Commémorations du 8 mai 45, un autre hommage aux héros de la Résistance

La crise sanitaire  ne permettra pas de rendre hommage aux soldats morts pour la France. Ce 8 mai 2020, l’ennemi Covid-19, n’est pas encore vaincu. Mais une autre forme de célébration est possible, comme le décryptage des plaques commémoratives accrochées ici et là, sans toujours savoir à qui elles font référence. Exemple du quartier Saint-Marceau, à Orléans sud (Loiret).

Plaque située Place de la Bascule, Orléans, quartier Saint-Marceau. ©Anne-Cécile Chapuis

Cette année, en ce 8 mai 2020, les commémorations de l’armistice 39/45 n’auront pas lieu. Comme toutes les manifestations à caractère collectif, elles obéissent aux mesures sanitaires et, au mieux, se tiendront dans un hommage discret ou dépôt de gerbe sur un monument aux morts, sans public, sans musique, sans discours. Les héros de la deuxième guerre mondiale doivent pour autant rester présents dans nos mémoires, aujourd’hui peut-être encore plus qu’hier dans le contexte de grave crise que traverse notre pays, et que d’aucuns qualifient de « guerre ».

Leur souvenir est entretenu par les monuments que l’on trouve dans chaque ville ou village, et qui ne donneront pas lieu à célébration cette année, mais il est également mis à l’honneur de façon discrète et individuelle par des plaques commémoratives apposées sur les maisons où ils ont vécu.

Comme à Orléans, au sud de la Loire, dans le quartier Saint-Marceau, on trouve le souvenir de Marcel Boubou, rue de Vaucouleurs, Robert Dubois, place de la Bascule, Fernand et Marcelle Rivière quai de Prague.

Des Hommes dans le marbre

Qui sont ces personnes, au-delà des brèves informations d’état civil et d’appartenance à un groupe ou un parti ? Quel est leur tragique destin en filigrane des informations sur leur arrestation, déportation, assassinat ? Que recouvrent les brefs commentaires, tels :« Il est mort pour la France et son idéal » « Victimes de la barbarie nazie » ?

Tout ceci reste énigmatique… Pourtant, quelques recherches rapides nous apportent des éléments qui permettent de faire « vivre » ces personnages dont les noms sont gravés dans le marbre.

Plaque située rue de Vaucouleurs, Orléans.©Anne-Cécile Chapuis

Marcel Boubou, fils de maçon, a été instituteur et a enseigné, entre autres, à l’école de l’avenue Dauphine. Après la guerre de 14/18 au cours de laquelle il est blessé, il s’engage contre le fascisme et rejoint un groupe de résistants communistes. Arrêté, il est envoyé à Auschwitz puis à Birkenau où il meurt à l’âge de 50 ans.

 

 

Robert Dubois est né et se marie à Orléans. Il exerce la profession de tourneur-mécanicien. Il est mobilisé à la guerre de 14, puis adhère au parti communiste. Arrêté en 1941 avec plusieurs camarades orléanais, il est déporté à Auschwitz où il meurt le 25 Août 1942.

Plaque située quai de Pragues, Orléans.©Anne-Cécile Chapuis

Fernand Rivière est né à Cognac en 1913. Il entre aux PTT où il fait la connaissance de Marcelle Querois qui deviendra sa femme en 1937. Muté à Orléans, il s’engage au parti communiste et entre dans la Résistance (groupe Chanzy) Dénoncé, il est incarcéré à la prison d’Orléans puis fusillé à Saran en 1943. Il a à peine 30 ans. Sa femme est déportée à Ravensbruck où elle décède en 1945.

Marcel, Robert, Fernand, Marcelle, vos prénoms vous situent dans un hier et les brefs éléments inscrits sur votre lieu de résidence montrent votre engagement. Vous avez habité Orléans, fréquenté les rues, les écoles, les commerces. Vous avez mené une existence ordinaire et paisible, avant de vous retrouver brutalement confrontés à l’univers de la guerre et de la tourmente. Votre engagement vous a conduits aux pires souffrances de la déportation, jusqu’à la mort, violente et prématurée.

La trace de votre existence nous est transmise par ces plaques si justement appelées « commémoratives » qui vous rendent un autre hommage, pour une revanche du souvenir contre la mort, de la mémoire contre l’oubli et de la vie contre la barbarie.

Anne-Cécile Chapuis

Commentaires

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  1. Honneur à la France combattante mais surtout hommage
    à la Résistance d’en bas. Cette Résistance qui a poussé le Général De Gaulle à dire que le PCF était le Parti des fusillés. En effet, dès le 21 octobre 1941 dans la carrière des fusillés près de Chateaubriand nous avons eu ces fusillés de la première heure tombés pour la Liberté et que vive la France.

  2. Une grande oubliée Cécile Painchault, agent de liaison, qui a organisé des rassemblements de protestation des femmes, afin qu’elles puissent nourrir leur famille. Arrêtée, déportée à Ravensbruck où elle y est morte. Son frère Robert, appartenant au groupe Chanzy.

  3. Le 29 septembre 1941, Le cheminot Marcel Pilongéry est le premier résistant communiste orléanais à être fusillé. Ceux des résistants qui arrêtés ne sont pas fusillés, sont envoyés en camps de concentration, seulement la moitié en reviendra. C’est le cas de Cécile et Robert PAINCHAULT, qui habitaient où nous sommes réunis aujourd’hui : Cécile Painchault est recherchée pour activité dite anti nationale par la police. Cécile et son frère Henri sont répertoriés dans les registres de police comme militants et activistes communistes. Son frère, Henri Gaget, a été déporté à Auschwitz en Juillet 1942 ( décédé le 20 septembre 1942 ). Cécile Painchault est liée au réseau Chanzy activement recherché dans la région, elle est à l’origine d’une manifestation de 200 femmes venues réclamer des tickets de pain à la mairie d’Orléans. Cécile Painchault est arrêtée à Orléans le 05 avril 1943. Elle fait partie du convoi de déportés en départ de Compiègne du 30 janvier 1944. Elle décède le 2 mars 1945 à Ravensbrück. Son mari Robert Painchault, lui aussi déporté, survivra et sera libéré en Mai 1945. Et bien d’autres militants communistes orléanais sont arrêtés et n’en reviendront pas vivants :-Marcel BOUBOU, instituteur à Orléans, arrêté le 19 octobre 1941, mort en déportation à Auschwitz -René BOULAY, tourneur-ajusteur à la Manufacture des tabacs, arrêté le 19 octobre 1941, mort à 50 ans en déportation à Auschwitz.-Marcel COULLON, facteur, arrêté le 19 octobre 1941, mort à 37 ans en déportation à Auschwitz.Cyprien DEPARDIEU, typographe, arrêté le 19 octobre 1941, mort à 53 ans en déportation à Auschwitz.-Robert DUBOIS, tourneur chez Panhard, arrêté le 19 octobre 1941, mort en déportation à Auschwitz à 45 ans.-Henri FERCHAULT père, cheminot, arrêté le 19 octobre 1941, mort en déportation à Auschwitz.-Henri FERCHAULT fils, électricien, arrêté le 10 février 1941, mort en déportation à Dachau.-Jean GATELIER, paveur, arrêté le 10 février 1941, mort en déportation à Dachau à 21 ans.-Roland LAMBERT, charpentier, fusillé aux Groues à 23 ans, le 8 octobre 1943.-Marcel LEROUGE, manœuvre, fusillé aux Groues à 32 ans, le 8 octobre 1943.-Joseph LHORENS, chauffagiste, arrêté le 19 octobre 1941, mort en déportation à Auschwitz à 46 ans.-Henri MARTIN, cheminot, fusillé aux Groues à 35 ans, le 8 octobre 1943.-Marcel MERCIER, métallurgiste, arrêté le 10 février 1941, torturé à mort à 20 ans.-Maurice MILLET, métallurgiste chez Panhard, fusillé aux Groues à 37 ans le 8 octobre 1943.-Cécile PAINCHAULT, couturière, morte en déportation à Ravensbruck à 37 ans.-Marcel PILONGERY, cheminot, fusillé aux Groues à 38 ans, le 29 septembre 1941.-Fernand RIVIERE, postier, fusillé aux Groues à 30 ans le 8 octobre 1943.-Marcelle RIVIERE, postière, morte en déportation à 45 ans.-Guy VERGRACHT, mécanicien, fusillé aux Groues le 8 octobre 1943 à 20 ans. 20 000 orléanais se rassembleront le 22 avril 1945 pour leur rendre hommage.

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