramaturge espagnol. On y a notamment reconstitué « la maison de Bernarda Alba », titre de son ultime pièce. Federico Garcia Lorca a puisé dans ses souvenirs de jeunesse pour restituer la rude condition des femmes dans l’Espagne rurale du XIXe siècle.

Retour à Grenade où le Centre Federico Garcia local, à la fois centre culturel et de recherche, est devenu une référence. « Grenade constitua pour lui une puissante source d’inspiration », raconte sur place Gracia Peregrin. N’évoquait-il pas Grenade comme « le paradis perdu du Maure » ? À l’université de Grenade, le poète se lie d’amitié avec le compositeur Manuel de Falla. Ils organisent de concert un concours des chants les plus anciens du répertoire flamenco. Le parcours de l’artiste aux talents multiples, engagé aux côtés des républicains, sera tragiquement interrompu en 1936. Les milices franquistes qui l’interpellent à Grenade le fusillent trois jours plus tard.

On a encore en mémoire cette exécution sommaire en assistant aux arènes de la ville à une représentation de flamenco du tablao « La Solea ». Les claquements des talons sur le sol résonnent comme le bruit des balles, avant que les châles bariolés des danseuses volètent et suggèrent de plus doux rêves andalous.

Grenade. Dans un bar à tapas © YH

Pas question de quitter Grenade sans emprunter « la route des tapas ». Il n’y a que l’embarras du choix. Les bars prolifèrent. À chacun sa « racion » de l’apéritif maison : jambon sec, anchois, crevettes, tortilla… Tapas pour tous associés à une ambiance conviviale. Le dernier souvenir de Grenade a un goût de revenez-y.

Yves Hardy

Pratique

Y aller. Avec Vueling. Vol direct Paris – Grenade en 2h30. www.vueling.com

Y séjourner. À l’hôtel Barcelo Carmen Grenada, un 4 étoiles, bien situé au cœur de la ville. Vue panoramique sur l’Alhambra et la ville depuis son restaurant-terrasse. https://www.barcelo.com/fr

La Bobadilla, hâvre de paix doté d’une piscine © YH

Y déjeuner. Restaurant La Finca  de l’éco-hôtel « La Bobadilla », entre Grenade et Malaga. Cuisine gastronomique dans le cadre enchanteur d’un village traditionnel andalou. https://labobadilla.grandluxuryhotels.com

À voir. L’Alhambra de Grenade. Réserver son billet en ligne (14,85 €) un mois à l’avance www.alhambra-patronato.es Ou passer par l’intermédiaire des hôtels Barcelo qui peuvent faire les formalités pour vous.

– Le monastère de la Cartuja de style baroque

– La pisciculture d’esturgeon de Riofrio : www.caviarderiofrio.com

– Exposition « Jardin déchiré. Lorca et l’amour » jusqu’au 6 janvier 2010 au Centre Garcia Lorca de Grenade. Plaza Romanilla.

Guides. Andalousie Petit Futé (12,95 €) et Géoguide Gallimard (14,50 €).

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