L’Orléanais, terre de juristes. Ici, c’est le droit #11 Schwartzenberg

Une année à Oxford-sur-Loire, de 1968 à la « rumeur d’Orléans ». Un radical de gauche au pays de Jean Zay : Roger-Gérard Schwartzenberg

Pierre Allorant, doyen de la faculté de droit d’Orléans et historien

Roger-Gérard Schwartzenberg, né le 17 avril 1943 à Pau, est un juriste, politologue et homme politique français, qui a été président du Mouvement des radicaux de gauche (MRG), devenu le Parti radical de gauche (PRG), dont il est président d’honneur.

Élu député sur la liste menée par François Mitterrand lors des premières élections au suffrage universel direct du Parlement européen en 1979, député à l’Assemblée nationale de 1986 à 2007 et de 2012 à 2017, membre du gouvernement de 1983 à 1986 et de 2000 à 2002, Roger-Gérard Schwartzenberg est le fils d’André Schwartzenberg, industriel de la bonneterie à Paris et à Rouen, en association avec son frère aîné Simon Schwartzenberg, père du professeur Léon Schwartzenberg, cancérologue et éphémère ministre dans le gouvernement de Michel Rocard.

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Agrégé de droit public dès l’âge de 25 ans en 1968, plus jeune professeur de faculté de France, Roger-Gérard Schwartzenberg est installé à la faculté de droit et de sciences économiques d’Orléans où il succède à un ministre gaulliste de gauche, Léo Hamon.  

 1968, année exotique. Le plus jeune agrégé de droit public sur le « campus chlorophylle »

Ce jeune agrégé radical de gauche, futur ministre de François Mitterrand et de Lionel Jospin, débarque à Orléans à la rentrée 68, au lendemain du tumulte universitaire et peu avant la « rumeur d’Orléans ». Le campus de La Source est encore très éloigné du rêve de « l’Oxford-sur-Loire, le premier campus universitaire européen » porté par le recteur Antoine et par le ministre Pierre Sudreau ; la faculté de droit garde l’allure très provisoire de bâtiments de fortune d’une université du Val de Loire scindée récemment de celle de Tours et refondée en 1966 par le doyen Élie Alfandari, venu en service commandé de la vénérable faculté de Poitiers, recruté par le maire d’Orléans Roger Secrétain.

À la fac de droit, le jeune « maître de conférences agrégé » effectue un service d’enseignements diversifié : Organisation économique de l’État en 1e et en 2e années de licence de sciences économiques, Droit d’Outre-mer et de la coopération et science administrative en 4e année pour les étudiants juristes. Il côtoie Philippe Bretton, François de Fontette, Georges Gallais-Hamonno, Henri Jacquot, et les chargés de cours, professionnels issus des vieilles familles de juristes orléanais, Yves Lemaignen, Yves O’Mahony, Pierre Perroy ainsi que le secrétaire général adjoint de la mairie d’Orléans, Serge Bodard.  

Aussi éphémère que la « rumeur d’Orléans », le jeune agrégé repart à Paris dès la rentrée suivante. L’année suivante, il est élu à 26 ans professeur à l’université Paris-II Panthéon-Assas. Simultanément, il est professeur à l’Institut d’études politiques de Paris de 1972 à 1983 et y crée le premier cours de politique comparée.

Un radical de gauche de conviction, élu à toutes les échelles, de la commune à l’Europe

Délégué général du Mouvement des radicaux de gauche (MRG) dès 1976 à 33 ans, vice-président en 1978, il en est élu en 1981 président à 38 ans. Il reste à leur tête jusqu’à son entrée au gouvernement en mars 1983. Vice-président du groupe socialiste de 1988 à 1997, puis de 2002 à 2007, il préside le groupe parlementaire à l’Assemblée nationale de 1999 à 2000 et de 2012 à 2017.

Maire de la commune de banlieue cheminote Villeneuve-Saint-Georges durant deux mandats, de 1989 à 1995, puis de 2001 à 2008, Roger-Gérard Schwartzenberg est membre de trois gouvernements (le dernier de Pierre Mauroy, Fabius et Jospin) toujours dans son domaine de compétence professionnelle, comme secrétaire d’État à l’Éducation nationale (19831984), secrétaire d’État aux Universités (19841986) et ministre de la Recherche (20002002).

Ministre de la Recherche de Lionel Jospin, il est à l’origine de la deuxième loi de bioéthique, de la fondation du Consortium national pour la recherche en génomique, de la création du synchrotron SOLEIL à Saclay, de la relance du projet ITER et du projet GALILEO, du lancement du programme Ariane 5 plus, qui précède Ariane 6 et de la création de l’Institut de la vision, de l’Institut de la longévité et du vieillissement et de l’Institut des maladies rares.

Un humaniste progressiste, réformateur sur les institutions et les questions de société

Éditorialiste au Monde (1971-1976) et à L’Express (de 1971 à 1974), il y préconise des réformes institutionnelles adoptées postérieurement sous les mandats de Mitterrand et de Chirac : limitation du cumul des mandats, plafonnement des dépenses électorales, aide de l’État au financement des partis politiques, statut parlementaire de l’opposition, instauration du quinquennat.

Le 14 mars 1980, il dépose une proposition de résolution pour l’abolition de la peine de mort dans l’ensemble de la Communauté européenne, adoptée par le Parlement européen le 17 juin 1981, cent jours avant l’abolition de la peine capitale en France par la loi du 30 septembre 1981.

Favorable à la recherche en matière de clonage thérapeutique dès 2005, à l’assistance médicalisée pour la fin de vie en 2012, il manifeste son opposition en décembre 2013 au port du voile islamique par les parents accompagnant les sorties scolaires, considérant qu’elles font partie du temps scolaire. Lors du débat sur la déchéance de nationalité des terroristes binationaux, il propose de recourir à la peine complémentaire de l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, de la déchéance de la citoyenneté applicable à tous et non à la déchéance de la nationalité.

Retour à Orléans en 1984. L’hommage du ministre radical à Jean Zay

40 ans après l’assassinat de Jean Zay, la redécouverte de son héritage politique franchit une étape importante en 1984 avec la venue à Orléans du ministre radical de gauche à la faveur du lancement du timbre commémoratif à l’effigie de Jean Zay. Viendra dix ans après le colloque organisé par Antoine Prost, Pierre Girard et le cercle Jean Zay en 1994, puis le long chemin mémoriel jusqu’à la Panthéonisation décidée par François Hollande et, plus récemment, le festival de Cannes 1939-Orléans 2019, ce rêve de la redécouverte d’un festival annulé à la veille de la « drôle de guerre » en septembre 1939. À nouveau lors de la Panthéonisation, Roger-Gérard Schwartzenberg rappelle son attachement à l’héritage politique du « Jules Ferry du Front populaire ».

Lancement du timbre à l’effigie de Jean Zay à l’occasion des 40 ans de son assassinat. Hôtel Groslot, 1984 la famille de Jean Zay : sa veuve Madeleine, ses filles Hélène Mouchard-Zay et Catherine Martin-Zay, sa soeur Jacqueline Zay.

Roger-Gérard Schwartzenberg à l’Hôtel Groslot en 1984 avec Madeleine Zay et au second plan la rectrice, le préfet, le député Jean-Pierre Sueur, Michel Royer et Michel Lesseur, président du Cercle Jean Zay.

Professeur émérite à Paris II depuis 2011, il est candidat pour un siège à l’Académie française à la suite du décès de Georges Vedel et, candidat au fauteuil d’Alain Decaux, échoue à nouveau en 2018.

Pierre allorant

Pour aller plus loin :

  • Site de l’INA, vidéo (2 mn 32s) du 18 février 1984 au CRDP d’Orléans à l’occasion de la sortie du timbre de Jacques Combet à l’effigie de Jean Zay, en présence de l’ancien président du Sénat, Gaston Monnerville, du secrétaire d’État Roger-Gérard Schwartzenberg et du député Jean-Pierre Sueur, de la veuve et des filles de Jean Zay.
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, La Campagne présidentielle de 1965, PUF, 1967
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, La Guerre de succession ou l’élection présidentielle de 1969, PUF, 1969
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, L’Autorité de chose décidée, LGDJ, Bibliothèque de droit public, 1969
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, Sociologie politique, éditions Montchrestien, 1971, 5e é 1998.
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, L’État spectacle. Essai sur et contre le star system en politique, Flammarion, 1977
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, Politique comparée, Les Cours du droit, 2eédition, 1980
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, La Droite absolue, Flammarion, 1980
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, La Politique mensonge, Odile Jacob, 1998
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, 1788 : essai sur la maldémocratie, Fayard, 2006
  • Roger-Gérard Schwartzenberg, L’État spectacle 2. Politique, Casting et Médias, Plon, 2009

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