Frustration et incompréhension à l’Arboretum des Barres

Programmera, déprogrammera ? Ouvrira, ouvrira pas ? Le gymkhana devient un peu compliqué pour l’Arboretum national des Barres qui prévient dans un communiqué de l’annulation de son ouverture ce week-end, face à « l’indécision de la Préfète ». Considéré comme « simple » parc et jardin et non comme « site culturel », le site de Nogent-sur-Vernisson (Loiret) ne peut en effet prétendre à la règle des 30 km, le privant d’un vivier de visiteurs. Un comble pour ce fleuron, ancienne propriété des Vilmorin, qui abrite l’une des plus riches collections botaniques d’arbres et arbustes d’Europe !

Au-delà des superbes collections à parcourir, l’Arboretum réserve d’étonnantes surprises comme cet arbre déraciné volontairement conservé ainsi pour en admirer toutes les racines. ©EB

Roselyne Bachelot, Ministre de la Culture, l’a annoncé mercredi : la 19e édition de la Manifestation « Rendez-vous aux Jardins » se tiendra du 4 au 6 juin 2021 sur le thème « Transmission des savoirs ». Cela pourrait résonner comme une véritable provocation ! Comment peut-on associer d’un côté le patrimoine des parcs, des jardins et des arboretums aux connaissances et savoir-faire des jardiniers, paysagistes, horticulteurs qui voyagent depuis la Renaissance à travers des traités d’art, des plans ou encore des gravures, et dans le même temps les écarter d’une dimension culturelle ? Marie Degaye, en charge du dévelopement au Patrimoine Naturel de France, est très remontée. « Il y a trois arboretums dans le Loiret, rien que cela c’est une écriture culturelle ! Un arboretum, c’est pas juste un jardin, un site de conservation, c’est pas secondaire ! ».

« Dans le trou de la raquette »

Pour mémoire, en 2017, la Mission Val de Loire avait été à l’initiative de l’opération « Jardin de la France » qui réunissait plus de 70 jardins de la région autour du Val de Loire UNESCO, dont les jardins sont une composante majeure. Ce à quoi Marie Degaye fait remarquer : « nous sommes sites culturels quand ça les arrange ! L’Arboretum des Barres a réussi à ouvrir seulement un week-end cette année. Et on n’est pas sûr d’ouvrir le week-end du 1er et 2 mai. On attend la décision de la Préfète du Loiret… ». Car si les parcs et jardins ont le droit d’être ouverts, seuls les visiteurs d’un rayon de 10 km peuvent venir. « Un bassin trop réduit. Les Arboretums sont loins des villes forcément, sauf le Conservatoire de l’Ilex en zone plus urbaine ». Alors que si les arboretums étaient qualifiés de « lieux culturels », les Loirétains auraient le droit de s’y rendre. « On est dans le trou de la raquette : on a le droit d’ouvrir mais les gens n’ont pas le droit de venir nous voir. Aussi, sous réserve que le confinement ne soit pas prolongé et que la Préfète ait reconnu les arboreta du Loiret comme sites culturels, la Communauté de Communes Canaux et Forêts en Gâtinais ouvrira l’Arboretum national des Barres les 8 et 9 mai en compensation de ce week-end du 17 et 18 avril ».

Une perfusion qui dure

Avec son allure de treillis militaire, ce Pin Napoléon offre une écorce étonnante. ©ArboretumdesBarres

Car depuis 2019, c’est la Communauté de communes Canaux et Forêts en Gâtinais (Châtillon Coligny) qui gère l’accueil du public de l’Arboretum des Barres. Pour mémoire, le site national, ancienne propriété de la famille Vilmorin et l’une des plus riches collections botaniques d’arbres et arbustes d’Europe, avait été menacé de fermeture fin 2018, quand l’Office national des Forêts (ONF) s’en était dégagé face au coût de fonctionnement trop élevé et un déficit de 300 000 € par an : « on se souvient de la levée de bouclier des acteurs locaux », rappelle Delphine Courbier, Directrice des Services à la Communauté de Communes.

Le temps que la préfecture trouve une solution, la Communauté de communes est alors désignée potentiel repreneur. Décision à laquelle les élus se sont opposés face à de tels coûts de fonctionnement. Une solution alternative a donc été mise en place en 2019 : gestion des collections et l’entretien des 35 ha par l’ONF, signature d’une convention avec l’association Patrimoine naturel de France (Arboretum des Grandes Bruyères) pour une mise à disposition de leur agent, Marie Degaye, pour l’organisation de l’accueil et de l’événementiel, accueil du public par l’Apageh (Association pour l’avenir du Gâtinais et de ses habitants), enfin gestion de l’éducation à l’environnement, visites guidées, et accueil de groupes hors jours d’ouverture par l’association Ecolokaterre. La communauté de communes s’occupant, elle, de la gestion du site et du suivi et de l’entretien des bâtiments et des installations, « avec un budget pour nous de 187 000 € en 2020, précise Delphine Courbier, soutenu par l’État (50 000 €), la Région (60 000 €/an), le Département (20 000 €/an), l’Agglo Montargoise et Rives du Loing (15 000 € en 2019 et 2020), la CDC du Giennois (4 000 €), la CDC de la Cléry, du betz et de l’Ouanne (4 000 €) et enfin le PETR (10 000 €). « Nous allons en poursuivre en 2021-2022 notre mission de maintien sous perfusion d’accueil du public mais nous sommes dans du provisoire qui dure… ».

Une saison 2020 malgré tout positive
Avec le confinement de 2020, l’Arboretum a multiplié les créneaux d’ouverture pour compenser avril et mail en passant d’un week-end par mois en 2019 à deux en 2020. « Avec plus de 5000 visiteurs, nous avons dépassé les 4000 de 2019 », se réjouit malgré tout Delphine Courbier. Même si nous n’avons pas pu capter les 2000 scolaires ». Avec la mise ne place de nouveautés (grimper dans l’arbre à 54 m de haut, vente de plants d’arbres de l’arboretum par un pépiniériste), l’Arboretum espère pouvoir réouvrir pour le week-end de l’Ascension. « On va essayer de tenir en programmant, déprogrammant, reprogrammant… ! La Communauté de communes fait ce qu’elle peut pour faire vivre le site mais ce n’est pas sa vocation et n’en a pas les moyens financiers. La CDC ne s’est pas engagée dans ses compétences à conserver l’arboretum. C’est du ressort de la Région ».

Estelle Boutheloup

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Commentaires

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  1. Ce magnifique endroit est un véritable musée du végétal et des arbres parfois rares. Il pourrait devenir un lieu de promenade apprécié des amateurs s’il bénéficiait d’un soutien à la hauteur de l’intérêt qu’il suscite ! Il faut aussi plus de publicité et de communication pour attirer les gens et peut-être penser à une attractivité de nature à attirer tous les membres des familles. Il faut aussi que ceux qui “gouvernent” notre existence soient un peu plus cohérents, c’est bel et bien un lieu culturel en plein air qui mérite un autre sort !

  2. Il est indispensable que le public puisse accéder à l’Arboretum des Barres, un lieu extraordinaire avec une variété d’essences remarquables. Espérons que la préfète change de position.

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