La vie musicale trépidante de Jean-Christophe Cholet, pianiste

Jean-Christophe Cholet, pianiste et compositeur montargois (Loiret) qu’on a fréquemment entendu à Orléans quand ses tournées internationales le lui ont permis de jouer, a sorti ces derniers mois deux enregistrements très différents. Le premier, Amnesia, des improvisations au piano solo, est lié au confinement, comme il nous le raconte. Le deuxième, Back in Tunisia, est un disque de jazz arabo-andalou, si tant est que la catégorie existe, avec une grande formation de huit musiciens. Il nous a raconté ces deux aventures avec beaucoup de chaleur et d’ouverture.

Jean Christophe Cholet – Cliché JB Millot

Son cd d’improvisation en solitaire au piano, Amnesia, est sorti en octobre dernier. Mais il est lié à la première période de confinement du printemps. « Je me suis retrouvé isolé tout seul chez moi à Montargis. Mon ami pianiste, compositeur et arrangeur suisse Mathias Rüegg m’a appelé. Tous les jours pendant deux mois, il a composé une pièce de piano et il a demandé à plusieurs pianistes européens de les jouer. Il m’en a confié trois. J’ai enregistré les pièces pour Mathias chez moi, sur mon Steinway B. Et je me suis dit que je pouvais continuer en improvisant. »

Photo JB Millot

Approfondir le lien entre impro et compo…

J-C.C. : Le lien entre impro et compo m’intéresse depuis longtemps. L’improvisation, c’est de la composition lente, alors que la composition, c’est de l’impro réfléchie. Je donne une forme très construite à mes improvisations. D’ailleurs, si on écoute attentivement Amnesia, on s’aperçoit que par moments, je prends mon temps. Je garde la conduite du propos mais comme on ne sait pas tout à fait où on va, il y a une dilatation du temps, c’est volontaire. Je ne mets pas mes doigts n’importe où si je ne sais pas où les poser. J’ai joué, j’ai réécouté les enregistrements, j’en ai gardé certains. J’ai fait ce disque rapidement, 3 fois 20 minutes… Et si on le sait, peut-être qu’on peut l’écouter autrement.

Je vais vers un triptyque. Il y a un volume II déjà enregistré, avec mon fils qui était là, qui m’a conseillé. Uniquement avec des sons dans le piano. Ce n’est pas vraiment le volume II du premier, c’est une autre fonctionnalité musicale. Et c’est le confinement qui a provoqué tout ça.

Du solo d’Amnesia au grand format de Back in Tunisia, l’opposé ?

J-C.C. : Oui, c’est un grand écart. On est là sur quelque chose de très écrit. Musique arabo-andalouse, on se balade entre Algérie et Tunisie. Il y a une compo du batteur Karim Ziad que j’ai arrangée, il y en a une autre du violoniste Iyadh Labbene sur laquelle Dorsaf Hamdani, la chanteuse, a mis des textes. Tout le reste, ce sont des arrangements de Geoffroy de Masure. Mais c’est plus mélangé que dans le premier cd qui était vraiment entièrement à base de traditionnel.

L’histoire a commencé il y a longtemps maintenant. Geoffroy m’a dit qu’il avait un projet qui n’avait pas abouti. Il avait commencé à le réaliser en Tunisie, et puis il était jeune, il n’avait pas encore assez l’habitude d’organiser un tel travail. Donc quelques années plus tard, vers 2010, on a repris ensemble le projet. Beaucoup de musique était prête, et on a fait le premier volume, Nights in Tunisia. On a rajouté des choses à ce qui restait pour un deuxième volume.

Un grand intérêt pour les autres musiques ?

J-C.C. : J’ai depuis longtemps la curiosité d’autres musiques, qu’elles soient traditionnelles ou pas. D’ailleurs le premier projet que j’ai fait comme ça, c’était avec Mathias Rüegg, la suite alpestre. Il s’était occupé des mélodies qui venaient des alpes suisses et autrichiennes, et moi des alpes françaises et italiennes. C’était le premier travail que j’ai fait sur des musiques d’ailleurs. Ou des ponts avec la musique classique. Et j’en ai fait pas mal…

Back in Tunisia, grand format de huit musiciens, difficile à tourner…

Jean Christophe Cholet et son groupe Diagonal. Ph Malik Chaib

J-C.C. : Après le 1er cd, oui, on a fait des concerts. Il y avait la suite logique répétitions, créations, enregistrements, concerts. On a joué en Algérie deux fois, une fois au zénith de Constantine, une fois dans les locaux des affaires culturelles d’Alger. Mais ce n’est pas évident. Le public au Maghreb n’aime pas trop qu’on touche à la tradition. C’est la dénaturer… Ce qui peut paraître tout à fait courant en Europe, prendre ce qu’on veut, le déformer, se l’approprier… Là bas, ils sont plus réticents. Lors du concert d’Alger, la presse est venue nous interroger là-dessus. Un peu critique. Et à cause de cela, les portes ne sont pas ouvertes partout. 

Néanmoins, l ‘accueil de la presse et du monde de la musique européen a été très enthousiaste. Même si les ventes de cd sont faibles, comme dans tout le jazz, l’originalité et la qualité ont largement été reconnues. Et Jean-Christophe Cholet continue son brillant parcours. Il est déjà en train d’écrire sa prochaine aventure. Complètement différente. Un grand format aussi, avec Mathieu Michel, le trompettiste complice de longue date, l’accordéoniste Didier Ithursarri, le contrebassiste suisse, Patrice Moret et un quatuor classique féminin, Sine Qua Non. Encore un pont entre deux domaines.

Ca donne envie, non ?

Propos recueillis par Bernard Cassat

Amnesia

 

 

 

Back in Tunisia

 
 
 
Jean-Christophe Cholet, piano, compositions
Geoffroy De Masure, trombone, compositions
Iyadh Labbene, violon
Dorsaf Hamdani, voix
Vincent Mascart, saxophones
Geoffroy Tamisier, trompette et bugle
Karim Ziad, batterie
Linley Marthe, basse

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