Les entreprises du Loiret profitent-elles de la crise ?

La question mérite en tout cas d’être posée lorsque l’on se penche sur la (longue) liste des grandes entreprises loirétaines qui envisagent de licencier ou de diminuer le nombre de leurs salariés d’ici la fin de l’année ou en 2021. Des suppressions de postes dont certaines n’ont rien à voir avec la crise sanitaire.

Les laboratoires Servier à Gidy, l’une des entreprises du Loiret concernée par des licenciements pendant la crise sanitaire ©DR

Bien sûr, il serait ridicule de ne pas reconnaître l’impact négatif de la crise sanitaire sur la santé des entreprises du Loiret. Certaines vont même mettre la clé sous la porte à l’instar d’Easyflyer qui va fermer, fin décembre 2020, son imprimerie orlénéaise grand format en ligne, avec 35 licenciements, à cause de la baisse drastique des commandes ces derniers mois.

Mais ce n’est pas le cas de toutes les entreprises. Par exemple, le groupe pharmaceutique Servier a annoncé le 28 septembre 2020 la suppression de 287 postes dans sa branche Recherche & Développement « sur la base du volontariat par le biais d’une rupture conventionnelle collective ». Les sites d’Orléans et de Gidy seront impactés par cette décision sans que l’on connaisse pour l’instant le nombre de postes concernés. Toutefois la FCE-CFDT proteste en indiquant que « les salariés ne sont pas des variables d’ajustement à court terme ».

Autre exemple la coopérative céréalière Axéréal basée à Olivet et qui s’apprêterait à supprimer 220 postes en France avec la fermeture d’une centaine de silos dans le Centre-Val-de-Loire. Les négociations sont en cours et vont se poursuivre début 2021.

Les effets de l’ordonnance Joker 

D’autres boîtes comme Inteva, équipementier automobile américain n’ont pas hésité à avoir recours à la disposition “Joker”.des ordonnances Covid. Une mesure pour le moins surprenante qui autorise jusqu’au 31 décembre 2020 une entreprise à se racheter elle-même en effaçant ses propres dettes et en licenciant au passage. Du coup, Inteva qui emploie 177 salariés à Sully-sur-Loire (c’est aussi la ville d’implantation de son siège social) a présenté le 22 septembre dernier son propre plan de reprise devant le Tribunal de Commerce d’Orléans avec une réduction des effectifs de Sully-sur-Loire de 42 postes. Certes, selon la direction la Covid-19 serait « responsable du trop lent redémarrage du secteur automobile » mais les syndicats accusent le groupe « d’avoir délibérément investi en Roumanie (…) et de profiter aujourd’hui des conditions du gouvernement pour “effacer son ardoise” (169 millions de créances) en faisant payer le prix fort à ses salariés ».

Et ce n’est pas fini. Citons l’usine Duralex à la Chapelle Saint-Mesmin (248 salariés) placée en redressement judiciaire en septembre. Selon le délégué syndical CGT Pascal Colichet c’est  « la gestion de l’entreprise par les actionnaires qui a mené à cette situation » comme il l’a déclaré le 7 octobre dernier sur France Bleu Orléans. Des syndicats et des salariés qui craignent à présent une liquidation judiciaire.

L’entreprise Duralex, fleuron national du verre de cantine, a été placé en redressement judiciaire le 7 octobre 2020. ©Elodie Cerqueira

Le groupe suédois Sandvik, dont le siège social est à Orléans-la-Source, a annoncé le 14 octobre l’arrêt de sa production orléanaise d’outils coupants pour l’aéronautique et l’automobile avec le licenciement de 81 salariés (sur 183). Les départs sont programmés au printemps prochain. Des solutions d’accompagnement (préretraites, aides à la mobilité, formations..) seront proposées.

Enfin, mais la liste n’est malheureusement pas exhaustive, Maury Imprimeur (632 salariés) a annoncé début octobre huit licenciements (3 personnes au service devis à Malesherbes et 5 chefs d’équipes au service façonnage à Manchecourt). La direction invoque « une activité économique catastrophique. Il faut trouver les moyens d’alléger nos coûts » tandis que selon un représentant du personnel du CSE (comité social et économique) « on met ça sur le dos de la Covid, mais on demande des documents qui justifient que ça va si mal. (…) La baisse des effectifs est déjà présente entre 2018 et 2019 de l’ordre de 3,50 % représentant déjà une diminution moyenne de 25 personnes ! Rien à voir avec la Covid-19 ! »

Les entreprises ont aussi curieusement tendance à utiliser les mêmes éléments de langage à savoir « l’amélioration de la performance, visant à renforcer l’efficacité durable du modèle économique » Une formule qui peut aussi cacher les fameux accords de performance collective créés en 2017 par la loi travail et qui visiblement connaissent un grand succès depuis la crise sanitaire et seraient même recommandés par la Ministre du Travail. 

Cependant, le pire est à craindre en 2021 avec l’arrêt des aides de l’État et le début du remboursement des prêts accordés durant la crise sanitaire. Des entreprises mais aussi des commerces pourraient bien être obligés de mettre la clé sous la porte, notamment dans le domaine de la restauration, de la culture et de l’événementiel.

Sophie Deschamps

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