Inquiétude au cinéma Les Carmes

Michel Ferry, animateur gestionnaire du cinéma Les Carmes, nous a confié ses inquiétudes. Les cinémas ont rouvert, certes, « mais l’absence de mesures claires rend notre situation difficile ». En plus des obligations des mesures barrière, les nouveaux films se font rares. Pour offrir au public une offre large, l’équipe a choisi plusieurs cycles de repasses, mais qui ne fonctionnent pas très bien.

« Le marché est très bas, l’offre de films faible et ça ne décolle pas. Dès qu’il y a un film un petit peu porteur, ça marche mieux. Ete 85, par exemple, le film d’Ozon, a un peu cet effet de levier. Abou Leila aussi, mais le film est difficile. Si on avait une offre plus forte, ce serait différent. Il est évident que lorsqu’il y a un film qui marche, il emporte le morceau, il motive, il draine les gens dans les salles. Phénomène d’attractivité du cinéma en général. En salles Art et essai comme en salle des grands circuits. Or là, on a un mois beaucoup plus faible que d’habitude, et pour les circuits des grandes salles, c’est tout aussi violent. Certains films qui avaient prévu de sortir au printemps sont sortis en VoD, d’autres vont se décaler, sortir plus tard. De plus, certains films qui sont le cœur de métier des Carmes sont allés aussi chez Pathé. Ils manquent de films, donc c’est légitime. Mais en sens inverse, j’ai essayé d’avoir des films qui en général vont chez eux, et je n’ai pas réussi. Reste qu’on passe aux Carmes des films formidables qu’ils n’ont pas, comme Felicita en ce moment. Pour l’été, on a misé sur des reprises. Mais certaines motivent le public, d’autres pas, ce n’est pas simple… On doit réajuster, et on n’a pas beaucoup de temps pour le faire parce qu’il faut prévenir le public longtemps à l’avance si on veut qu’il vienne. Les rétrospectives, c’est pareil. On a été un peu déçu des Tarantino, par exemple. Et Bo Widerberg, c’est une catastrophe. Pas assez connu…  »

Michel Ferry, directeur du cinéma Les Carmes. Photo BC

La difficile mise en place des gestes barrière

En plus de l’offre de films faible, la situation autour des masques et de la distanciation est elle aussi source d’inquiétude. « On ne sait pas. Puisqu’on est à l’intérieur, le port du masque semble de rigueur. Mais on est assis sans bouger, comme au restaurant. Donc doit-on le garder ? Aucune mesure officielle n’a été dite clairement, donc on ne sait pas quoi dire au public. »

Il y a chez Michel Ferry un goût d’amertume lorsqu’il évoque tout cela. « On nous a fait rouvrir, et maintenant, on ne nous facilite pas la vie ! On est ravi de fonctionner, bien sûr, mais il y a des spécialistes qui devraient dire ce qu’il faut faire. Comment faire profiter les spectateurs sans inquiétude ? »

Mais où est le soutien à la culture annoncé ?

Et l’amertume s’épaissit encore lorsqu’on aborde l’aspect politique de la culture. « On ne voit pas le bout du tunnel. Je crains que d’ici la fin de l’année, ce soit une hécatombe chez les exploitants privés. Je ne parle pas de ceux qui sont soutenus par une municipalité, une région ou un département. Ceux là tiendront le coup. Mais il y a déjà des salles qui ont fermé. Economiquement, le seul soutient qu’on a est le chômage partiel. Gros paradoxe : si on ouvre, il diminue énormément, et il n’y a aucune autre aide. Donc la seule qu’on peut avoir, on ne l’a plus quand on ouvre, en tout cas plus en entier. » Et ce n’est pas le seul reproche que Michel Ferry adresse aux politiques. « Il y a une inconséquence de la part des gens qui nous gouvernent. On attendait beaucoup de Françoise Nyssen, elle s’est fait avoir par le système. Riesser a été totalement inexistant. En fait, il n’y a pas eu de politique culturelle depuis Lang. Il y a eu des budgets, mais pas de politique réelle. On reste optimiste, mais on tire la sonnette d’alarme. »

Récidive, le prochain festival d’automne

Et pourtant, l’entretien finit sur une note optimiste. Michel Ferry retrouve son enthousiasme habituel en nous parlant de Récidive. « On a une belle perspective, on attend Récidive, le festival de l’automne. Le thème sera 1940 parce que c’est une année cinéma intéressante, avec les idées de propagande et de résistance. Le titre vient du bouquin de Michael Foessel, Recidive 38, qui trace un parallèle entre 1938 et 2018. La sélection est quasi bouclée. Le public va nous suivre, c’est certain. Et l’événement est enthousiasmant. » On en reparlera, bien sûr.

Propos recueillis par BC

Commentaires

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  1. Tenez bon ! Nous ne sommes hélas pas à Orléans mais comptons sur vous à la rentrée pour voir les films qu’on n’a pas pu voir au moment de leur sortie.

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