Les peintres confinés nous promettent de belles œuvres #1

Le temps passe et rien ne les lasse vraiment. Jour après jour, à l’écoute du monde mais confinés comme tout un chacun, mesurant leur chance, leur solitude, leurs doutes, éprouvant leurs sentiments pour les autres et parfois leur effroi, ils demeurent au chevet, au chevalet de leurs œuvres à venir.  En vérité, les peintres régionaux confinés, jour après jour, dans le secret de l’atelier,  nous réservent de belles œuvres que nous partagerons tôt ou tard. Avec un enchantement respectueux.
 

Douces peintures de Leena Noux

Une belle respiration attendue

Comme pour le monde du spectacle les dispositions gouvernementales liées à la lutte contre la pandémie ont un impact sur les activités des artistes peintres graveurs ou sculpteurs,  plasticiens professionnels. De nombreux grands salons où certains devaient participer sont annulés. Les galeries sont fermées et le manque à gagner est certain. Reste que le 113e Salon des Artistes Orléanais devrait apporter pour certains une respiration  plus qu’attendue. En effet,  ce rendez-vous qui devait se tenir du 9 au 25 mai est repoussé et se déroulera, si tout va bien, du samedi 10 au dimanche 25 octobre prochains  à la collégiale Saint-Pierre-le-Puellier. Tout cela tient à une collaboration fructueuse entre Abel Moittié adjoint au maire d’Orléans chargé de la culture, la Direction des affaires culturelles de la Ville et l’association artistique que préside Benoit Gayet.
 

Tetsuo Harada, invité d’honneur des AO.


Quatre vingt artistes, peintres, sculpteurs céramistes et graveurs, dont le sculpteur japonais Tetsuo Harada, invité d’honneur,  y sont attendus. Ainsi qu’un hommage à Maurice Genevoix à l’occasion du quarantième anniversaire de la disparition de l’écrivain et de l’entrée au Panthéon de celui qui fut aussi , en 1922,  le fondateur de l’association des Artistes Orléanais. 
Reste aussi que les réseaux sociaux permettent des achats. Reste aussi que le confinement est quant à lui quelque-chose que connaissent bien les artistes ne comptant pas leur temps dans l’atelier.  Face à la toile.
De tout cela, certains artistes et acteurs culturels de notre région, ont bien voulu nous parler.

Entre conscience et optimisme, confiance et gratitude

Loire, par Florence Dias Looten.


Florence Dias Looten  “Je ressens cette angoisse générale qui nous entoure mais je trouve que pour les artistes le confinement ne change pas grand chose car le travail du peintre et du sculpteur est solitaire. Le seul changement est qu’il n’y a pas de vie sociale. Cela me permet de m’immerger dans ma peinture même si je ne suis souvent pas contente du résultat et me demande ce que je vais faire après, de toute cette production.
En même temps, il est très positif d’échapper au coté social des vernissages qui nous sont cependant nécessaires pour vivre. Lorsque je regarde mon travail de ces derniers jours, je le trouve un peu triste et je me rends compte que j’ai beaucoup travaillé le gris. Mais je ne me plains pas, je connais la chance de ma condition, et comme chacun, je ne peux faire abstraction de ce qui nous  entoure. Je viens de faire une scène de café je me suis lancé le défi de parvenir à une lumière compliquée entre chien et loup.  Je suis d’un naturel optimiste même si je ne suis pas toujours sereine, je sais que l’on va sortir de ce cauchemar,  que la vie est toujours bien là même s’il y a des moments difficiles.”
 

Claire Boris et son “petit monde” de ciment. cl P. Delatouche


Claire Boris“Pour moi tout est à l’arrêt. Ce qui me dérange le plus est de ne pas avoir d’objectif avec une date. Je suis toujours en train de courir après le temps. Au début du confinement je trouvais que j’avais trop de temps à gérer,  j’étais perdue et dans le flou. A cela s’ajoutait le souci de me procurer du matériel et de devoir téléphoner à droite et à gauche. J’ai du ainsi travailler très lentement ce qui est pour moi très compliqué. Passer de tout à rien,  cela fait une grosse coupure,  c’est déstabilisant. Cela dit,  les petites galeries se manifestent et me rappellent  et vont ouvrir sans vernissage comme à Cluny ou à Bruxelles.
Ce qui me manque, dans ce confinement, c’est de ne pas pouvoir se retrouver entre amis et artistes. L’élan n’est pas le même mais je suis prête dès que possible à prendre la route,  la voiture avec mon petit monde pour aller dans l’avenir à Monaco, Annecy, Lyon Reims, Mulhouse Buxelles. Dois-je exprimer dans mon travail ce que je ressens de ce confinement ? Les angoisses c’est mon corps qui les prend et non pas mes sculptures. Je ne veux que donner des personnages de la vie”.
 

Douces peintures de Leena Noux


Leena  Noux. “Tout au début,  au quinze mars,  je me suis dit que  que tout était fini,  que je n’irai plus à l’atelier et j’en étais  stupéfiée. Une attestation en tant qu’artisane m’a permis de regagner l’atelier. Je n’y vais pas si souvent qu’avant, juste trois ou quatre jours par semaine. Au printemps j’avais plusieurs expositions mais tout a été annulé alors j’ai mis toutes mes photos en ligne et les collectionneurs qui me connaissent déjà m’ont heureusement contactée.
Mais toutes les expositions annulées font mal. Cela dit j’ai tout mon temps et peux travailler même si les possibilités d’achat de matériel sont difficiles. Aujourd’hui, il me manque un objectif. Ce que nous traversons est long, nous ne savons pas comment cela va évoluer et le travail des galeries est fragile.
Au début je ne savais que penser, encore une fois je me disais  que j’allais arrêter la peinture, mais finalement non, j’éprouve une grande gratitude pour les collectionneurs.”
 

“Le confinement : quoi de neuf pour les artistes dans les arts plastiques ?”

Abel Moittié (Photo: Patrice Delatouche).

Abel Moittié, adjoint au maire d’Orléans chargé des Affaires culturelles et président de l’association des Amis de Roger Toulouse. “Pas grand-chose, serais-je tenté de répondre, sauf à être démenti par les artistes eux-mêmes. Pourquoi ? Parce qu’en quelque sorte, je crois bien que le confinement, c’est le quotidien de l’artiste… dans son atelier.

N’est-ce pas la situation qu’il choisit de vivre, en effet, volontairement retiré du monde lorsqu’il travaille à l’atelier ?

Car au fond, qu’est-ce que l’atelier d’un artiste (peintre, dessinateur, graveur, sculpteur, céramiste…) sinon la cellule d’une réclusion qu’il choisit régulièrement de vivre, l’asile secret, intime, inviolé, dont lui seul conserve la clé ?

Oui ! Un atelier d’artiste, c’est bien une serre confinée de solitude et de méditation. Mais c’est n’est pas pour autant l’espace de sommeil ou de silence auquel on pourrait penser.

Un atelier d’artiste, c’est une pépinière vivante, bruyante, de passions et d’émotions fortes et parfois contradictoires. C’est un laboratoire de gestes réfléchis ou fulgurants, d’essais prometteurs et de repentirs, de grimaces de souffrance et d’expressions émerveillées. C’est un abri où tout est permis à l’imaginaire de celui qui l’habite corps et âme, hors des regards et des jugements d’autrui. C’est là que l’artiste, confiné, réfléchi, inspiré, tente, par le geste appliqué et minutieux de sa main, de changer le monde ou de le rendre plus beau.

Le confinement à l’atelier, c’est l’oxygène de l’artiste, la fenêtre ouverte à son inspiration. Là est peut-être le sésame d’une création authentique, le mystère d’un art qui parle à l’homme, lorsqu’enfin il s’expose.”

Jean-Dominique Burtin

Commentaires

Toutes les réactions sous forme de commentaires sont soumises à validation de la rédaction de Magcentre avant leur publication sur le site. Conformément à l'article 10 du décret du 29 octobre 2009, les internautes peuvent signaler tout contenu illicite à l'adresse redaction@magcentre.fr qui s'engage à mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la suppression des dits contenus.

  1. C’est une bonne nouvelle d’apprendre que l’exposition des Artistes Orléanais a été reportée en octobre ! Je pense beaucoup aux artistes peintres, sculpteurs, plasticiens… qui font notre bonheur lors de la découverte de leur travail dans les expositions ! on n’a pas beaucoup parlé d’eux et c’est dommage … Ils ont la possibilité de créer dans leur atelier certes, mais comme le souligne Florence Dias Looten : comment vendre toute cette production ? Nous devrons acheter davantage lors des expos ! En ce qui nous concerne, notre association Sarcelle et bout d’ficelle a reporté début octobre son 11ème parcours d
    art Contemporain ART-GENS . Nous espérons que les porte-monnaie s’ouvriront davantage !
    Courage à tous !

Les commentaires pour cet article sont clos.

Centre-Val de Loire
  • Aujourd'hui
    • matin 12°C
    • après midi 14°C
  • lundi
    • matin 10°C
    • après midi 15°C
Copyright © MagCentre 2012-2024