Voici un ouvrage qui ne devrait pas manquer de passionner pianistes et mélomanes. Publié aux éditions Aedam Musicae et préfacé par Dominique Merlet, cet ouvrage de Catherine Lechnner-Reydellet, consacré à la mémoire des pianistes français du XXe siècle a pour vocation de “faire découvrir comment les artistes d’aujourd’hui ont été influencés par les figures d’hier, ce que les maîtres du passé ont laissé d’héritage aux grands interprètes qui les ont succédé. “
Françoise Thinat
Transmission du savoir, écoute et héritage
Catherine Lechner-Reydellet, écivaine et pianiste professionnelle, dans une note à propos de son ouvrage: “Il part à la rencontre de témoins de l’histoire des “légendes françaises” pour décrypter la technique des “anciens”, leur approche de la pédagogie, leur manière de transmette leur savoir. Pour ce faire, chaque chapitre s’ouvre sur le parcours d’un maître et est suivi du témoignage d’un ou deux de ses disciples. Plusieurs générations parlent ainsi de leur carrière et montrent comment elles ont été amenées à construire et développer leur propre trajectoire au regard du patrimoine musical dont elles ont bénéficié.”
De hautes figures de maîtres
Au fil de cette somme de 346 pages apparaissent parmi quelques cinquante figures de maîtres célébrés, celles de Marguerite Long, Alfred Cortot, Blanche Selva, Nadia Boulanger, Marcelle Meyer, Lucette Descaves, Geneviève Joy Dutilleux, Samson François, Aldo Ciccolini, France Clidat, Brigitte Engerer…
Une part importante de cet ouvrage est consacrée aux propos de Françoise Thinat, concertiste, pédagogue engagée , fondatrice du Concours International de piano d’Orléans et qui a reçu l’enseignement d’Yvonne Lefébure et de Germaine Mounier au Conservatoire National Supérieur de Paris. Elle a ensuite travailé avec Marguerite Long et reçu les conseils de GeorgesTzipine et Louis Fourestier à l’Académie Marguerite Long, ainsi que de Guido Agosti à l’Académie Chigiana.
Le bel apport et la présence de Françoise Thinat
Ne boudons pas notre plaisir de citer Françoise Thinat à l’humour toujours aussi lumineux et incisif: ” Un bel après-midi de fin d’été, un concours-test a été organisé par Yvonne Lefébure, avec en particulier, l’Etude pour les tierces de Chopin. Une belle jeune femme rousse et déliée se tenait dans le jury et à la surprise de tous et surtout de la mienne, m’a accordé une première place. Jugement qui m’a plongée dans un ravissement vite démenti par son commentaire: “Vous avez raté vos tierces mais avec élégance”. Par ailleurs, Françoise Thinat parle de l’un de ses autres professeurs: “Le travail de Germaine Mounier sur les gammes pourrait se rapprocher de celui à la barre des danseuses. Elle entretenait son propre talent avec une discipline de fer qu’elle ne nous imposait pas forcément mais que nous voulions quand même tous imiter”.
Bref, impossible de tout citer mais quel plaisir de se plonger dans cet ouvrage et de s’abandonner à ces lignes de Françoise Thinat en intelligence renversante et intime avec la musique.
Jean-Dominique Burtin