Décès de Christian Bidault : “Tu mourras dans la douleur…”

[Billet]
 
Tu mourras dans la douleur… 

En plus de son combat contre le cancer, un combat qu’il a mené avec courage, ténacité, détermination, Christian en a mené un second, pour une mort digne. Et comme le premier il l’a perdu. 

Si le confinement n’avait pas fermé les frontières, il serait parti un mois plus tôt mourir en Suisse, une mort tarifée mais choisie. Pour mourir debout – avant que la déchéance ne s’impose, avant que le corps ne lâche, que l’esprit ne vacille et que la souffrance ne l’emporte. 

Affaibli mais combatif, il n’a malgré tout pas lâché la partie. Trois semaines avant son décès, il a demandé à pouvoir bénéficier d’une sédation profonde. Mais il ne cochait pas les cases au regard de l’interprétation de la loi Leonetti Claeys. 
Nous avons rapidement compris combien ce texte est hypocrite, inutile, inapplicable, tordu. Malgré son libellé, cette loi votée en 2016 ne donne aucun droit au patient, sinon, peut-être, celui d’être débranché lorsqu’on s’appelle Vincent Lambert. 
Lorsque la mort s’est approchée, dans les derniers jours, là où tout bascule, là encore, la demande a été réitérée, et là encore, il n’a pu obtenir ce qu’il souhaitait auprès de la structure d’hospitalisation à domicile qui l’avait pris en charge. 
La réponse a été celle d’un endormissement progressif, lent, douloureux, inefficace, avec un protocole bien balisé qu’il ne faut surtout pas dépasser car « on aurait risqué de tuer le patient ». 
A l’heure où l’on plongeait à tour de bras les patients victimes du Covid-19 dans le coma artificiel en l’espace de quelques secondes, le répit d’un sommeil salvateur était refusé à un patient en phase terminale. Oui, c’est cela la réalité de la mort en 2020. Douloureuse. Et inhumaine.
 
Christine Berkovicius
 
Avec quel courage tu auras assuré, Christine, malgré un cœur qu’on devinait à ras-bord.
Gérard Bardin

Commentaires

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  1. Merci Christine de ton courage pour ce témoignage fort et émouvant de ces situations trop souvent cachées dans les larmes du deuil.
    Gérard

  2. Je ne sais évidemment rien écrire de bien, sinon dire ma grande tristesse pour un copain de si longue date. Que le ciel lui ouvre grand toutes ses portes

  3. c’est moins la loi qui pose problème que l’incompétence de ceux qui prétendent l’appliquer

  4. Avec mes adieux à Christian je veux dire combien cet article sur le droit à mourir dans la dignité m’a ému. Bravo pour cette vérité toute nue parfaitement résumée !
    Bravo la journaliste Christine

  5. Quelle grande tristesse de savoir cette souffrance endurée par ce Christian plein de gentillesse et son sourire me reste en tête. Merci pour lui de l’avoir accompagné et pour cet article qui rend compte de l’inhumanité de notre société…

  6. Bravo Christine pour ce bouleversant témoignage. Je n’aurais pas dit mieux le sachant (j’ignorais sa volonté à dire vrai).
    Bon courage pour tout et à bientôt. Je prie bien fort pour Christian, sa famille, ses amis, et vous ses comparses de Mag’Centre, journal en ligne à qui je souhaite très très très longue vie.
    Bien à vous,

    • Merci aussi de prier pour que la loi change vite en France parce que nos dirigeants restent sourds à la demande de plus de 90 % des Français de légaliser l’euthanasie en France.
      ça fait 33 ans que je me bats pour obtenir ce droit, et une dizaine d’années que j’accompagne des malades au niveau des formalités pour respecter leur désir d’aller mieux mourir en Belgique et en Suisse.
      Il serait temps qu’enfin, la loi française leur évite ce voyage à l’étranger qui leur fait subir la double-peine, celle de la maladie et celle de l’exil !

      C’est la double-peine pour les malades,

  7. Sommes nous des barbares ? comment accepter ces souffrances inutiles,
    Christian est aussi peut-être mal tombé. Mon pere mort d’un cancer est parti le sourire aux lèvres , dopé ….. à mort. Ca me révolte qu’il n’en soit pas ainsi pour tous . Le droit de mourir dans la dignité,
    Merci pour votre témoignage, ,´
    Christian restera bien vivant dans nos cœurs

  8. dommage de pousser les pions d’une cause grosse de risques éthiques à l’occasion d’un décès.
    RIP M. Bidault !

  9. Merci Christine pour ce témoignage courageux, juste et fort. L’application des directives anticipées de la loi Leonneti dépend du bon vouloir du soignant.
    Malgré toutes nos démarches pour une mort dans la dignité, ma mère s’est vue refuser par un médecin de la sécu officiant l’été dans une Ehpad sans gouvernance la dose de morphine qui lui aurait évité une mort douloureuse.
    Brigitte

    • Non, les hommes ne meurent pas comme des chiens, les chiens meurent bien mieux que les hommes ! Mon chien, que j’adorais, est mort dans mes bras, très âgé et soulagé par une piqure libératrice, mon père en a bavé pendant des mois et a été victime de l’acharnement thérapeutique d’un médecin (femme) qui n’a jamais voulu reconnaitre son état et considérait que la sédation “terminale” était une euthanasie ! Quand on tombe sur ce genre de médecins, là aussi c’est la double-peine !

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