A vous de jouer !

[Tribune]

Assise devant un café, je me remémore ces visages gênés, ou cette remarque entendue? « Mais pourquoi t’intéresses-tu au sujet des MNA, c’est pas ce qui passionne les gens… »

Oui. Ok. Ce qui me frappe avec le thème des Mineurs Non Accompagnés MNA (en réalité pour définir ces mineurs étrangers non accompagnés) c’est que soit c’est une question qu’on ne veut pas aborder, soit il est utilisé dans un argumentaire concernant la sécurité ou le sujet de l’immigration.

Une forme d’unanimité autour de cette question qui dérange. En dehors de la présence des MNA dans l’actualité à travers des sujets d’urgence, de précarité ou de sécurité, que savons-nous vraiment de ces personnes et de leur situation? Hormis les associations traitant des sujets d’assistance sociale et humanitaire ou des personnes particulièrement sensibilisées, nous, habitants de villes françaises, je crois que nous en savons peu.

Je vous propose de plonger quelques instants dans le sujet.

Commençons par la Convention Internationale des Droits de l’enfant. (CIDE). C’est sur cette base que repose le support et l’aide aux MNA. Cette convention relative aux droits de l’enfant a été adoptée à l’unanimité par l’assemblée générale des Nations Unis et ratifiée par 195 États depuis 1989. Ces états s’engagent tous à défendre et à garantir les droits de tous les enfants, sans distinction, sur leur territoire et à répondre à un certain nombre d’engagements devant les Nations unies :

  • le droit pour l’enfant d’avoir un nom, une nationalité, une identité

  • le droit d’être soigné, protégé des maladies, d’avoir une alimentation suffisante et équilibrée

  • le droit d’aller à l’école

  • le droit d’être protégé de la violence, de la maltraitance et de toute forme d’abus et d’exploitation

  • le droit d’être protégé contre toutes les formes de discrimination

  • le droit de ne pas faire la guerre, ni la subir

  • le droit d’avoir un refuge, d’être secouru, et d’avoir des conditions de vie décentes

  • le droit de jouer et d’avoir des loisirs

  • le droit à la liberté d’information, d’expression et de participation

  • le droit d’avoir une famille, d’être entouré et aimé
    Cette liste semble humainement logique surtout lorsqu’il s’agit d’un enfant, mais replacée dans le cas des mineurs non accompagnés, ces enfants venant d’autres pays, on comprend aisément que cet état ne va pas de soi.

Pour répondre à la préconisation de la CIDE, l’État s’appuie sur les services de l’aide sociale à l’enfance, qui ont en charge l’accompagnement de ces enfants isolés. Cette aide sociale à l’enfance est rattachée aux Départements qui en ont la gestion. Les Mineurs non accompagnés arrivant sur le territoire français doivent donc être accompagnés, aidés, secourus, au regard du respect de la Convention Internationale des Droits de l’enfant.

Ç’est déjà plus clair : c’est un engagement. Il ne s’agit pas d’une discrimination positive particulière.

Cette charte (CIDE) ainsi que la défense du droit de l’enfant, des associations comme l’UNICEF, en ont fait leur mission principale. Certaines villes, comme Orléans, ont d’ailleurs adhéré au label ville « amies des enfants » de l’Unicef, souhaitant ainsi afficher leur souhait de faire respecter ces droits de tous les enfants dans leur ville.

La deuxième question que l’on se pose est : combien sont-ils ?

Selon certains ils seraient nombreux, de plus en plus nombreux, mais qu’en est-il précisément ?

Selon le rapport du Ministère de la Justice (2019) ils étaient :

-8.054 en 2016.

-14.908 en 2017;

-17.022 en 2018;

-16.760 en 2019

répertoriés, avec de manière générale 4,5% de filles pour 95,5% de garçons en provenance des pays principaux suivants : Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Bangladesh, Algérie, Pakistan, Maroc, Tunisie, Afghanistan, Albanie, Sénégal.

Que représentent-ils dans le budget global de l’Aide sociale à l’enfance ? Entre 10 et 20% du budget selon les départements. Comment ces MNA sont-ils répartis sur le territoire ?

Quelques chiffres :

En 2019, ils sont 181 dans le Loiret, 81 dans le Loir-et-Cher et 115 dans l’Eure et Loire. Ils peuvent être ré-aiguillés sur d’autres départements selon leur formation ou les besoins de certains territoires ruraux, dans lesquels ces MNA vont effectuer des apprentissages et répondre à un besoin de main d’œuvre par exemple.

En terme de chiffre donc et même si cette situation est préoccupante, de quoi relativiser mis au regard de l’échelle de la population.

Sans vouloir épuiser le sujet il reste le cas de ces mineurs errants en grande précarité, ou qui ne sont pas répertoriés dans le dispositif, ou à la limite de la majorité. Là encore la présence des associations sur le terrain est fondamentale. Ces associations font le lien en amont mais aussi durant le parcours que ces jeunes accompliront dans notre pays par le lien social qu’elles tissent avec eux. En la matière, le contact avec le sujet culturel qui peut paraître anodin est sûrement un des outils les plus directs qui rapproche, humanise, transmet, soulage ces jeunes dont le parcours sera un défi.

Pourquoi la Culture ?

Car elle va au delà de la langue, elle permet un partage qui redonne à celui qui a quitté son foyer une forme de nouvelle habitation personnelle, de communication, un plaisir, dans lequel il est le bienvenu et où il peut se sentir redevenir acteur ; avec un regard différent porté sur lui dans ce parcours qui sera d’abord un enjeu administratif et social.

Ces programmes culturels souvent autonomes, et à l’initiative d’acteurs culturels associatifs locaux apportent beaucoup ; mais ils n’ont pas encore d’accompagnements pérennisés. Ils semblent donner de bons résultats que ce soit sur le plan psychologique, social et d’accès à la langue française. Souhaitons que l’État et les départements encouragent ces initiatives.

N’oublions pas qu’un nombre important de ces jeunes n’ont pas le français comme langue maternelle et cela devient donc aussi, un outil de cohésion sociale et culturelle.

Nous avons choisi avec Bzoo Mademoiselle ce mois-ci, de vous montrer en partie 2 de l’épisode, le travail qui est mené à Orléans La Source au Théâtre Gérard Philipe avec ces MNA, mêlés à d’autres personnes, par des professionnels du théâtre qui redonnent un regard humain, loin de leur drame à ces jeunes. Et changent aussi le regard de tout un public sur eux.

Et qui m’a amené à vous parler d’eux.

Pour que ces MNA redeviennent tout simplement des enfants qui jouent, leur plus beau rôle.

Béatrice Odunlami
Ancienne élue de la ville d’Orléans
Créatrice de Bzoo Mademoiselle

Bzoo Mademoiselle

Une Web-série qui part à la rencontre de personnalités du monde de la culture, de la politique, personnes engagées dans leur communauté entre la France et les États-Unis.

Chaque épisode est l’occasion de découvrir une personnalité américaine 🇺🇸 en parallèle d’une personnalité française 🇫🇷

Pure Player. Création originale locale, à vocation globale.

 

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